«Le championnat brésilien est le meilleur d'Amérique du Sud» «Neymar est assez doué pour être titulaire dans les plus grands clubs en Europe» À 31 ans, Andrés D'Alessandro a déjà tout connu, ou presque : le football allemand à Wolfsburg, anglais à Portsmouth, et espagnol à Saragosse, le bonheur de s'imposer au Brésil et de conquérir les cœurs des supporters de l'Internacional, mais aussi la déception d'une carrière en demi-teinte avec la sélection d'Argentine. Le meneur de jeu revient sur son parcours mouvementé, sur le plaisir de disputer le tournoi olympique de football et sur les liens qui le lient toujours à sa sélection. Vous avez souvent dit que vous rêviez de remporter un jour le championnat du Brésil. Quel regard portez-vous, aujourd'hui, sur cette compétition ? Ceux qui suivent le Brasileirão depuis des années sont mieux placés que moi pour en juger mais, depuis que je suis arrivé ici, je trouve que le niveau technique est très élevé. J'ai même le sentiment qu'il progresse constamment. Dans un pays comme le Brésil, qui produit sans cesse de grands joueurs, le talent est omniprésent. Il en sera toujours ainsi. Ici, toutes les équipes comptent dans leurs rangs des joueurs capables de faire la différence à tout moment. Le championnat brésilien est devenu extrêmement compétitif. Chaque saison, on recense dix ou 12 équipes qui jouent le titre. Je parle ici de grands clubs, qui ont une véritable obligation de résultats. De ce point de vue, le Brasileirão est unique au monde. Le championnat d'Argentine est peut-être le seul qui s'en rapproche. Parmi ces talents que vous évoquez, on trouve évidemment Neymar. Vous qui avez suivi de près le développement de Lionel Messi, comment jugez-vous le parcours de ce grand espoir du football brésilien ? Messi est incomparable. Pour moi, il est de loin le meilleur au monde. Cristiano Ronaldo est un cran en dessous. Le plus impressionnant chez Messi n'est pas tant son talent que sa constance. Maintenir ce niveau de performance sur plusieurs années, c'est tout simplement extraordinaire. Neymar est exactement dans le même cas. Cela fait maintenant un moment qu'il joue très bien. Les défenseurs le surveillent de près, ce qui l'oblige à repousser chaque fois ses limites. Il doit se montrer efficace, sans perdre pour autant le plaisir de jouer. Ce n'est pas évident. Un jour, il partira à la conquête du football européen. En attendant, il réalise un parcours sans faute au Brésil. Vous avez vous-même vécu cette expérience. Quelles sont les difficultés que l'on peut rencontrer en Europe ? Neymar a l'avantage d'être connu et reconnu au niveau international, ce qui n'était pas mon cas. Il devrait, donc, rejoindre une grande équipe et se voir confier une place de titulaire. Bien entendu, le football européen est assez différent de ce que nous connaissons en Amérique du Sud mais je suis sûr que quelqu'un d'aussi doué n'aura aucun mal à s'adapter. En revanche, il faut gérer un environnement complètement différent : une autre langue, une autre culture, une autre façon de vivre. Le plus difficile est, donc, d'acquérir de nouveaux repères. Avez-vous le sentiment d'avoir raté votre passage en Europe ? Sincèrement, non. Je suis très clair à ce sujet. Certes, je n'ai jamais joué dans de grands clubs européens mais j'ai vécu des moments très intenses dans d'autres équipes, comme à Portsmouth, par exemple. Quand je suis arrivé, nous étions avant-derniers à 11 points du maintien. Finalement, nous nous sommes sauvés lors de la dernière journée, en arrachant le nul à Arsenal. Mais les gens ne voient pas ces choses-là. J'ai connu de belles expériences en Europe, qui m'ont permis de grandir. Malheureusement, le football a changé et peu d'équipes jouent aujourd'hui avec un vrai meneur de jeu. J'ai, donc, été contraint de m'adapter et de me familiariser avec d'autres postes. En Angleterre, je jouais sur l'aile gauche, en Espagne, j'évoluais à droite. Vous n'avez pas été appelé en sélection, entre novembre 2010 et le match amical contre le Brésil en septembre dernier. Depuis, vous n'avez plus été convoqué. Avez-vous perdu tout espoir de revenir en équipe d'Argentine ? Je n'ai pas renoncé mais il est vrai que ça fait un moment que je n'ai plus été appelé. Mes priorités commencent à changer. Mon premier objectif est d'être performant avec l'Inter. Si le sélectionneur fait de nouveau appel à moi, tant mieux. Mais pour avoir une chance, je dois d'abord réaliser une bonne saison. Le fait d'évoluer au Brésil est-il un handicap ? Je suis tout près… Il est vrai que les Argentins ne peuvent pas voir les matches du championnat du Brésil mais on ne sait jamais. Certes, je ne joue pas en Europe mais j'ai la chance d'évoluer dans le meilleur championnat d'Amérique du Sud. Comment expliquez-vous que l'Argentine peine à jouer les premiers rôles au niveau international ? Nous ne manquons pas de talent, c'est certain. Malheureusement, tous ces grands joueurs n'ont pas le temps de développer des affinités sur le terrain. Nous avons le plus important, à savoir le meilleur joueur du monde. À nous de le mettre en valeur et de constituer un groupe performant. Vous avez remporté la médaille d'or du tournoi olympique de football, en 2004, aux côtés de grandes stars comme Carlos Tévez et Javier Saviola. Quel souvenir gardez-vous de cette compétition ? C'était fantastique. Déjà, j'ai eu la chance de remporter l'un des trophées les plus convoités, après celui de la Coupe du monde. En plus, j'ai connu quelque chose de complètement nouveau pour un footballeur. J'ai eu le sentiment de revenir à mes débuts : nous vivions dans un appartement ; nous mangions à la cantine… Il régnait un esprit amateur très sain. On apprend beaucoup en côtoyant des spécialistes d'autres disciplines.