Rien n'arrête la dégringolade des prix du pétrole. Pas même l'OPEP ? Le léger américain est tombé hier à 34 dollars. Du jamais-vu depuis 2004. C'est une glissade dangereuse. Et elle n'est pas sans rappeler la chute des prix constatée à la fin des années quatre-vingt-dix. Finalement, la décision de réduction historique prise par l'OPEP mercredi dernier à Oran n'a pas fait réagir les marchés dans le sens voulu. Objectif non atteint ? Pourtant, tout le monde s'attendait à ce que les cours se reprennent à la suite de cette baisse sévère. Il n'en est rien pour l'instant. Que se passe-t-il ? Les marchés ne prennent-ils plus au sérieux les réductions opérées par l'organisation pétrolière ? Cette question, nombre d'observateurs se la posent. Une multitude de facteurs sont en fait à l'origine de la déprime des marchés. Aux dires de beaucoup, les investisseurs anticipent une détérioration de la demande mondiale d'or noir, alors que l'économie mondiale ralentit dangereusement, et ils doutent de la discipline de l'OPEP en matière de respect des quotas de production. La discipline de l'OPEP, voilà le point focal, l'élément clé dont les analyses parlent à foison depuis des mois, parce que certains pays OPEP surproduisent et d'autres ne respectent pas leurs engagements. Beaucoup de choses ont été dites au sujet de la baisse décidée le 24 octobre dernier. A-t-elle été appliquée par tout le monde ? Certains estiment qu'elle l'a été à hauteur de quarante-cinq pour cent. Ça n'est pas un bon score au vu de la situation des marchés. L'égoïsme de quelques pays OPEP qui ne regardent pas plus loin que leur nez l'emporte ainsi sur les intérêts de l'organisation. Le paradoxe est que, sur le plan théorique, chaque pays membre se montre fidèle à la ligne de conduite de l'organisation. La preuve, la baisse record décidée à Oran, tous les membres étaient d'accord avant même que ne commence la conférence extraordinaire. Celle-ci n'a pas pris plus de temps que prévu. C'est dire que le consensus était dans l'air, la décision tranchée sans fracas, car l'OPEP n'avait pas d'autre choix que d'abaisser ses volumes de production. L'Arabie saoudite, généralement frileuse quand il s'agit d'opérer des coupes sévères, a fait preuve d'enthousiasme et a appelé à la réduction et de manière substantielle. Son ministre du Pétrole, Ali Nouaimi, au milieu d'une bousculade de journalistes à la limite de l'anarchie, au Sheraton d'Oran, avait donné le ton. Il avait annoncé que son pays est d'accord pour une baisse de deux millions de barils par jour. Dans le droit fil de ses engagements, le royaume a fait savoir hier, par la voix de son ministre du Pétrole, que le premier producteur de brut de l'OPEP allait extraire «moins de pétrole» en janvier et «respecter» ses engagements. Que les autres membres en fassent de même ! L'Algérie, respectueuse des mesures de l'organisation, est concernée par une baisse de 200 000 barils par jour. Et elle va l'appliquer, a déclaré Chakib Khelil, au cours de la conférence de presse qu'il a tenue au terme de la rencontre d'Oran. Il l'a aussi répété hier à Londres à l'occasion d'une rencontre entre producteurs et consommateurs de pétrole. «Nous poursuivrons cette réduction jusqu'à ce que les prix se stabilisent», a-t-il avancé. Manière de donner l'exemple, pour un pays qui a abrité une conférence extraordinaire qualifiée d'historique. Au-delà du respect des décisions qu'elle prend, l'OPEP est appelée, et plus que jamais, à réduire davantage, si c'est nécessaire. L'organisation se réunira le 15 mars prochain, à Vienne, sous présidence angolaise. Et il n'est pas exclu qu'elle abaisse encore sa production qui s'établira à partir de janvier 2009 à 24,8 millions de barils par jour. Y. S.