«Kaci-Saïd a raison de douter de nous, puisqu'il était bien installé dans son fauteuil. C'est nous qui étions sur le terrain, pas lui !» Comment s'est effectué votre retour à Glasgow ? Ça va, le temps est nettement plus clément ici par rapport à Bangui. Il fait une température de 10 degrés Celsius, juste ce qu'il faut pour jouer au football… Cinq jours après Bangui, comment expliquez-vous cette défaite inattendue contre les modestes Centrafricains ? Nous nous sommes bien préparés pendant près d'une semaine, tant sur le plan tactique que physique, et ça s'est très bien passé avec Benchikha qui nous a motivés comme jamais. Je peux vous assurer qu'on ne s'était pas entraînés de cette manière depuis un bon moment. Benchikha nous a communiqué toute son envie et sa détermination et tout le monde se sentait prêt pour le match. Mais malheureusement, le jour J, on est passés à côté de notre match. Je ne cherche pas à trouver des excuses à notre défaite, mais je vous assure qu'on s'est sentis très mal sur le terrain. Je crois que cela est dû à la chaleur étouffante et à l'humidité qui régnaient ce jour-là. C'était aussi handicapant que ça ? Je vous assure que tous les joueurs ont ressenti cela. C'était vraiment pénible. Je ne pouvais pas courir 5 mètres sans sentir cet étouffement. Franchement, c'était trop pesant. C'était des conditions inhabituelles. Je ne peux pas vous expliquer cela avec des mots. C'est quelque chose qu'on ressent, une fois mis dans ces conditions sur le terrain. C'est propre à l'Afrique. Ce sont des petits détails qu'on doit gérer et c'est toujours nouveau par rapport à ce qu'on a connu dans d'autres villes africaines. Ce n'est pas simple à expliquer. Il faut le vivre sur le terrain pour nous comprendre. Vous mettez donc cette défaite sur le compte de l'humidité et de la chaleur, comme celle subie à la CAN face au Malawi, c'est ça ? Non, non, ce n'est pas uniquement à cause de cela que nous avons perdu ce match. Il y a également d'autres facteurs qu'il ne faut pas négliger, comme les absences de joueurs très importants dans l'équipe, notamment Karim Ziani qui est notre meilleur passeur, mais aussi Halliche, Boudebouz, Kadir et Matmour. Peut-on dire que ceux qui les ont remplacés ont donc échoué dans leur mission ? Non, ce n'est pas ce que je veux dire. J'estime que les nouveaux n'ont pas suffisamment d'expérience pour déjouer tous les facteurs propres aux terrains africains. Prenons l'exemple de Medjani. Carl a tout donné sur le terrain et on a vu comment il s'est battu du début jusqu'à la fin du match, malgré son inexpérience de l'Afrique. Mais s'il y avait Halliche à sa place, on aurait pu faire un marquage individuel plus strict, vu qu'on a plus de vécu ensemble. Mais on ne peut pas blâmer Carl Medjani, après tout ce qu'il a donné sur le terrain. Ne pensez-vous pas que le match aurait été différent si l'équipe était au complet ? Sans diminuer de la valeur des autres, je dirai que j'en suis persuadé. Car avec ceux qui ont l'habitude des terrains africains, on aurait opté pour une stratégie différente. Il y aurait eu plus de métier dans l'équipe pour ce genre de matchs. C'est cela qui nous a fait défaut à Bangui. Vous auriez joué comme à Chililabombwe, face à la Zambie ? Oui, certainement. On aurait joué un peu plus repliés défensivement en procédant par des contres. C'est une stratégie qui nous a valu de gagner notre premier match à l'extérieur, après six années entières de disette. Je pense que c'est ce qu'il aurait fallu faire à Bangui. Vous parlez d'expérience des anciens, alors que Nadir Belhadj est passé complètement à côté de son match, physiquement s'entend. Surtout qu'il joue au Qatar où la température est loin d'être clémente, non ? Nadir Belhadj est la parfaite illustration de notre mal être ce jour-là. Tout le monde connaît son jeu. Tout le monde sait qu'il fait partie de ceux qui courent le plus dans un match. Il avale des kilomètres à chaque rencontre. Donc, si Nadir n'est pas parvenu à gérer cette chaleur, c'est qu'il y avait un réel problème dans tout le groupe. On a été tous affectés par ce climat et les conditions de jeu. Même Belhadj n'a pas réussi à surmonter cela ! C'est dire qu'il y avait une grande différence d'appréciation entre celui qui était sur le terrain et ceux qui regardaient le match assis confortablement dans leur fauteuil. Vous nous offrez l'occasion de vous demander ce que vous pensez des déclarations de Kamel Kaci-Saïd. Alors ? Je respecte l'avis de Kaci-Saïd. Il est libre d'émettre les critiques qu'il veut, tout comme ceux qui partagent son avis, puisqu'ils ont vu onze joueurs marcher sur le terrain, comme ils disent. Cependant, ces gens doivent savoir qu'il y a un grand écart entre ce qu'ils ont vu et ce que nous éprouvions nous les joueurs, sur le terrain. C'est nous qui étions confrontés à la chaleur et à l'humidité, pas eux. Je vous assure que tout le monde s'est donné à fond et on voulait tous gagner ce match. Mais ça devenait de plus en plus pénible de le faire, parce que les conditions n'étaient pas normales, je tiens à le répéter une énième fois. C'est ce qui nous a empêchés de faire le match espéré. Et pourtant, on tenait tellement à gagner pour montrer au nouveau coach qu'il pouvait compter sur nous. Vous confirmez donc par-là qu'il n'y avait eu aucun complot contre Benchikha, comme avancé par Kaci-Saïd ? Notre relation avec Benchikha est excellente. C'est quelqu'un de très correct, franc et sincère. C'est un très grand bosseur qui nous a beaucoup séduits par sa manière de parler et ses discours très forts dans le vestiaire. Le travail qu'on a réalisé avec lui pendant le stage nous a agréablement surpris. Cela faisait très longtemps qu'on n'avait pas bossé de la sorte en Equipe nationale. Dire qu'on a levé le pied pour comploter contre Benchikha est un pur mensonge. Ceux qui le pensent se trompent complètement sur nous. Vous ne pensez pas qu'il serait mieux pour vous d'organiser vos stages dans des pays africains, afin de vous familiariser avec le climat chaud et humide qui vous handicape tant ? Ce serait l'idéal, en effet, mais ce n'est pas réalisable vu nos engagements avec nos clubs. On ne peut pas demander de quitter nos clubs pendant une dizaine de jours pour aller jouer avec l'EN. Car il faut passer au moins dix jours sur place pour s'habituer au climat local. Mais les joueurs locaux pourraient le faire, puisque les clubs dépendent de la FAF. Il y a une nouvelle polémique créée par les images de la télévision algérienne qui a montré l'existence de clans entre les locaux et les joueurs évoluant en Europe. Qu'avez-vous à dire à ce sujet ? Franchement, je n'ai même pas envie de répondre à cette question (il le dit de manière un peu méchante). Vous savez, c'est un problème qui est soulevé depuis plus de six ans. J'en ai tellement entendu parler que cela a fini par m'exaspérer avec le temps. Sincèrement, depuis que je suis en Equipe nationale, je n'ai jamais vu de dissension au sein du groupe entre les locaux et les autres joueurs qui évoluent en Europe. Vous n'avez qu'à demander à Hadj Aïssa ou à un autre joueur local pour confirmer ce que je dis. Il y a juste des affinités entre certains joueurs et d'autres, comme cela se passe dans tous les clubs du monde. Moi aussi aux Rangers, j'ai plus d'affinités avec certains que d'autres, c'est tout à fait normal. Nous formons une vraie famille au sein de l'EN. Il n'y a donc pas lieu de polémiquer, c'est tout. Que pensez-vous du match face au Maroc ? Avec un match nul et une défaite, on n'a plus trop le choix maintenant. Nous avons brûlé tous nos jokers dans ces éliminatoires. Il ne nous reste plus qu'à aller chercher des victoires dans chacun de nos matchs. Ce sera le cas contre le Maroc, si on ne veut pas rater la qualification. Ce sera un derby local et nous aimons cela dans notre équipe. C'est peut-être cela qui va nous donner ce plus que tout le monde attend de nous. Ce sera, en tout cas, deux matchs très plaisants, puisque le Maroc joue à l'européenne avec tous les joueurs qui composent son équipe. Pour notre part, nous aurons récupéré tous nos absents et nous ferons valoir nos qualités, toutes nos qualités. Vous semblez très optimiste, malgré tout… Bien sûr qu'on doit rester optimiste, sinon, à quoi bon poursuivre les éliminatoires ? Je veux y croire jusqu'au bout, puisqu'il reste encore 12 points en jeu. Les deux matchs face au Maroc, on les jouera à fond afin d'offrir des victoires pour nos supporteurs, mais aussi pour Benchikha. Vous savez, après la défaite de Bangui, on est allés le voir pour lui dire notre désolation. On voulait tellement lui offrir une victoire pour son premier match ! On lui a promis de tout faire contre le Maroc, après on s'occupera de la Tanzanie et de la Centrafrique. Ne craignez-vous pas la répétition du scénario de Bangui en Tanzanie ? Non, ce qui s'est passé à Bangui va nous renforcer, sans le moindre doute. On sera doublement plus prudents à chacun de nos matchs. Nous donnerons la preuve de cet accident de parcours au match retour. Un mot pour vos supporteurs qui s'inquiètent, après ces deux matchs ? Je ne vais pas leur demander pardon, parce que nous n'avons pas fait exprès de perdre à Bangui. Mais je comprends leur profonde déception. Je comprends aussi qu'on nous critique, parce que nous avons perdu et cela leur a fait tellement mal, à eux et aux journalistes. Je ne vais pas leur dire pourquoi ils sont en colère contre nous, parce que j'aurais fait la même chose si je n'étais pas en Equipe nationale. Mais qu'ils sachent que nous n'avons pas fait exprès de perdre ce match, car il s'agit de notre crédibilité et celle de toute l'Algérie. Je leur demande surtout de nous soutenir lors des prochaines rencontres, parce qu'on a besoin de tous les Algériens dans ces éliminatoires. Nous promettons de tout donner sur le terrain et, surtout, de concrétiser cela pendant les matchs et ne plus nous contenter de faire des promesses.