Madjer : «C'est grâce à lui que j'ai joué en Europe» Omar Kezzal n'est plus. Il a succombé dans la nuit de samedi à dimanche des suites d'une longue maladie, laissant à ceux qui l'ont connu l'image d'un serviteur dévoué du football algérien et, surtout, celle de l'unique président de la Fédération algérienne de football à avoir donné à la sélection nationale un titre continental. En 1982, il a géré l'euphorie de l'après-Mondial En effet, le regretté Kezzal avait pris en main les destinées de la FAF à trois périodes différentes. A sa première nomination en septembre 1982, il avait dû gérer l'euphorie née du parcours marquant des Verts trois mois plus tôt en Coupe du monde, à un moment où le football algérien avait acquis ses lettres de noblesse sur les scènes africaine et internationale. Cela n'avait pas été facile de gérer un tel «legs», mais il s'en était bien tiré. Il a même achevé son mandat par une participation sans défaite de l'Algérie à la CAN-84 en Côte d'Ivoire, où elle avait remporté la troisième place, après avoir raté la qualification à la finale aux tirs au but face au Cameroun, vainqueur de la compétition. De 1989 à 1992, trois titres internationaux pour le football algérien Le deuxième mandat de Omar Kezzal s'est étalé de juillet 1989 à novembre 1992, période où le football algérien a connu plusieurs moments forts. Outre l'accession du MC Oran en finale de la Coupe d'Afrique des clubs champions (perdue face au Raja Casablanca entraîné par… Rabah Saâdane), il y a eu surtout le sacre continental en Coupe d'Afrique des nations en 1990 à Alger, le seul remporté par les Verts dans toute l'histoire du football algérien. Au début de l'année 1991, il y eut même un autre titre international, la Coupe afro-asiatique remportée au détriment de l'Iran, champion d'Asie. Entre les deux, il y a eu une Coupe d'Afrique des clubs champions remportée par la JS Kabylie. Cela en fait le plus titré de tous les présidents de la FAF. Le seul point noir dans ce second mandat a été la débâcle enregistrée par les Verts à la CAN-92 à Ziguinchor, au Sénégal. Il avait soutenu Kermali après Ziguinchor, mais il avait dû démissionner en pleurs Cet épisode a justement montré Omar Kezzal dans ce qui faisait, entre autres, sa grandeur : le sens des responsabilités. Alors que l'opinion publique et les médias de l'époque réclamaient la tête du sélectionneur de l'époque, Abdelhamid Kermali, il avait refusé de jeter le cheikh en pâture, assumant publiquement la responsabilité de l'échec au même titre que l'entraîneur. Il n'était pas de ceux qui rejetaient la faute sur les autres afin de tirer la couverture à lui. Il avait, bien au contraire, affronté la gronde populaire en se présentant devant les membres de l'assemblée générale et les représentants des médias sitôt la délégation rentrée du Sénégal. Pour quorum non atteint, les travaux de l'AG avaient été ajournés, mais Kezzal avait fini par provoquer une nouvelle assemblée générale quelques mois plus tard où il avait annoncé sa démission en pleurs, touché au plus profond de lui-même par les critiques blessantes dont il ne cessait de faire l'objet. Victimes d'intrigues et d'un vote de défiance, il s'est retiré en 2001 Son troisième passage à la FAF a été court (environ 15 mois seulement), entre 2000 et 2001, car victime d'intrigues de la part de membres du Bureau fédéral et de présidents de club qui voulaient sa tête. Lors d'une assemblée générale ordinaire, il avait accepté de se soumettre à un vote de confiance qui a fini par se retourner contre lui. Il a dû donc démissionner, laissant la voie à Mohamed Raouraoua. C'est donc par la petite porte qu'il a quitté le monde du football, lui qui lui avait consacré tant d'énergie. D'ailleurs, c'est l'un des plus instruits de tous les présidents qui sont passés à la tête de la FAF. Une instruction qui a fait qu'il avait réformé la gestion administrative de la FAF en étant le premier à en informatiser le fonctionnement, en 1989. Le seul président de la FAF à avoir fait confiance à des sélectionneurs algériens Ce qui a également caractérisé le regretté Omar Kezzal, c'est sa confiance en les compétences nationales. En effet, aucun entraîneur étranger n'avait pris les destinées des Verts durant ses passages à la tête de la FAF. Il avait fait confiance à Abdelhamid Zouba en 1982, le soutenant en dépit des critiques, puis à Mahieddine Khalef pour la CAN-84. En 1989, après le nul concédé par l'Algérie face à l'Egypte en match aller des éliminatoires pour le Mondial-90, il avait nommé Abdelhamid Kermali comme sélectionneur, lui adjoignant les Algériens Ali Fergani, Noureddine Saâdi et le regretté Mourad Abdelouahab. Il l'a soutenu même après la débâcle de Ziguinchor. Puis, il a nommé le duo Ighil-Mehdaoui juste avant de céder sa place. En 2000, il a compté sur Abdelghani Djadaoui, puis avait désigné Rabah Madjer sélectionneur, juste avant l'élection de Mohamed Raouraoua. Bref, un vrai partisan du savoir-faire algérien. Courtois, humble et disponible avec les journalistes La corporation des journalistes lui reconnaît une humilité et une modestie sans pareil. Loin de verser dans le favoritisme et le copinage, il répondait aux sollicitations dans la mesure du possible, ne faisant pas de distinction entre jeunes et anciens journalistes. Il était toujours courtois, poli, sympathique et communicatif. Même s'il n'avait rien à déclarer, il recevait les représentants des médias, ne serait-ce que pour discuter à bâtons rompus, car conscient qu'ils faisaient tout simplement leur métier, comme lui faisait le sien. Sa disparition ne laisse aucun connaisseur du football algérien indifférent. Le collectif du Buteur présente ses sincères condoléances à la famille du défunt. A Dieu nous appartenons et à Lui nous retournons. -------------------------- Madjer : «C'est grâce à lui que j'ai joué en Europe» «J'ai été choqué en apprenant le décès de Omar Kezzal. Je n'oublierai pas tout ce qu'il a apporté au football algérien et ce qu'il m'a apporté à moi à titre personnel. Le titre de champion d'Afrique des nations en 1990, c'est grâce à lui. Il nous avait mis dans les meilleures conditions pour qu'il réalise cette performance. Me concernant, cest grâce à lui que j'ai pu entamer une carrière professionnelle en Europe, à une époque où les règlements nous interdisaient de partir à l'étranger. Je lui dois donc ce que je suis devenu par la suite. De même, il avait pesé de tout son poids pour que je prenne en main la sélection nationale en 2001. Je l'ai dit récemment dans une émission à la télévision : je dois beaucoup à Omar Kezzal, Allah yerrahmou. Je n'ai pas perdu un ancien président de fédération ou un ami, j'ai perdu un second père. Il restera, pour l'Histoire, l'un des monuments du football algérien. Que sa famille accepte mes sincères condoléances.» -------------------------- Kermali : «En 1990, il nous avait donné tous les moyens pour remporter la CAN» «Omar Kezzal, que Dieu ait son âme, m'avait désigné sélectionneur national, après une très belle saison réalisée à la tête du MC Alger. Il avait dit aux membres du Bureau fédéral : «Kermali sera le nouveau sélectionneur car le peuple le réclame.» En effet, le public scandait constamment mon nom dans les stades. Nous avons remporté la CAN-90 après que Kezzal nous eut donné tous les moyens pour bien préparer cette compétition. Quelques mois plus tard, nous avions remporté la Coupe afro-asiatique. C'était l'un des rares présidents de club qui croyaient aux compétences de l'entraîneur algérien et lui donnaient tous les moyens. C'était un homme compétent et généreux, sûrement l'un des meilleurs présidents de fédération qu'ait connus le football algérien. Je n'ai pas pu assister à son enterrement à cause de mes problèmes de santé, mais je profiterai de la première occasion pour aller rendre visite à sa famille. En tout cas, je présente à cette dernière mes sincères condoléances en cette triste circonstance.»