La cybercriminalité inquiète les pouvoirs publics. De l'aveu même de nombreux juges et responsables du ministère de la justice, le volume d'affaires relatives aux infractions commises sur ou par le biais de la Toile est en train de prendre des proportions alarmantes au cours de ces dernières années en Algérie. Dans un pareil contexte, le premier ministre s'apprête à déposer prochainement sur le bureau de l'APN un texte réglementaire qui apportera aux services de sécurité les outils adéquats leur permettant de pourchasser les criminels du «cyberespace» algérien. Ce nouveau projet de loi obligera, entre autres, les fournisseurs d'accès à conserver les données de leurs abonnés durant une période pouvant aller jusqu'à 2 ans, comme le recommande la convention internationale sur la cybercriminalité adoptée à Budapest en 2001. Il convient de signaler à ce propos que le dispositif juridique existant dans le code pénal amendé en novembre 2004 ne prémunit pas l'Algérie contre les dangers liés à la cybercriminalité. Et pour cause, ces amendements incriminent seulement les actions malveillantes dirigées contre les systèmes de traitement autorisé des données. Cependant, plusieurs experts observent que le nouvel arsenal juridique est loin d'être le remède miracle contre les dérives du Net dans notre pays. L'utilisation saine du Web serait avant tout une question de conscience civile que nos citoyens doivent acquérir. Cette culture fait, malheureusement, cruellement défaut à l'Algérien encore fasciné par les plaisirs que lui procure le clic. Toutefois, avec un nombre d'internautes qui est passé de 10 000 en 1991 à pratiquement 5 millions cette année, tout en sachant que d'un seul fournisseur d'accès le nombre est passé à plus de 71 durant cette période, il s'avère que les autorités publiques n'ont pas su accompagner la société civile dans son effort d'adaptation aux nouvelles technologies d'information et de communication (NTIC). Pour preuve, la majorité écrasante des plus de 6 000 cybercafés répartis sur l'ensemble du territoire national exercent clandestinement. Certes, plusieurs cybercafés ont été déjà fermés et mis sous scellés depuis l'application d'un décret datant de 2005 subordonnant l'exercice d'une telle activité en Algérie à l'obtention d'un agrément. Des centaines de gérants de cybercafés ont reçu également la décision définitive de fermeture, mais sa mise en œuvre tarde à voir le jour jusqu'à aujourd'hui encore. Et malgré la dernière note émanant de la Direction générale de la Sûreté nationale demandant la fermeture de ces commerces pour cause d'absence d'autorisation, de plus en plus de cybercafés continuent à exercer clandestinement, laissant le champ libre à toutes les manipulations malveillantes de la Toile. En conséquence de ce laxisme, des enquêtes de l'université d'Alger ont prouvé que 40% des enfants algérois consultent, de façon plus ou moins régulière, des sites à caractère pornographique. 62% des parents encouragent leurs enfants à aller dans ces salles Internet alors que 80% ne sont pas au courant de la nature des surfs de leurs chérubins. A ce titre, les spécialistes montent au créneau et mettent en garde contre les périls que représente l'absence totale de contrôle des activités du Web au moment où il devient le vecteur préféré de la propagande djihadiste du GSPC. C'est dire enfin qu'il est vraiment urgent d'opérer un virage à 180° dans la gestion des NTIC dans notre pays. Faute de quoi, le marketing agressif et malveillant exercé par certains cercles hostiles sur la Toile risque de l'emporter haut la main sur la protection de la sécurité et des intérêts vitaux de l'Algérie. A. S.