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Ghezzal : «Mon rôle sur un terrain ne se résume pas qu'à marquer des buts»
Publié dans Le Buteur le 15 - 03 - 2012

«J'étais déçu de ne pas débuter face à la Gambie, mais je félicite Aoudia pour sa très belle prestation»
«Ziani et Djebbour ont manqué au groupe, mais c'est le choix du coach, il faut le respecter»
C'est lundi dernier, par une matinée très ensoleillée, que l'international algérien, joueur de Levante, Abdelkader Ghezzal, nous a reçus au centre sportif du club, basé dans le village de Buñol (40 kilomètres de Valence). Toujours aussi disponible et courtois, celui qu'on surnomme «Abel» ici à Levante a accepté sans problème de nous accorder ce long interview et revenir avec nous, notamment sur le précieux succès arraché par l'EN il y a 15 jours maintenant, en terre gambienne. Ghezzal assure qu'un nouvel état d'esprit anime le groupe actuellement et que l'objectif primordial sera bien entendu de se qualifier à la CAN-2013 et assurer une bonne entame lors des qualifications pour le Mondial-2014. On en a profité aussi pour faire le tour de l'actualité avec lui. De son intégration à Levante à cette affaire des matchs truqués à Bari dans laquelle il a été cité, en passant par quelques indiscrétions sur sa vie privée. Entretien :
Voilà cinq semaines que vous avez intégré le club de Levante. Comment cela se passe-t-il pour vous ?
Oui, El Hamdoulilah. Je me sens énormément bien ici à Levante. Cela grâce à l'entraîneur et à toute l'équipe qui m'ont aidé à bien m'intégrer ici.
On sent que vous avez retrouvé enfin la joie de jouer au football ici à Levante, en témoignent vos très belles prestations depuis votre arrivée au club, n'est-ce pas ?
Effectivement. Déjà que je rejoue à mon véritable poste et ça, c'est très important pour moi. Cela me permet de montrer le meilleur de mes qualités et de m'épanouir sur le terrain. J'aime énormément la Liga, c'est un championnat qui me correspond parfaitement. Ça joue au ballon et il y a beaucoup d'espace. Tout ce que j'aime.
Vous dites que vous jouez à présent à votre véritable poste. En Algérie, on ne sait toujours pas si Ghezzal est un pur centre avant, un joueur de couloir ou bien de milieu de terrain…
A vrai dire, mon poste est plus deuxième attaquant que centre avant type. Ici, à Levante, c'est Koné qui occupe le rôle de vrai attaquant. Moi, j'évolue plus derrière lui. Le coach me demande de prendre plus le ballon, d'aller vers l'avant et percuter. J'aime participer aux offensives de mon équipe et permettre à mes partenaires de marquer.
Qu'est-ce qui vous plaît le plus ici ?
Tout me plaît. J'ai eu la chance d'arriver dans une superbe ville comme Valence (Ndlr, Levante représente un quartier de Valence), de me retrouver dans une équipe qui joue bien au ballon et qui fait des résultats. L'ambiance est très conviviale et le coach me fait confiance. Tout ça fait que je nage dans un pur bonheur. J'espère que ça continuera ainsi.
Ce transfert à Levante en a surpris plus d'un. Personne ne s'attendait à ce que vous quittiez Cesena…
Croyez-moi, même-moi, je ne m'attendais pas à quitter Cesena ainsi. Le dernier jour du mercato, mon agent m'appelle et me dit : «Voilà, il y a le club de Levante, qui est 4e dans la Liga, qui te veut. Qu'est-ce que t'en penses ?» J'ai répondu : «Pourquoi pas ?». Vous savez, je jouais en Italie depuis huit ans. C'était donc une belle opportunité pour moi de découvrir un autre championnat. Vu que je suis quelqu'un qui aime les défis, j'ai donc accepté de rejoindre Levante et, Dieu merci, je ne le regrette pas du tout.
N'y a-t-il pas une raison particulière qui vous a poussé à quitter Cesena ?
Pas spécialement. J'avais surtout envie de changer d'air. Après, c'est vrai qu'à Cesena, on jouait dans un autre schéma tactique et moi, j'évoluais surtout dans le couloir droit. Il y a eu aussi l'arrivée d'un nouvel entraîneur. Tout cela a fait que j'ai sauté direct sur l'occasion de venir à Levante.
Après trois ans consécutifs à jouer pour le maintien, vous voilà avec Levante en train de prétendre à une participation européenne la saison prochaine. Ça change, non ?
C'est clair que ce n'est pas du tout pareil. Déjà, il y a le moral et le bonheur de pratiquer le football. Quand il y a des résultats, le joueur joue plus libéré et demeure plus performant. Il y a moins de stress.
En dépit de vos belles prestations avec l'équipe, vous n'arrivez cependant pas à trouver le chemin des filets. Comment expliquez-vous cela quand on sait que votre dernier but en club remonte à un an de cela (Ndlr, le 20 mars 2011 avec Bari) ?
Sincèrement, ça ne me dérange pas de ne pas marquer. Lors de notre victoire face au Bétis Séville, si vous l'avez remarqué, j'avais eu l'opportunité de marquer, mais j'ai préféré jouer collectif et servir Koné, au lieu d'aller moi-même tenter ma chance. Ça va venir Inch'Allah. Ma récompense est venue de l'entraîneur qui m'a titularisé une nouvelle fois le week-end d'après. Lui, sait ce que j'apporte dans le jeu de l'équipe. Maintenant, et comme je l'ai toujours dit, que ce soit en sélection ou bien en club, l'important est de gagner. Que je marque et au final on perd, ça ne sert à rien.
Passons à la sélection justement. L'EN est revenue contre toute attente avec une victoire de son déplacement en Gambie. Qu'est-ce qui a fait que l'équipe ait pu enfin arracher une victoire à l'extérieur, trois ans après ?
On restait déjà sur une série de victoires (RCA et Tunisie), ne l'oublions pas. Maintenant, c'est clair que ce match peut nous servir de déclic pour l'avenir. Un nouveau départ pour nous. On a un entraîneur qui croit en nous et une grosse équipe qui a beaucoup de qualités. On a surtout des joueurs de talent qui évoluent dans de très grands clubs et cela fait que notre jeu s'est beaucoup amélioré.
Beaucoup ont dit que cette victoire était surtout l'œuvre de Vahid Halilhodzic. Etes-vous d'accord avec ça ?
Je pense aussi que le coach a ramené beaucoup à l'EN. Il ne faut pas oublier que quand il a pris la sélection, on était au plus mal avec, notamment, cette défaite cinglante subie face au Maroc. Halilhodzic a su comment booster les joueurs et les pousser à donner le meilleur d'eux-mêmes. Après, comme lui-même nous le dit à chaque fois, la décision appartient aussi aux joueurs sur le terrain. Un bon entraîneur, avec des joueurs faibles, ça ne réussit pas. Donc, je dirai que cette victoire ramenée de Gambie est celle de tout le monde.
Tout le monde s'accorde à dire que Vahid y est pour beaucoup dans ce renouveau que connaît l'EN. Cela sous-entend donc que le sélectionneur d'avant, en l'occurrence Abdelhak Benchikha, n'avait rien apporté à l'équipe ?
(Il réfléchit…) Benchikha est arrivé dans un moment difficile. Il a pris en main une équipe qui venait d'un bon parcours, qui avait participé quelques mois auparavant à une Coupe du Monde et qui s'est classée quatrième à la CAN. On sait tous que dans le football, il existe des hauts et des bas. On n'y peut rien.
Ce que l'on reproche le plus à Benchikha, c'est le fait de n'avoir pas su gérer le groupe. Vous en pensez quoi ?
Je ne sais pas. Moi, je me focalise sur mon travail sur le terrain. On sait tous que le métier d'entraîneur n'est pas facile. Benchikha a entraîné à sa manière, et il a eu les résultats que l'on connaît.
On dit qu'il n'y jamais eu d'entente cordiale entre vous et lui. C'est vrai ?
Non, ce n'est pas vrai. Certes, il ne m'a pas sélectionné à quelques reprises, mais c'était son choix et je l'ai respecté. Il n'y a jamais eu de conflit entre lui et moi en tout cas.
Vahid Halilhodzic a souvent déclaré, notamment lors de ses premières conférences de presse, qu'il a été affligé de constater que tous les attaquants de l'EN n'ont que très rarement marqué de buts malgré le nombre important de matches qu'ils ont joués, faisant notamment allusion à vous et à Djebbour. Comment prenez-vous cette remarque et est-ce que le sélectionneur vous en a parlé en aparté ?
Ecoutez, on n'a jamais eu un grand buteur en sélection. Même lorsqu'on était au top, on n'a jamais eu un joueur qui marque 20 buts ou plus. Notre force a toujours été la solidité défensive, tout en procédant par contres. On avait des joueurs rapides devant, à l'image de Matmour ou même Bouazza, et on faisait toujours la différence sur les coups de pied arrêtés. Maintenant, avec Halilhodzic, les choses ont changé. Il a imposé une nouvelle philosophie de jeu à l'équipe. Que ce soit à domicile ou à l'extérieur, on joue toujours avec trois attaquants. Il prend des risques et veut qu'on marque beaucoup de buts. C'est de cette façon que nous, les attaquants, pourrons nous illustrer.
A la surprise générale, le sélectionneur a préféré, lors du match en Gambie, aligner Aoudia en pointe, un jouer local, plutôt que vous. Etiez-vous déçu de n'avoir pas débuté ce match ?
C'est sûr que j'étais un peu déçu. C'est normal, car je suis un compétiteur et je voulais moi aussi contribuer au succès de l'équipe. Comme nous l'a souvent dit Halilhodzic : «Le jour où je verrai qu'un joueur, qui ne joue pas et qui n'est pas déçu, là, je m'inquiéterai.» Cependant, il a fait un choix et je le respecte. J'étais content pour Aoudia qui a fait un grand match. Ce n'était pas facile pour lui de jouer son premier match en tant que titulaire dans de telles conditions. Il a assuré, bien qu'il n'ait pas réussi à marquer.
Le fait que le coach ait aussi mis à l'écart Ziani et Djebbour pour ce match démontre qu'il est intransigeant, même quand il s'agit les anciens de l'équipe…
Comme je vous l'ai déjà déclaré, ce sont des choix de l'entraîneur et on se doit de les accepter. Moi-même à la base, je n'étais pas convoqué pour ce match. Maintenant, que ce soit avec Ziani ou Djebbour, on a, tous ensemble, vécu de bons moments et je dois reconnaître qu'ils ont manqué au groupe, mais la loi du football est ainsi faite.
Pour sa première sélection, Sofiane Feghouli s'est illustré de fort belle manière, inscrivant même le but de la victoire. Qu'avez-vous à dire à ce propos ?
C'était son tout premier match en Afrique noire, mais il a su se mettre à la disposition de l'équipe et apporter le plus qu'on attendait de lui. Il a marqué aussi un but important qui nous a donné la victoire. Ça reste l'un des jeunes talents prometteurs de l'EN. Cela ne me surprendrait pas qu'il fasse une grande carrière au vu de ses grandes qualités.
Vous habitez tous les deux dans la même ville, vous arrive-t-il de vous rencontrer ?
Oui, bien sûr. On est déjà allés manger ensemble et on se parle souvent au téléphone, notamment avant nos matches respectifs, où on s'encourage mutuellement. On habite d'ailleurs l'un en face de l'autre.
Ça fait maintenant près de trois ans que vous n'avez plus marqué en sélection. Cela ne vous fait-il pas perdre confiance en vous ?
Vous savez, moi, je rentre sur le terrain en me disant que je suis super fort. Je ne me pose pas de questions. Ne vous inquiétez pas, je joue avec zéro pression.
Bien que vous ne marquiez plus en sélection, n'empêche que vous demeurez l'un des joueurs les plus appréciés des supporters. Comment expliquez-vous cela, quand on sait que le public algérien est connu pour être très impatient envers les attaquants qui ne marquent pas ?
Déjà, vous me donnez l'opportunité de remercier le peuple algérien pour cet amour qu'il me porte. Pour répondre à votre question, je dirai que les supporters ont toujours vu que je me donne à fond pour l'Algérie et que je ne triche pas sur le terrain. Ça me fait vraiment chaud au cœur.
Cela dit, lors du Mondial, beaucoup vous ont reproché votre fameux geste de la main lors du match face à la Slovénie (1-0 en faveur des Slovènes), qui vous a coûté l'expulsion et contribué à la défaite des Verts. Des proches à vous nous ont dit que vous avez très mal vécu les critiques de certains médias et autres spécialistes après le tournoi, est-ce vrai ?
Mal vécu ? Je n'irai pas jusqu'à dire cela. Je suis resté serein malgré toutes les critiques qui m'ont visé. Les gens qui me connaissent et qui connaissent véritablement le football savent bien que je n'ai pas fait exprès de mettre la main. C'est surtout que j'avais beaucoup d'envie et, du coup, je ne me suis pas contrôlé.
Avez-vous eu des remords par rapport à cela ?
Quand on se fait expulser au bout de 20 minutes après être entré en jeu et laisser ses camarades amoindris, il est clair qu'on a des remords. Avec du recul, je me dis que j'aurais dû gérer autrement mon match. Rentrer tranquillement, sans être trop excité. Maintenant, ce qui est fait est fait, on ne va pas s'éterniser là-dessus.
Revenons à cette affaire des matchs truqués à Bari dans laquelle on vous accuse. Comment toute cette histoire a débuté ?
Comme je l'ai déclaré récemment dans la presse espagnole, je n'ai rien à voir dans cette affaire. Vu que j'étais joueur à Bari, il y en a qui ont fait des suppositions, mais tout ça est faux. Le directeur sportif de Bari, avec lequel j'entretiens de très bons rapports, est lui-même très surpris de voir mon nom associé à cette histoire.
Des médias italiens ont affirmés que le procureur de Bari chargé de l'affaire vous a envoyé une convocation afin d'avoir votre version des faits...
Non, je n'ai reçu aucune convocation, ni de coup de fil de qui que ce soit. Je suis serein et je ne crains rien.
Vous êtes toujours sous contrat avec Bari. On imagine qu'après cette histoire, vous ne serez pas emballé à l'idée de revenir...
Le championnat est encore long. Il reste 12 journées à disputer. Je préfère me concentrer sur mon club actuel et donner le meilleur de moi-même sur le terrain. Après, lorsque la saison s'achèvera, je verrai pour mon futur.
Parlez-nous un peu de votre jeune frère, Rachid, qui joue au football lui aussi et évolue avec la réserve de l'Olympique Lyonnais. Y a-t-il une chance de le voir revêtir le maillot vert ?
Mon frère arrive à un moment de sa carrière où il doit s'imposer à l'OL. Le club lui a fait un contrat pro de cinq ans, ce qui prouve qu'on croit à ses qualités. Comme je lui ai dit à maintes reprises, il doit se focaliser sur son club et redoubler d'efforts pour avoir du temps de jeu. La sélection, ça viendra avec le temps.
Sortons un peu du foot. Vous êtes un fan attitré du réseau social, twitter. On vous voit y mettre beaucoup de photos et de tweets (Ndlr, commentaires). Des centaines d'Algériens vous suivent d'ailleurs…
(Rires…) C'est un peu la mode maintenant. C'est parti il y a un an de cela. En Italie, la plupart des joueurs utilisent twitter. C'est sympa et amusant à la fois.
Vous donnez l'opportunité aux gens qui vous aiment d'avoir un aperçu sur votre quotidien aussi…
C'est effectivement ça. Je permets à mes fans, notamment les Algériens, de voir à quoi ressemble un peu mes journées. Je les récompense en quelque sorte de l'amour qu'ils me portent. Cela dit, je n'en fais pas trop quand même (Il rigole franchement…).
Beaucoup de photos de vous (entre fêtes, sorties entre potes, vacances), circulent sur le net. Est-ce que cela vous dérange que votre vie privée soit étalée ainsi sur internet, particulièrement sur facebook ?
Ça ne me dérange pas. Je pense que c'est des photos normales. Il n'y a rien de vulgaire ou quoi que ce soit.
Sauf surprise, Kader est toujours célibataire, c'est bien ça ?
(Il rigole…), oui effectivement.
Un projet de mariage en vue ?
Evidemment. Tout être humain a besoin de se marier et fonder une famille.
Une Algérienne ?
C'est sûr que je me marierai avec une Algérienne bien de chez nous. Moi, mes enfants je les veux avec un sang 100% algérien.
La chanson que vous écoutez en boucle en ce moment ?
Celle du brésilien Michel Tello «Ai Se Eu Te Pego». Elle est à la mode ces dernières semaines.
Alors le bouquin d'Ibrahimovic, vous l'avez terminé ou pas encore ?
J'en suis à la moitié, mais je compte bien le finir.
On te souhaite de marquer ce week-end…


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