Par Sihem Bounabi Une ambiance conviviale et familiale régnait, hier dès 10 heures de matin à l'esplanade de Ryad El Feth, où se poursuit la 6e édition du Festival international de bande dessinée d'Alger (Fibda). Une des expositions les plus intéressantes de cette sixième édition attirant de nombreux nostalgiques et de nouveaux adeptes, est l'exposition consacrée à Corto Maltese. Déclinée sur plusieurs thèmes, à l'instar de ceux intitulé «Attitudes», «Récits» et «Sentiments», les amateurs de BD sont conviés à apprécier les aquarelles ou les planches en noir et blanc dédiées à Corto Maltese, un personnage culte des «graphic novel européennes». Mais il est aussi un véritable mythe littéraire du XXe siècle. C'est un voyageur, un marin ironique qui allie un aspect et un caractère méditerranéen à une culture anglo-saxonne. Corto, qui en espagnol signifie «rapide», a été créé par le grand dessinateur vénitien Hugo Pratt en 1967. Ainsi, Corto est un «antihéros qui préfère la liberté et la fantaisie à la richesse, c'est un Ulysse moderne capable de nous faire voyager dans les lieux les plus fascinants au monde». Michel Pierre qui a consacré une biographie au plus romantique des marins-aventuriers, était l'invité exceptionnel de cette 6e édition, où il a animé une conférence dédiée au personnage et à son créateur, souligne que cette œuvre romanesque est aussi sublimée par le fait qu'elle soit une œuvre. Ainsi, il a expliqué qu'il faut aussi voir dans cette œuvre romanesque ce qu'elle est avant tout, un univers graphique, le fruit d'un exceptionnel talent de dessinateur et de metteur en scène. S'il avait été cinéaste, on évoquerait un génie du montage, du mouvement de caméra, de l'éclairage, du zoom et du plan large, du travelling et de la bande-son. Et c'est sans doute parce que Corto Maltese se trouve à la confluence du roman, de l'illustration et du cinéma qu'il demeure une création qui ne finit pas de séduire et de faire rêver. Il faut souligner qu'Hugo Pratt, le créateur du personnage charismatique de Corto Maltese, qui déclarait avoir appris «à dessiner en Ethiopie et à écrire en Argentine», est considéré comme l'inventeur de la bande dessinée littéraire, avec son premier album La ballade de la mer salée, considéré comme le premier «roman dessiné». L'œuvre d'Hugo Pratt est intimement liée à sa vie. Ainsi, «son style, de plus en plus épuré au fil du temps, qui confine parfois aux limites de l'abstraction, a marqué et continue d'influencer des générations de lecteurs et de dessinateurs». La créativité d'Hugo Pratt ne se limite pas à la bande dessinée, il s'intéressait aussi à la peinture, et bien qu'il soit considéré comme l'un des maîtres du noir et blanc, il a réalisé de nombreuses aquarelles. En plus de nombreuses expositions et ventes dédicaces qui se tiennent sous les différents chapiteaux, en cette matinée de vendredi, l'espace Malek où se déroule l'atelier de dessins pour enfant affichait déjà complet dès 11 heures. Encadrés par de nombreux animateurs, les enfants à qui on a donné des feuilles, de la peinture et une kyrielle de crayons et feutres couleurs s'en donnaient à cœur-joie au milieu des rires. A propos de ces artistes en herbe qui dessinent des maisons, des arbres, ou ce qui passe par leur imaginaire, la dynamique Magda de l'association Malek souligne que «les enfants apprécient ces espaces de divertissement où s'expriment leur esprit créatif. On met à leur disposition tout le matériel nécessaire sans aucune contrainte, le plus important c'est qu'ils puissent s'exprimer en toute liberté» sur le plan graphique et artistique. S. B.