«Avoir en grippe une personne», «moteur grippé», «relations entre Etats grippées». Que d'exemples aussi éloquents les uns que les autres pour imager une tension, un non-état normal ! Mais, parfois, cela peut dépasser le simple stade d'état d'âme et la grippe peut faire le lit de la Faucheuse parce que ravageuse jusqu'à susciter, avec juste raison d'ailleurs, des qualificatifs apocalyptiques, installer et perpétuer une pesante inquiétude sur l'humanité. Elle est, alors, aviaire ou espagnole, ainsi surnommée pour des raisons militaro-politiques et réhabilitée sous le nom de grippe de 1918, ce qui, malheureusement, ne ressuscitera pas, pour autant, près d'une trentaine de millions de morts, voire une centaine, selon une réévaluation récente de la pandémie sur un milliard de victimes d'un virus venu de Chine et «parti du canard au porc» et, enfin, «à l'homme», disent les manuels d'histoire. «Une autre forme d'holocauste», insistent certains historiens. Cette «fameuse» grippe battra tous les records de décimation de vies humaines, plus que la peste noire (30 millions) et, en tout état de cause, nettement plus que celles occasionnées par la Première Guerre mondiale. Elle prendra sa dîme en emportant d'illustres personnages à l'époque, notamment un président, un dramaturge, un poète, un peintre et un joueur de hockey. En Algérie, le Groupement régional d'observation de la grippe ou GROG, presque une appellation d'origine contrôlée, a recensé, en l'espace de six mois (septembre 2007-mars 2008), près de deux millions de personnes atteintes. La particularité est que le paroxysme de cette grippe a été perçu sur six jours (9/15 février), ce qui, quelque part, explique la courte durée sur laquelle la mort peut emporter des victimes. Trente-neuf ans après la grippe espagnole (1918), une autre tout aussi mortelle a eu lieu, en 1968, d'où une prévision statistique mais quand même funèbre selon laquelle une pandémie du genre pourrait être possible, en 2010, et, dans le meilleur des cas, en 2015. En tout état de cause, la question n'a jamais été autant d'actualité qu'au cours de ces dernières années dans la mesure où études et recherches ininterrompues ont pu permettre de décoder les raisons de la pandémie de 1918. A. L.