«Je ne m'attendais pas à un tel accueil» C'est hier à 11h que Mourad Meghni est sorti de l'avion pour fouler le sol algérien après 8 ans d'absence. Le bonheur était très perceptible sur son visage, surtout à la vue de la foule grandissante, venue à sa rencontre. Entre les flashs des photographes et les questions des journalistes entrecoupées par les salutations de ses fans, Mourad était comme hypnotisé par tant de chaleur et tant de ferveur. D'ailleurs, son oncle Djillali et son cousin Mohamed, présents à l'aéroport d'Alger, ne s'y sont pas trompés«Pour savoir ce qui se passe en ce moment dans son cœur, vous n'avez qu'à voir son visage. Regardez-le comme il est heureux ! Il n'y a pas de doute, il est fou de joie de venir enfin en sélection d'Algérie. Mourad est un authentique Algérien. Il est musulman pratiquant et c'est le même sang que le nôtre qui coule dans ses veines», assure Djillali Meghni, fier de son neveu. Son oncle Djillali nous exhibe fièrement son passeport algérien établi en 2005 Pour nous prouver un peu plus l'attachement de son neveu pour l'Algérie, Djillali nous exhibe le passeport vert tout neuf de Mourad. «Vous voyez bien qu'il est aussi Algérien que vous et moi. Il a fait établir son passeport en 2005 avec une grande joie. On ne peut pas voir Mourad autrement qu'en Algérien. C'est quelqu'un qui est très attaché à ses racines et à sa famille. Il fait sa prière de manière assidue depuis tout petit. Il nous fait participer à tout son bonheur. Toute la famille vibre au rythme de ses performances et maintenant qu'il va jouer pour les Verts, on sera encore plus accros à ce qu'il va réaliser. On ne peut pas exprimer notre fierté avec des mots. Tout se passe là, dans le cœur», nous a confié l'oncle paternel de Meghni. Son papa n'assistera pas au match contre l'Uruguay Mohamed, le cousin de Meghni, et Djillali, son oncle, nous apprendront par la suite, avec regret, que le papa de Mourad ne pourra pas assister au match amical du 12 août contre l'Uruguay. «Il aurait tant aimé être là avec nous, mais comme il a des obligations professionnelles en France, il a dû écourter ses vacances pour rentrer chez lui. Je sais qu'il bouillonne d'envie d'être dans les tribunes pour le premier match en équipe d'Algérie de son fils Mourad. Mais c'est sûr que son cœur sera avec nous au stade du 5-Juillet. Il ne va pas rater le match, tout comme tous les membres de la famille. On ira tous au stade, il n'y a pas le moindre doute», nous a annoncé Djillali. «Te auguriamo la fortuna, e successo e siamo con te», lui lance un Algérien à l'aéroport Happé par la foule, Mourad ne paraissait pas le moindre du monde gêné d'être bousculé et réclamé. Il donnait plutôt l'air d'être en famille, entouré par les siens. A aucun moment, il n'avait laissé paraître un signe de lassitude, malgré les sollicitations de ses fans. Il était tout simplement aux anges. Nous lui avons même demandé si cela le faisait réellement planer. «C'est sûr que je suis comme dans un rêve», a-t-il reconnu tout sourire. Meghni ne voulait rien refuser à personne ce jour-là. Ni les questions des journalistes, ni les photos souvenirs des gens. Il s'était tout bonnement offert à ses compatriotes, à son pays. Cette communion entre le nouveau Vert et le public se poursuivra à la sortie de l'aéroport et la foule ne faisait que grandir. Chacun y allait de ses encouragements. Il y en a eu même un qui s'était approché du joueur de la Lazio de Rome pour lui lancer dans un italien tellement parfait : «Te auguriamo la fortuna, e successo e siamo con te.» (On te souhaite beaucoup de chance et de réussite. On est avec toi Mourad) que Meghni s'est retourné brusquement pour voir le visage de l'auteur de ces mots. Il est arrivé en même temps que Kamel Ghilas L'arrivée de Mourad Meghni à l'aéroport Houari-Boumediène a été au même moment que celle de Kamel Ghilas. Les deux hommes qui ne se connaissaient pas auparavant ont tout de suite sympathisé et échangé quelques mots. Le joueur du Celta Vigo, qui est déjà passé par les mêmes émotions lors de sa première sélection chez les Verts, a laissé son nouvel ami apprécier l'instant et s'est même mis gentiment en retrait pour laisser Meghni vivre pleinement cet événement. Cela ne durera que quelques minutes, parce que les gens ne l'entendaient pas de cette oreille et se sont tout de suite rués sur Ghilas pour échanger avec lui quelques mots et immortaliser cette inespérée double rencontre. Il a parlé avec Saâdane au téléphone à sa sortie de l'aéroport Une fois dehors, Ghilas et Meghni avaient été accueillis par le directeur administratif de l'EN chargé de les emmener vers le lieu de regroupement de l'équipe nationale. Mais avant d'arriver vers la voiture, Boubekeur Cheniouni forma le numéro de téléphone de Rabah Saâdane pour lui passer le nouvel arrivé. Meghni était comblé de bonheur et ne faisait qu'acquiescer en écoutant son nouveau coach. «Oui, merci. C'est sûr. Il n'y a pas de souci. OK, merci. A tout à l'heure.» Tels sont, à peu près, les mots prononcés par Mourad Meghni. «La chaleur humaine est plus intense que celle de l'été !» Le temps que Boubekeur Cheniouni ramène sa voiture garée un peu plus loin, les fans des deux joueurs avaient largement profité pour prendre des photos souvenirs et plaisanter avec Meghni et Ghilas, visiblement très détendus. «Même s'il fait un peu chaud, c'est quand même plus supportable que ce que j'ai vécu à Pékin. Mais la chaleur qui importe le plus, c'est la chaleur humaine des gens autour de moi. C'est vraiment formidable ce que je vis depuis mon arrivée. J'espère leur renvoyer l'ascenseur sur le terrain, incha'Allah», nous a-t-il confié en posant encore et encore avec femmes, enfants et même les policiers de l'aéroport, tous heureux comme nous d'accueillir Meghni, avec la même phrase : «Bienvenue chez toi Mourad !» Nacym Djender «Je ne m'attendais pas à un tel accueil» Quelles sont vos premières impressions comme ça, à chaud, en refoulant le sol algérien ? Ça fait plaisir de retrouver ses racines et son pays. Il y a mes deux oncles, mes cousins et mes cousines qui sont venus m'accueillir avec tous ces gens qui me montrent beaucoup de sympathie. Ça réchauffe vraiment le cœur. Vous paraissez encore secoué par le décalage horaire, on se trompe ? C'est sûr, je suis encore un peu perturbé, parce que j'ai fait un long voyage de la Chine en France, puis en Algérie. Mais le fait de voir tous ces gens venir me saluer et me souhaiter la bienvenue me fait oublier la fatigue. Leur sourire et leur sympathie m'ont réveillé. Je suis peut-être sonné, mais plus par l'accueil. Je ne m'attendais pas à voir tout ce monde. A quel type d'accueil vous attendiez-vous ? Je savais qu'il allait y avoir quelques journalistes parce qu'ils m'avaient appelé avant, mais de là à voir tout ce monde, franchement je ne pouvais pas l'imaginer. Sincèrement, je suis gâté d'entrée et je tiens à vous en remercier tous. Il y a Madjer qui a parlé de vous dans notre édition d'aujourd'hui (on lui tend le journal). Il a dit que si Meghni joue à la Lazio, ce n'est pas pour ses beaux yeux. Ça vous fait quoi ? Franchement, ça fait plaisir déjà que Madjer me connaisse. C'est tout de même Madjer ! C'est important pour moi de savoir que des gens comme Madjer connaissent mon nom et ce que je fais. J'espère juste que je vais être à la hauteur de ces éloges. En tous cas, je me donnerai à fond Incha Allah, c'est promis. Quelle sorte d'appréhensions pourriez-vous avoir en intégrant le groupe des Verts ? Non, tout va bien de mon côté. Je n'ai pas de craintes particulières dans ce sens. J'espère juste que je vais m'entendre avec mes coéquipiers et que je vais vite m'adapter au jeu de l'équipe nationale. Que pouvez-vous répondre à ceux qui disent que vous ne jouez pas assez à la Lazio ? Jusqu'à présent, je pense qu'à chaque fois que j'étais bien physiquement, le coach m'a fait jouer. Maintenant, les gens se réfèrent peut-être à la finale de la Supercoupe d'Italie à Pékin à laquelle je n'ai pas pris part. Même moi, je me demande pourquoi je n'ai pas joué ce match. Il y a peut-être le fait que j'ai manqué l'entraînement de jeudi pour avoir reçu un coup au coup-de-pied. J'avais du mal à appuyer mon pied au sol, sinon le lendemain j'étais sur le terrain avec le groupe et j'ai repris les entraînements normalement avec mes coéquipiers. C'est à mon sens la seule raison pour laquelle je n'ai pas joué cette finale. Car au départ, j'étais persuadé de la jouer. Mais bon, le coach a fait ses choix. En plus, il y avait le grand Inter de Milan en face. C'est sans doute pour cela que votre coach n'a pas voulu prendre de risques avec vous, non ? Oui, mais je pense avoir autant de qualités que le milieu de terrain qui a joué la finale. Moi, je m'entraîne toujours pour gagner une place de titulaire au sein de la Lazio. Je ne peux pas me contenter d'une place de remplaçant. C'est toujours mon état d'esprit au sein de l'équipe. Quelle est la part de vérité dans ce qui est rapporté çà et là au sujet des clubs qui vous veulent ? On a lu que le Celtic et Palerme se sont rapprochés de la Lazio ; est-ce vrai ? Tout ce que j'ai entendu à mon sujet, c'est l'intérêt de Cagliari, mais pour le moment, je suis à la Lazio et je m'y sens bien. Je ne peux pas vous en dire plus car il ne s'agit pour l'instant que d'articles de journalistes. Savez-vous que Rabah Saâdane applique un principe qui dit qu'il doit s'interdire de faire appel à un joueur qui n'est pas titulaire dans son club ? Non, cela ne me gêne pas. Au contraire, je trouve cela normal. Il faut que le joueur ait du temps de jeu et des matches dans les jambes. Cela me va bien, parce que j'ai l'intention de m'imposer à la Lazio comme titulaire pour être convocable en sélection. L'idée de changer de club pour être sûr de jouer et assurer votre place parmi les Verts ne vous effleure-t-elle pas l'esprit ? Pour le moment non, parce que je sais que j'ai les qualités pour jouer titulaire à la Lazio. D'aucuns pourraient penser que c'est un entêtement de votre part à vouloir jouer comme titulaire dans un aussi grand club, les comprenez-vous ? Ce n'est pas un entêtement de ma part car j'ai déjà joué en Série B et même à Sochaux, en France. Cela ne me pose aucun problème, car je sais que j'ai les qualités pour m'imposer à la Lazio. Il n'y a pas de soucis à se faire. Et en équipe nationale, à quel poste seriez-vous heureux d'évoluer ? Je vais voir cela avec le coach. Je ne sais pas encore comment ça fonctionne, mais je me mets à la disposition de l'équipe entièrement. Je peux jouer devant ou alors un peu plus en retrait comme je l'ai déjà fait à la Lazio. C'est au coach de voir tout cela.
Savez-vous que vous allez peut-être vous battre avec Rafik Saïfi que vous admirez tant ? Justement, on verra cela avec M. Saâdane. Le plus important est d'être à prêt à 100% afin de permettre au coach d'avoir un effectif solide. C'est la concurrence saine qui fait progresser l'équipe entière. Une équipe doit avoir de bons titulaires, mais aussi de très bons remplaçants. Moi en tout cas, ça ne me gêne pas. Pensez-vous déjà au moment où vous allez fouler la pelouse du stade du 5-Juillet devant ce public si particulier ? C'est sûr, j'y pense tout le temps. Je me dis que j'ai eu beaucoup de chance de voir ce rêve de porter le maillot de mon pays enfin concrétisé. J'espère ne pas décevoir et je promets de me battre sans relâche pour défendre les couleurs de l'Algérie. Entretien réalisé par Nacym Djender On le surnommait Zizou à 16 ans Peut-être que les jeunes supporters de la sélection d'Algérie l'ignorent, mais Mourad Meghni était très estimé en France lorsqu'il était adolescent, à tel point qu'on le surnommait Zizou à 16 ans, lorsqu'il était l'un des meilleurs joueurs européens des U17. Il avait remporté la Coupe du monde des U18 en 2001 à Trinidad-et-Tobago en brillant dans les matches qu'il a disputés. Il avait rendu visite à Ahmed Messaoudi à Bologne On se rappelle que l'ancien joueur du MC Alger, Ahmed Messaoudi, victime d'un grave accident de la circulation, avait effectué en 2003 des soins dans une clinique spécialisée à Modène, en Italie, avec le concours du Buteur, pour recouvrer l'usage de ses membres supérieurs. Mourad Meghni, accompagné de l'un de ses frères, avait rendu visite à Messaoudi à la clinique et était resté avec lui jusqu'à une heure tardive de la nuit. Il lui avait offert un maillot dédicacé de son club, Bologne. Messaoudi, de son côté, lui avait offert un maillot du MCA, un geste qui l'avait beaucoup touché. Saïfi son guide en sélection Hier à l'entraînement, Meghni, qui n'a jamais caché son admiration pour Saïfi, n'a pas quitté l'ancien Mouloudéen d'une semelle. A l'hôtel ou à l'entraînement, les deux joueurs étaient inséparables. C'était l'occasion pour Saïfi d'orienter son jeune coéquipier dans ses premiers pas en sélection.