Cette semaine, la rentrée des classes a remis sur le tapis, encore une fois, la question de la réforme du système éducatif et l'allègement des programmes scolaires. Parallèlement, nous sommes à quelques semaines seulement de la 18e édition du Salon international du livre à l'occasion duquel certains se poseront l'éternelle question «est-ce que l'Algérien lit ou pas ?» Ces deux évènements n'ont d'apparence aucun lien entre eux, en dehors de l'acte de lire qui a disparu depuis longtemps dans nos écoles et chez la majorité de nos étudiants en Lettres. Et si nos technocrates et autres «experts» en élaboration des programmes scolaires se décident enfin à quitter un moment leurs tours d'ivoire pour voir que l'absence de lecture chez l'Algérien n'est pas une fatalité et que les choses peuvent changer si chacun met du sien pour renverser la vapeur. Il n'y a pas de recettes miracles, en dehors d'un travail de réflexion qui associe non seulement la famille de l'éducation mais aussi la grande famille de la culture qui a sa propre idée à ce sujet. Car, il ne suffit pas de construire des établissements culturels et de leur affecter des fonctionnaires pour permettre à la culture d'avoir la place qui lui sied au sein de la société. Enseigner aux enfants la peinture sans leur faire rencontrer un artiste-peintre, leur apprendre la musique sans leur faire rencontrer un musicien, ou encore, leur enseigner l'histoire de l'Algérie sans leur faire visiter les lieux de notre mémoire collective, c'est comme enseigner l'informatique sans utiliser un ordinateur. Il n'est nul besoin de rappeler que les festivals organisés par-ci, par-là sont plus qu'une nécessité pour l'animation de nos villes. Toutefois, ils devraient être le couronnement d'un effort consenti tout au long de l'année et le fruit d'un investissement symbolique à tous les niveaux. Ceci dit, l'Algérie renferme un gisement de futurs musiciens, écrivains, poètes et autres artistes qui permettront à notre pays de rayonner sur le plan culturel si toute cette énergie est canalisée. Constat : si nos adultes ne fréquentent pas les musées, les auteurs ne vendent pas souvent plus d'un millier d'exemplaires de leurs œuvres, les librairies cèdent la place à la culture du fast-food, ce n'est que par la faute d'un long processus de stérilisation quand ils étaient enfants. Le département de l'éducation consentirait peut-être à opérer un sérieux rapprochement avec celui de la culture pour que nos musées revivent, nos cinémathèques se remplissent comme avant et pour que le commun du peuple consacre un budget pour le livre. Il est sûrement temps que l'école s'ouvre concrètement aux arts et à la culture. Inviter les artistes, tous domaines confondus, dans les établissements scolaires et offrir l'opportunité aux enfants de flirter avec le monde de la culture servira à révéler des talents cachés, d'une part, et à rendre l'école un lieu de vie. Et pas seulement ça. Si on change notre façon de percevoir l'école qui, actuellement, sert à produire des diplômés sans débouchés, nos enfants auront une autre approche sur la culture, sur le livre et toutes ces anciennes Cités, vestiges d'une histoire froidement enseignée en classe et piétinées par les adultes qui ne voient en elles que des pierres envahies par les herbes sauvages. Consacrer du temps pour la culture à l'école, en contact direct avec l'artiste, c'est aussi une manière d'alléger le cartable de nos enfants, de lutter contre la déperdition scolaire et de faire participer la culture à la relance économique du pays. Parce que notre pays a aussi besoin de littérature et de poésie pour avancer. L. M.