Lorsqu'on évoque la pollution des océans, les images qui viennent à l'esprit sont souvent celles déchirantes de tortues marines et oiseaux étouffés par des débris flottant à la surface des eaux. Pourtant, des milliers de mètres sous la surface des eaux, sommeille une réalité encore plus alarmante. La plupart des déchets jetés dans les océans ont tendance à s'enfoncer lentement vers le bas pour recouvrir petit à petit le plancher marin. Or, dans cet environnement sombre, pauvre en oxygène et aux basses températures, les détritus peinent à se dégrader. La décomposition qui, sur Terre mettrait quelques années, peut prendre des décennies dans les profondeurs océaniques. Dans une nouvelle étude, des chercheurs de l'Institut de recherches de l'aquarium de la baie de Monterey (Mbari) tirent ainsi la sonnette d'alarme sur les conséquences encore intangibles qu'ont ces nouveaux paysages sous-marins sur la biodiversité. Au cours des 22 dernières années, les océanographes ont exploré à l'aide de caméras télécommandées le plancher océanique au large de la Californie jusqu'au Canada. A l'aide des séquences enregistrées, ils ont répertorié un par un les déchets dans un catalogue recensant plus de 1 500 objets. Une analyse de ces résultats a été récemment publiée dans la revue Deep sea research. Sans grande surprise, le plastique arrive en tête des débris répertoriés. Plus de la moitié des objets en plastique retrouvés sont des sacs. Ces déchets sont particulièrement dangereux pour la biodiversité car, sous l'effet des courants, ils s'enroulent à la base des coraux et finissent par tuer l'organisme. En deuxième position, arrive le métal avec des canettes et des boîtes de conserve, puis les fils de pêche, les bouteilles en verre, le carton, le bois et le tissu. Si certains organismes ne survivent pas à ces environnements pollués, d'autres en tirent parti et colonisent les détritus. Aussi, un pneu jeté peut faire office d'habitat pour certains spécimens marins. Ce nouveau mode d'habitat est toutefois un profond changement car ces espèces sont normalement habituées à coloniser des surfaces molles dans un environnement constitué principalement de vase. Les chercheurs espèrent que les résultats de leurs recherches inciteront les personnes à réduire, réutiliser et recycler leurs déchets. «Le seul moyen de lutter contre ce problème est d'éviter d'abord que tous ces objets ne pénètrent dans l'océan», conclut pour OurAmazingPlanet Susan von Thun, co-auteur de l'étude. E. P.