A son indépendance en 1962, l'Algérie est devenue la Mecque des révolutionnaires. Une terre d'accueil et d'asile pour tous ceux qui luttent pour la liberté. Elle a hébergé des femmes et des hommes, qui de l'Angola au Brésil, de l'Afrique du Sud au Portugal, de la Palestine aux Black Panthers et au Mozambique combattaient le colonialisme, l'apartheid, le salazarisme, le racisme et les dictatures d'Amérique du Sud. C'est dans ce contexte de résistance et de lutte que Nelson Mandela, le premier président noir de l'Afrique du Sud, est venu en Algérie où il a suivi, ainsi que des membres de l'ANC (African National Congress), une formation militaire pour résister au régime d'apartheid en Afrique du Sud. Invité à Alger par le président Ahmed Ben Bella pour une parade militaire, Nelson Mandela acceptera la proposition du premier chef d'Etat de la République algérienne indépendante de soutenir financièrement son parti, l'ANC, et d'installer en Algérie des camps d'entraînement pour la rébellion sud-africaine anti-apartheid. C'est de là qu'apparaît pour la première fois la jonction Algérie-Afrique du Sud. Accusé de sabotage et de complot contre l'Etat, Mandela est condamné à la prison à vie lors du procès de Rivonia en 1964. Mais Alger a continué à soutenir l'ANC sur tous les plans notamment militaire où, à partir de 1965, plusieurs militants de l'ANC venaient secrètement en Algérie pour se former. En février 1990, Nelson Mandela est libéré après 27 ans de détention. Son attachement à l'Algérie le fera revenir en mai 1990. A cette occasion, il avait déclaré: «Je suis algérien, je suis arabe, je suis musulman!». Nelson Mandela a voulu affirmer l'impact de l'Algérie et de sa révolution sur la lutte du peuple sud-africain contre l'apartheid. Il n'a d'ailleurs jamais cessé de rappeler qu'il a été «le premier sud-africain à avoir été entraîné aux armes en Algérie. Quand je suis rentré dans mon pays pour affronter l'apartheid, ajoute-t-il, je me suis senti plus fort». La relation entre l'Algérie et l'Afrique du Sud se renforcera encore plus à la fin de l'apartheid en 1994. Le pays de Mandela, fort aujourd'hui d'une population de plus de 50 millions d'habitants, a pu mettre fin à des décennies d'isolement diplomatique et a rapidement imprimé sa marque en Afrique. L'Afrique du Sud, dont le territoire ne recouvre que 3,75% de l'Afrique et dont la population n'en représente que 6%, fait figure de géant économique à l'échelle du continent. Son PIB représente en effet 25% de celui de l'ensemble de l'Afrique, 33% de celui de l'Afrique subsaharienne et 75% de celui d'Afrique australe. L'économie sud-africaine est développée principalement autour de l'exploitation de ressources naturelles abondantes (or, platine, diamant, ferrochrome, charbon…), avec l'émergence d'un puissant secteur de services, notamment financiers, la Bourse de Johannesburg étant, de loin, la première en termes de capitalisation du continent africain. En plus de sa force économique, l'Afrique du Sud est considérée comme un modèle politique pour les peuples africains. Ainsi dotée d'une économie dynamique et d'une nouvelle politique qui lui a offert une légitimité morale, l'Afrique du Sud a étendu son influence à travers le continent et fait entendre sa voix dans le concert des nations. Le leader du continent africain a consolidé ses relations avec les deux autres puissances de l'Afrique à savoir l'Algérie et le Nigéria et cela dans le seul espoir de mener le continent vers le développement à travers l'axe Alger-Johannesburg. C'est dans ce contexte que le Nepad (Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique) a vu le jour. Initié par plusieurs chefs d'Etat africains dont Thabo Mbeki, Abdelaziz Bouteflika, le Abdoulaye Wade, Olusegun Obasanjo, et Hosni Moubarak, le projet de développement Nepad cherche à pallier le retard immense qu'a pris l'Afrique en matière de développement sur la scène internationale. En juillet 2001, au sommet des chefs d'Etat de Lusaka, le Nepad a vu le jour. En septembre 2002, une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies en a fait le canal principal du soutien de l'ONU à l'Afrique. Aligné sur les principes de la bonne gouvernance démocratique, le Nepad propose une double stratégie. D'une part, il met en avant la région, et non plus l'Etat, comme espace central du développement de l'Afrique. D'autre part, il fait appel au secteur privé comme acteur clé de la croissance et de l'investissement. Afin de promouvoir le nouvel ordre continental dessiné par le Nepad, un nouvel axe entre Alger, l'Afrique du Sud et le Nigeria a vu le jour. Ces pays entretiennent en effet des relations soutenues. Cette dynamique s'est aussi traduite par un rapprochement diplomatique entre Alger, Pretoria et Abuja, favorisant une implication conjointe dans les affaires internationales. Ce trio est ainsi devenu le principal moteur d'une transformation de la donne régionale africaine, et plus particulièrement de la restructuration de l'Organisation de l'unité africaine en Union africaine (UA) et de la promotion du Nepad. Le trio africain aspire à fonder une nouvelle relation de partenariat entre l'Afrique et la communauté internationale. Il aspire également à poser les clauses fondamentales du développement du continent : initiatives pour la paix, bonne gouvernance, libéralisation des échanges…. Entre Alger et Johannesburg, il y a en plus de la collaboration pour le développement du continent africain, une étroite relation bilatérale. La lourde contribution de l'Algérie à la lutte du peuple sud-africain pour la liberté, et son engagement de tous les instants pour la disqualification totale de l'apartheid, lui a valu de profondes sympathies au pays de Nelson Mandela. Marchant sur les pas de ses prédécesseurs, le Président sud-africain œuvre aujourd'hui à affermir davantage son partenariat avec l'Algérie. «L'Algérie est le partenaire le plus important pour l'Afrique du Sud dans la région du Maghreb et un allié sûr dans l'intégration et le développement de l'Afrique sur le plan régional et continental», avait déclaré son ministre des Relations internationales et de la Coopération, lors des travaux de la 5e session de la haute commission mixte algéro-sud-africaine, tenue dernièrement à Alger. H. Y.