Photo : Sahel De notre envoyé spécial à Oran Youcef Salami Une ambiance des grandes rencontres de l'OPEP régnait hier à l'hôtel Sheraton d'Oran. Alors que les ministres arrivaient au fur et à mesure au prestigieux Sheraton, les journalistes s'impatientaient parce qu'ils se sont montrés avares en informations. L'information est distillée au compte-gouttes, tout le monde attendant la réunion des experts (le comité de suivi). Cette dernière devait se tenir hier vers seize heures. Elle devait travailler à l'élaboration d'un rapport sur l'évolution des marchés pétroliers et sur les grandes tendances des prix à soumettre aux ministres. Et c'est à la lecture de ce document que l'Organisation pétrolière prendra aujourd'hui une décision de réduction de ses quotas de production, une mesure très attendue par les marchés. Mais dans quelle proportion ? Si on s'en tient aux rares déclarations faites dans les coulisses du Sheraton, il y a consensus autour d'une baisse de production variant entre 1,5 et 2 millions de barils par jour. Le ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, président en exercice de l'OPEP, a fait allusion, à mots couverts, à ces chiffres. C'était au cours d'une conférence de presse qu'il a animée lundi 15 décembre au Sheraton d'Oran. Il a, par ailleurs, confirmé que tous les ministres de l'OPEP sont d'accord pour une réduction de la production de pétrole. «Tout le monde est favorable à une réduction, je n'ai aucun doute là-dessus», a-t-il dit. Chakib Khelil a également soutenu que l'organisation qu'il dirige était «très pessimiste sur la demande». Celle-ci «va chuter» l'année prochaine, a-t-il déclaré, précisant que l'organisation s'attendait, dans le pire des cas, à une baisse de 500 000 barils par jour (bj) en moyenne en 2009, et dans l'hypothèse la plus optimiste à une progression timide de 200 000 bj. Il a également fait état d'un surplus de 400 millions de barils sur le marché. Il s'est dit aussi favorable à un prix de 75 dollars le baril, un seuil qui serait «bon pour tout le monde», consommateurs comme producteurs. Le président de l'OPEP s'est par ailleurs réjoui du bon respect des décisions prises à l'automne : depuis septembre, l'organisation a annoncé deux réductions de sa production, retirant au total deux millions de barils par jour du marché. Selon lui, les onze pays soumis aux quotas respectent à «plus de 75% leur quota», l'Arabie saoudite ayant notamment atteint son objectif. Certains estiment que les Saoudiens ont réduit de 8% leur production. Le ministre vénézuélien du Pétrole, Rafael Ramirez, était le premier arrivé à Oran. Il s'est exprimé aussi sur le sujet de réduction, soulignant que son pays veut une baisse entre 1,5 et 2 millions de barils par jour. C'est le même volume que souhaitent les Iraniens. Le secrétaire général de l'OPEP, Abdallah El Badri, a affirmé, lui, à son arrivée à Oran, que la situation était «très difficile» et qu'il fallait agir. Il était très sollicité par les journalistes qui lui demandaient des informations sur la baisse en question. Il a eu cette réponse : ce sera une réduction «d'envergure». Les prix du pétrole ont perdu plus de 70% de leur valeur depuis leur record de l'été dernier à près de 150 dollars, passant même brièvement sous la barre des 40 dollars début décembre. Ils ne permettent plus aux producteurs de couvrir leurs coûts de production et d'équilibrer leurs finances. Et les Russes dans tout cela ? La délégation russe à Oran est conduite par le vice-premier ministre. Elle est composée, entre autres, du ministre de l'Energie et de quatre P-DG de sociétés pétrolière et gazière russes. La délégation russe devait animer hier une conférence de presse. Elle s'est rétractée à la fin. Les Russes, ici au Sheraton, tout le monde en parle, journalistes et experts confondus. Les spéculations allaient d'ailleurs bon train hier au sujet de la venue à Alger de Poutine puis de… Medvedev. Il n'en est rien finalement. La Russie donnerait une «importance particulière» à l'OPEP si elle «la rejoignait», cela «augmenterait la puissance» de l'Organisation pétrolière en termes de contrôle de la production qui serait d'environ 50% au lieu de 40 de la production globale. C'est le propos de Chakib Khelil depuis le Sheraton d'Oran. Dans une déclaration récente, Medvedev avait souligné que son pays n'excluait pas de rejoindre les rangs de l'OPEP.