De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar Le secteur de la culture amorce une dynamique nouvelle. Il y a un plus évident en matière d'animation et de manifestations à caractère national ou régional. L'édition, la musique, le cinéma, le théâtre et le patrimoine suscitent régulièrement l'intérêt des pouvoirs publics et l'attention d'un mouvement associatif plus entreprenant que jamais. Des festivals, des colloques, des rencontres et des semaines culturelles sont au menu, un peu partout, à travers le pays. Les échanges entre les différentes régions sont incontestablement plus intenses. Béjaïa a, par exemple, exposé ses particularités en la matière dans cinq wilayas : Batna, Khenchela, Relizane, Sétif et Illizi. Des chanteurs, des plasticiens, des dramaturges et des cinéastes sont associés à ces tournées qui offrent aussi des espaces aux traditions culinaires et à certaines branches de l'artisanat. La capitale de la Soummam a reçu, à son tour, autant de délégations culturelles. Elle a, par ailleurs, abrité nombre de rendez-vous culturels de première importance : le Festival national de la chanson kabyle, les Journées cinématographiques, les Rencontres du film documentaire, un mini-festival national du théâtre pour enfants et nombre d'actions conjoncturelles ou commémoratives. Les collectifs culturels autonomes et la direction de tutelle rivalisent, à ce propos, de créativité et d'innovation. Cependant, des pans entiers de la culture locale sont en sursis ou menacés de disparition pure et simple. En effet, tout reste encore à faire en matière de préservation et mise en valeur du patrimoine culturel immatériel. De l'aveu de tous, y compris l'administration, les cultures populaires -essentiellement orales- sont en péril. Les chants traditionnels, les contes et les légendes, les adages et les poèmes, les usages coutumiers et les rites, les connaissances empiriques de nos aïeux dans de nombreux domaines de la vie, les savoirs séculaires, les jeux d'autrefois, la couture ancienne, entre autres activités artisanales, sont autant de facettes colorées de notre identité culturelle qui risquent de disparaître à jamais. La bijouterie, l'armurerie, la sculpture sur bois et la menuiserie traditionnelle sont autant de spécialités qui ont fait autrefois la renommée de la capitale des Hammadides. C'est toute une mémoire qu'il convient de recueillir en urgence pour la soustraire à l'oubli. Fief historique de l'artisanat, Béjaïa a joué dans l'histoire un rôle de premier plan dans la transmission du savoir-faire «andalou» en la matière aux autres régions du pays. Là-dessus, on doit souligner le manque flagrant en personnel qualifié pour ce genre de missions qui exige des compétences académiques et une expérience de terrain. Pour l'essentiel, les employés de la direction de la culture sont des administrateurs ou des animateurs dont le profil ne répond pas à ce genre d'investigations. Pour faire un inventaire sérieux, on ne peut se passer des services des gens du métier. Des musicologues, des anthropologues, des ethnologues ont un rôle de premier ordre à jouer à ce sujet. Récemment, au cours d'une rencontre avec la presse, le premier responsable local du secteur a avoué cette carence en évoquant l'impératif de la formation et du recyclage des ressources humaines. «Les stage de perfectionnement, la formation continue et les séminaires professionnels permettent aux effectifs en exercice d'acquérir le savoir nécessaire pour prendre en compte les évolutions induites par les exigence nouvelles de la gestion moderne et scientifique du travail», a-t-il estimé en promettant de saisir le ministère à ce propos. La direction de la culture avait aussi élaboré un projet d'acquisition d'une assiette de terrain pour la construction d'une annexe du Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques (CNRPAH). Deux vœux pieux conditionnant la sauvegarde et la valorisation d'une culture populaire qui s'amenuise de jour en jour.