Les joueurs qui peuvent assurer ce rôle sont de plus en plus rares et même les équipes les plus nanties n'arrivent pas à trouver ce qu'elles veulent dans ce sens. Mohamed Timoumi est l'un des plus brillants joueurs de sa génération au poste de meneur de jeu des FAR et de la sélection du Maroc. Il nous parle, dans l'entretien qu'il nous a accordé, des chances de l'Algérie lors du prochain Mondial, n'hésitant pas à donner quelques conseils, pour le moins pertinents. Est-ce que ce sera votre première expérience, en tant que consultant, que celle que vous allez entamer avec Al Jazeera ? Non, car j'ai eu par le passé à faire ce travail. Cela a été le cas lors du Mondial 98 pour une chaîne d'Abu Dhabi, et à diverses occasions pour des chaînes marocaines. Je vais débuter avec Al Jazeera pour les matchs que joueront Valence et Manchester United et il se pourrait que j'en fasse de même lors du prochain Mondial. Justement en parlant du Mondial, que pensez-vous de la présence de l'Algérie à ce rendrez-vous ? Tout d'abord, permettez-moi de souhaiter de tout cœur bonne chance à votre Equipe nationale. J'espère qu'elle sera aussi talentueuse que celles des années 70 et 80 que j'ai connues, même si je pense que cela lui sera assez difficile. Expliquez-vous… C'est une vérité. Cette génération, même si elle a réussi à qualifier l'Algérie à la Coupe du monde, ne possède pas le volume de jeu de celle des Fergani, Belloumi, Assad et autres. Khalef n'avait, à l'époque, aucun problème pour trouver des doublures. C'était le cas du Maroc de 86 qui était essentiellement composé de joueurs locaux. Etes-vous pour le fait de s'appuyer sur un grand nombre de joueurs professionnels en vue d'un Mondial ? Ceci n'est pas propre à l'Algérie, car tous les pays africains qualifiés pour le Mondial ont une ossature, si ce n'est l'ensemble des joueurs qui évoluent hors du pays. Le fait de disposer de joueurs bien préparés et qui ont une certaine culture tactique est un atout pour un sélectionneur national. Il ne faut cependant pas qu'il y ait l'effet inverse de celui escompté. Certains joueurs, qui ne sont pas titulaires au sein de leur club où qui évoluent dans des divisions dites inférieures, n'apportent pas grand-chose. C'est ce qui s'est passé pour la sélection du Maroc et le résultat final est sans appel. Cela n'est peut-être pas le cas de l'Algérie. Qu'en pensez-vous ? C'est certain, car vous disposez de joueurs de la trempe de Belhadj, Ziani, Bougherra, Antar et autres. Il y a aussi la patte du sélectionneur Saâdane qui a su faire de ces joueurs un ensemble cohérent. Il a aussi fait les meilleurs choix sur le plan tactique en tenant compte des spécifités de chaque match. C'est pour cela que l'Algérie se trouve en Coupe du monde avec, à la clé, un excellent parcours lors de la dernière CAN. Vous qualifiez donc le parcours de l'Algérie lors de la dernière CAN de positif, c'est cela ? Absolument, votre sélection a atteint le dernier carré, ce qui est appréciable. L'élimination contre l'Egypte a ses explications. Les joueurs algériens ne savent pas grand-chose de l'Afrique et de son football. Cela n'est pas le cas des Egyptiens qui ont su gérer tous les paramètres et s'ils ont réussi, c'est que la sélection est formée presque essentiellement de joueurs locaux provenant du Ahly, du Zamalek et autres et qui connaissent parfaitement le football africain. C'est ce qui, au final, a fait la différence. Autre chose aussi, il a manqué à l'équipe d'Algérie un véritable meneur de jeu et c'est, je pense, que c'est là une des insuffisances de l'équipe. Vous en savez quelque chose car vous avez été pendant longtemps le meneur de jeu de la sélection du Maroc… Les joueurs qui peuvent assurer ce rôle sont de plus en plus rares et même les équipes les plus nanties n'arrivent pas à trouver ce qu'elles veulent dans ce sens. Depuis le départ de Belloumi, l'Algérie n'a pas trouvé un joueur capable d'évoluer dans ce registre. Pensez-vous que Hadj Aïssa pourrait tenir ce rôle en sélection ? J'ai eu l'occasion de voir ce joueur à l'œuvre. Il est très bon techniquement et possède les qualités techniques pour assurer le rôle de meneur de jeu. Il lui manque, à mon avis, quelque chose d'important. Il faut qu'il ait une très forte personnalité et qu'il montre sur le terrain que c'est lui le patron. Parlons maintenant du groupe dans lequel se trouve l'Algérie. Est-il abordable ? Ecoutez, il est révolu le temps où les nations africaines faisaient de la figuration en Coupe du monde. L'Algérie doit aborder ce Mondial avec un esprit conquérant et jouer ses chances à fond. Elle a parfaitement les moyens de contrer n'importe quelle formation, pour peu que les joueurs y croient. Cette Coupe du monde se déroule chez nous en Afrique et cela doit être une motivation supplémentaire pour tous les représentants du continent. Les hommes de Saâdane ont-ils les moyens de mettre en difficulté ceux de Capello ? Sur un match, tout est possible. Il y a trois rencontres à disputer pour le compte du premier tour et il faut le faire avec beaucoup d'intelligence. Il ne faut pas perdre de vue que le plus important est de passer. Pour ce qui est de l'Angleterre, en 1986, nous avions tenu en échec cette sélection en pratiquant notre football technique. C'est d'ailleurs comme ça que doivent jouer les Algériens le jour venu. Et pour ce qui est de la Slovénie et des USA ? Je ne dirais pas que ces deux équipes sont à la portée des Algériens, mais c'est jouable. Honnêtement, je pense que l'Algérie a les moyens de passer au second tour et ce ne sera pas vraiment une surprise. Oui, mais vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a beaucoup de blessés et des joueurs qui manquent de compétition… C'est certain, cela constitue un handicap. Je pense cependant que Saâdane a les compétences requises pour que tout ce beau monde soit au top le jour J. Le Maroc a vécu une situation similaire lors du Mondial 86, n'est-ce pas ? Absolument, mais les autorités de l'époque ont bien fait les choses, car nous nous sommes rendus au Mexique près d'un mois avant que ne débute la compétition. Cela nous a permis d'effectuer une excellente préparation et aussi de nous acclimater. Je pense que les Algériens gagneraient à en faire de même. Avant de conclure, dites-nous ce que vous pensez de la double confrontation Algérie-Maroc pour le compte des éliminatoires de la prochaine CAN ? L'Algérie, et cela est évident, part avec les faveurs des pronostics. Pour ce qui est du Maroc, le nom du futur sélectionneur sera connu très bientôt et il aura tout le temps de préparer une équipe qui représentera dignement le Maroc. Je remercie Le Buteur pour m'avoir permis de parler de votre football à qui je souhaite beaucoup de réussite.