De notre correspondant à Constantine A. Lemili Fermé depuis plus d'une douzaine d'années, le marché couvert communal du Khroub rouvre timidement ses portes. La raison ? Paradoxalement, sur la raison le discours est identique aussi bien chez les anciens locataires de stands qu'auprès des représentants des pouvoirs. Que ces derniers appartiennent à l'exécutif ou membres de l'assemblée élue «La présence de deux espaces commerciaux informels nés de fait de la fermeture du marché communal pour des raisons de réhabilitation et qui, désormais, ont pris racine ont tué son activité», nous répondra un élu dont le parti politique avait construit lors des dernières élections communales le thème de sa campagne électorale sur la restitution des lieux à leurs propriétaires et surtout l'éradication de tout autre lieu de vente qui ne serait pas réglementé. Le respect des engagements pris par l'ancien candidat est là et coule de source. Pour un autre élu, celui-ci vice-président, «il n'y a pas d'échappatoire possible et la réalité est là crevant le regard. Un espace commercial réhabilité pour près d'un milliard de centimes mais dont l'activité reste toutefois très restreinte et une partie de ses anciens occupants au chômage ou reconvertis dans le commerce informel avec les tracas administratifs en moins est-il important de le souligner constitue quand même un grave aveu d'échec pour les pouvoirs publics». Sur place, seuls quelques stands sont sommairement garnis, ceci comme dans l'intention d'attirer l'attention de la clientèle dans la mesure où les étalagistes craignent de trop investir dans un large éventail de produits (fruits, légumes, légumes secs, huiles, viandes rouges et blanches…) face au risque de difficulté si ce n'est d'impossibilité d'écoulement. Nous remarquons un jeune très affairé autour d'une impressionnante cargaison de tomates de très belle qualité et lui demandons le prix du kilogramme : «Non, tout ce que vous voyez ici est déjà vendu et j'ai une commande encore plus importante pour demain qui est déjà payée rubis sur ongle.» Non sans étonnement, nous lui rappelons qu'il s'agit d'un marché de vente en détails et sa réponse est encore plus étonnante : «…A qui voulez-vous que je vende…je peux vous faire une faveur en vous cédant deux ou trois kilos et vous laisse la liberté du choix des meilleurs pièces et cela ne sera qu'à titre exceptionnel.» En réalité, en l'espace d'une heure de temps et après répartition des cageots pour divers clients, notre interlocuteur remettra un par un son lot à chacun des commanditaires lesquels, comble de l'ironie, appartiennent au commerce informel. Autrement dit le marché réglementé alimente celui informel et le paradoxe est encore plus renversant : le prix de cession ‘'en gros''du kilogramme de tomate (35 DA est revendue entre 45 et 50 DA. Autrement dit un gain de 10 à 15 DA sans trop d'effort pour des commerçants (ceux de l'informel) qui n'arrêtent pas de se porter en victimes toutes désignées des pouvoirs publics et de leurs instruments de répression. Lesquels, est-il alors encore besoin de le rappeler ne répriment rien pour une cause que tout le monde connaît : la préservation de la paix sociale. Cette bizarrerie est évoquée avec le vice-président d'APC, pour lequel néanmoins «une solution va être trouvée notamment pour libérer une artère initialement destinée à usage piétonnier et qui malheureusement a très vite été squattée pour devenir littéralement une rue marchande et susciter de fait en raison de l'exiguïté qui s'en est suivie la naissance d'une excroissance consistant en l'émergence d'une autre place commerciale mitoyenne». Effectivement, d'exceptionnelle la situation va s'officialiser à telle enseigne que successivement tous les P/APC depuis l'année 2000 viennent y effectuer leurs achats. Au même titre que l'ensemble des élus et des cadres de l'exécutif par ailleurs. Concluons enfin sur la visite rendue aux lieux par le ministre du Commerce, il y a quelques années, et les grandes promesses faites en ce sens pour l'amélioration des prestations et de la préservation du cadre de vie des riverains. Bien entendu, tout cela est resté au seul stade de l'intention. Pas plus. Le marché communal du Khroub est l'un des lieux dont se sont toujours enorgueillis les responsables locaux qui accordent, à la limite de la revendication maniaque, le plus grand intérêt à tout ce qui fait l'identité de leur ville. A. L.