«Si je ne suis pas retenu pour le match du Malawi, je viendrai à coup sûr» Adel Chedli, le très expérimenté milieu de terrain de la Tunisie et qui est passé par Saint- Etienne et Istres, a le contact facile. Parfait exemple de cette sympathie algéro-tunisienne qui a jeté un air de fraternité entre les deux camps qui se croisent et se recroisent à longueur de journées dans les couloirs de l'hôtel Coral-Khartoum qu'ils partagent du reste. Cela dépassionne les débats et apaise le ton, à quelque vingt-quatre heures du très attendu Algérie-Tunisie qui décidera qui d'entre les deux «voisins» animera la finale. Samedi matin, l'ex-coéquipier de Saïfi à Istres s'est longuement entretenu avec le président de la FAF, Mohamed Raouraoua, qui était venu saluer les joueurs et leur présenter ses félicitations pour la qualification. La discussion entre les deux hommes a tourné exclusivement autour de ce CHAN qu'organise le Soudan, et bien évidemment du parcours de des équipes durant le tournoi, mais pas que. Le très attendu Algérie-Maroc ne pouvait ne pas être évoqué, vu le caractère derby décisif du rendez-vous que chacun a commenté tel qu'il l'imagine. Raouraoua en a profité d'ailleurs pour inviter Adel Chedli à assister au match. «Un honneur», dit le Tunisien que nous avons interrogé quelques heures plus tard. «Si je ne suis pas convoqué chez les A, je viendrai avec plaisir. Je n'ai jamais visité l'Algérie, c'est une bonne occasion. Pour peu que mon emploi du temps me le permette, je viendrai à coup sûr», nous a-t-il déclaré. (Lire entretien). Par ailleurs, Chedli a eu aussi une conversation avec le sélectionneur Abdelhak Benchikha à qui il a, comme nous l'écrivions sur ces mêmes colonnes, recommandé vivement Ryad Nouri, le milieu franco-algérien de Istres dont il ne tarit pas d'éloges. «Vous aurez besoin de renfort face au Maroc. Nouri peut apporter quelque chose. C'est un super joueur. Vous ne le regretterez pas. C'est ce que j'ai dit à Benchikha», nous confiait le milieu de terrain tunisien en aparté. Un vrai exemple de sympathie et de bonhomie, Chedli, qui a vite fait de jeter un air d'amitié entre les deux équipes qu'un match capital doit, pourtant, départager mardi. «On laisse ça pour le terrain» a-t-il dit. Et c'est vrai. «Si je ne suis pas retenu pour le match du Malawi, je viendrai à coup sûr» Interviewer Adel Chedli est toujours un plaisir. Il est d'un naturel sincère, si bien que le protocole est vite mis de côté. Saupoudrant ainsi cet échange d'un air presque sympathique, du reste sincère. Appréciez ! Vous nous avez déclaré il y a deux semaines à Port Soudan que vous souhaitiez une finale Algérie-Tunisie, voilà ce souhait exaucé mais un tour avant, quel est votre sentiment ? Je suis très content. On aurait pu attendre un tour avant de se croiser (rires). En effet, ç'aurait été une belle finale, mais cela n'occulte en aucun cas le plaisir de se retrouver à un stade aussi avancé de la compétition. Ce sera un beau match de football entre deux équipes qui se respectent, qui s'apprécient et, qui plus est, savent jouer au ballon. Nos deux matchs de quarts de finale ont été pourris par l'agressivité et le manque de respect de nos adversaires. Là, on jouera au football. On se fera chaleureusement l'accolade avant le coup d'envoi du match car sincèrement, on éprouvera le même plaisir de se rencontrer. J'espère seulement qu'il y aura beaucoup de monde. Ça donnera plus de charme à ce match. En parlant de deux matchs pourris, (Algérie-Afrique du Sud et Tunisie-RDC), vous faites sans doute allusion au comportement des deux adversaires avant le match… Oui, on m'en a parlé. Benchikha m'a raconté ce qu'ont fait les Sud-Africains la veille du match à l'entraînement. J'ai su qu'un des joueurs, le p'tit là (Djabou, ndlr) a été bousculé. C'est pas bien ça. Les Congolais étaient aussi irrespectueux. Figurez-vous que seuls quatre joueurs sont venus nous saluer avant le coup d'envoi. Les autres nous ont snobés. Quel fair-play ! Notre réponse, ils l'ont eue sur le terrain. Vous vous attendez à quel scénario mardi ? J'espère qu'on va gagner ! (rires). On vous apprécie beaucoup, mais sur le terrain, c'est… sans concession. Sérieux, ça va être un beau match de foot. Chacun jouera pour se qualifier et c'est ça qui va rendre encore plus belle cette demi-finale. Je sais que l'Algérie a gagné la sympathie des Soudanais. Vous serez gentils de prêter quelques supporters… (rires). On n'en a pas beaucoup ! Ça va être un beau match. Comment étaient les retrouvailles avec les Algériens à l'hôtel ? Très bien. On se salue, même si on ne se connaît pas de noms. J'ai discuté avec Benchikha. J'ai eu le président Raouraoua tout cet après-midi aussi. Il y a un bon contact. Baggio (Hadj Aïssa, ndlr) m'a offert de la pizza hier. On les a félicités pour la qualification. Ils en ont fait de même aussi. On s'aide. Vous avez été invité par Mohamed Raouraoua en personne pour assister au prochain match Algérie-Maroc, c'est un signe de considération pour vous, non ? Je suis très honoré et je tiens à le remercier pour cette attention. Je ne suis jamais allé en Algérie. Depuis tout petit, je rêvais d'aller visiter ce pays, mais l'occasion ne s'est jamais présentée. Peut-être que cette fois c'est la bonne. Qui sait ? Je ne sais pas encore si je serai retenu chez les A pour le match face au Malawi. Si je ne suis pas convoqué, je viendrai à coup sûr. C'est promis ! Vous avez annoncé votre retraite internationale il y a quatre ans ; est-ce à dire que vous êtes prêt à reprendre la sélection ? Oui ! Après tout ce qui s'est passé, je veux rejouer de nouveau pour le peuple. Je veux porter aussi longtemps que possible le maillot de la Tunisie. La preuve, je suis revenu pour le CHAN. Dès que le coach me l'a proposé, j'ai dit OK ! Je suis de nouveau ouvert pour la sélection. Pour peu qu'on me fasse appel. Peut-on dire que vous faites office de rapprochement, ou si vous voulez de lien entre les deux équipes ? Non ! Je suis naturel. Je rigole avec tout le monde. J'ai été éduqué comme ça. Je ne me gêne pas à saluer les autres. C'est dans ma nature. Et puis, c'est un match de foot. Si l'Algérie doit gagner, elle gagnera. Idem pour la Tunisie. L'enjeu ne doit en aucun cas prendre le dessus sur le reste. D'autant que quoi qu'il arrive mardi, on sera contents d'avoir un pays maghrébin pour la finale. Vous avez conseillé à Benchikha Ryad Nouri, pensez-vous vraiment qu'il peut apporter un plus à l'équipe ? Oui, il est très très fort ! Il peut être un renfort à l'équipe oui. Je sais que vous aurez besoin d'atouts face au Maroc, et ce garçon est très costaud. J'ai dit à Benchikha : «Prends-le, tu ne le regrettera pas.» Il est jeune et doué. Il peut vous être utile. Qu'est-ce qui peut départager les deux équipes, sachant qu'elles ont le même profil, elles pratiquent le même football, et s'organisent même autour d'une stratégie de jeu quasi similaires ? La fraîcheur physique d'abord. Ils ont deux jours de récupération de plus que nous. Ça peut être un atout. Après, l'Algérie est une équipe très solide qui, en plus, joue super bien au foot. Vous avez beaucoup d'atouts. Un gardien énorme ! (Zemmamouche, ndlr). Je l'ai félicité ce matin pour son match. Il était parfait. Vous allez certainement prendre la parole dans le vestiaire avant le match, sur quoi allez-vous attirer l'attention de vos coéquipiers ? Sur la concentration. C'est très important. Nous les Maghrébins, on tombe trop vite dans l'euphorie. On est vite distrait, or il faudrait se concentrer dès ce soir. C'est un derby indécis. Un joueur à surveiller ? Baggio ! (Hadj Aïssa, ndlr). J'aime beaucoup ce joueur. Il est d'une aisance technique incroyable. Hier, Benchikha ne l'a pas fait jouer titulaire, mais il reste énorme. Il y a aussi Lemmouchia. Ça se voit dans son jeu qu'il a le style. Il porte le cachet de la formation française. C'est lui qui construit. Un bon joueur. ----------------------------------- La Tunisie fait du CHAN une affaire d'Etat A la fin de la rencontre, il y avait une joie de folie dans le camp tunisien. Joueurs, staff technique et même supporters étaient tous heureux et fous de joie, après ce résultat réalisé, inattendue du reste à cause des événements très difficiles que sont en train de vivre nos frères tunisiens. Le président de la Fédération Tunisienne de Football, Ali Al Hafsi, n'a pas manqué l'occasion de dédier cette qualification aux martyres de la Révolution tunisienne. Tous les joueurs ne parlent que du sacre final pour l'offrir au peuple tunisien. Décidément, le CHAN est devenue une affaire d'Etat pour les Tunisiens. «Le trophée, c'est pour Al Bouazizi» Les joueurs semblent très solidaires avec leur pays et l'ensemble du peuple tunisien. Al Belbouli, le gardien de but, Gasdaoui, l'avant- centre, El Msakni et bien d'autres ne parlent que de la victoire dans ce CHAN, et offrir le trophée à Al Bouazizi, premier marthyr de la dernière Révolution qui a eu lieu en Tunisie. Par ailleurs, des joueurs nous ont déclaré qu'ils comptaient rendre visite au domicile du défunt avec le trophée africain.