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JSK : Aït Abdelmalek Ahcène (entraîneur et formateur en Allemagne) : «C'est une bonne initiative que d'engager un protocole d'accord avec le Bayern Munich»
« En Allemagne on ne parle pas une autre langue que celle de la formation, tous les joueurs de la Bundesliga sont issus des écoles de formation et le modèle doit être copié chez nous » Il est algérien, natif de la Kabylie (Ouacifs), la JSK lui coule dans les veines. C'est un fin technicien, matière grise locale qui a choisi, faute de considération chez nous, de « s'exiler » en Allemagne pour monnayer son talent d'entraîneur, mais surtout acquérir de nouvelles méthodes de travail. Lui c'est Ahcène Ait Abdelmalek, actuellement entraineur et formateur en Allemagne. Qui mieux que lui pourrait nous éclairer sur la philosophie allemande, notamment dans le domaine de la formation, à propos duquel la JSK est sur le point de parapher un protocole d'accord avec le Bayern de Munich. Modestement, Ait Abdelmalek répond à nos questions. Entretien. Bonjour M. Ait Abdelmalek, d'abord, peut-on avoir de vos nouvelles ? Bonjour, je vous remercie de m'avoir appelé. Je vais bien, à l'heure où je vous parle je m'apprête à rejoindre le boulot. Il fait froid, je crois, un peu plus que dans nos montagnes de Kabylie, comme le Djurdjura qui me manque tellement. A travers vous, je salue toute ma région et mon pays. Avez-vous appris que la JSK, par le biais de deux de ses dirigeants, est sur le point de signer un protocole d'accord avec un club allemand, en l'occurrence le Bayern de Munich ? Franchement j'ai lu l'information dans vos colonnes à trois heures du matin, j'ai pour habitude de ne pas dormir avant de consulter sur Le Buteur toute l'actualité sportive de chez nous. Honnêtement, je suis surpris mais plutôt fier que le club de ma région natale va sceller un accord avec l'un des plus grands clubs d'Allemagne, pour ne pas dire carrément d'Europe et du monde entier. C'est une fierté pour nous les Algériens. J'espère que ce projet va bientôt se concrétiser et je suis même convaincu qu'il apportera beaucoup de belles choses, non pas à la JSK uniquement, mais à tout le football national qui en tirera profit. Justement, les dirigeants kabyles nous ont expliqué que cet accord portera beaucoup plus sur la formation de jeunes talents. Vous qui êtes sur place, quel est votre avis là-dessus ? Vous savez, ici les Allemands ne parlent pas une autre langue que celle de la formation, alors il ne faut pas s'attendre à des partenariats avec le Bayern de Munich sur un autre dossier que la formation. Si la JSK arrive à concrétiser cet accord, croyez bien qu'elle aura une tout autre démarche à suivre et c'est la plus indiquée, je les appelle donc à ne pas rater cette opportunité. Pourriez-vous être beaucoup plus explicite ? Le Bayern de Munich est un club réputé dans le monde pour la qualité de la formation dispensée aux jeunes talents. Le président lui-même qui n'est plus à présenter, en l'occurrence Karl Heinz Rummenigge, est issu de la pure formation allemande. Ici c'est très sérieux et les moyens sont ultra-modernes, la formation pour eux est une étape non négligeable. Le joueur est pris en charge dès ses débuts en football jusqu'à atteindre l'étape où il signera son contrat professionnel dans un club. En quelque sorte, à l'issue de la formation, le joueur aura acquis une discipline allemande qui lui servira durant toute sa carrière footballistique. Avant d'évoquer les moyens, parlez-nous même brièvement de la méthode utilisée en Allemagne... La formation en Allemagne se fait principalement en deux phases. Je m'explique : la première étape est définie comme étant une préformation, le joueur qui arrive tout jeune à ses débuts bénéficie d'une prise en charge particulière et totale aussi, à savoir sa scolarité, l'internat et un programme adapté. C'est une fois passé 16 ans qu'il entame la seconde phase au cours de laquelle on lui enseigne de nouvelles choses.A la fin, le joueur décrochera un contrat professionnel et ceux qui ne seront pas libérés du centre resteront toujours stagiaires. Quels sont les moyens qu'il faut mettre en place pour la réussite d'un tel projet de formation ? Voilà justement ce qui empêche notre pays d'avancer dans ce domaine, ce sont les moyens. D'abord l'infrastructure doit être disponible, à savoir un centre de formation digne de ce nom, puis les temps modernes exigent un personnel compétent, des entraîneurs diplômés de haut niveau, un staff médical qui maitrise le sujet... La JSK a bénéficié d'un projet de construction d'un centre de préparation, et le futur stade de 50 000 places est en cours de réalisation, pensez-vous qu'il est venu le moment d'engager une véritable réflexion ? Je le rappelle autant de fois qu'il le faudra, cette opportunité de partenariat avec les Allemands doit être bien saisie.Je sais que la JSK aura bientôt ses infrastructures sportives dignes de ce nom, c'est donc le moment, non pas pour la JSK seulement, mais pour tous les clubs, de mettre fin aux pratiques que je n'oserai pas dire révolues, mais qui font partie des temps anciens, il faut maintenant s'ouvrir au monde et profiter des nouvelles technologies, on ne pourra rester amateur toute notre vie, au moment où tous les pays du monde ont pris une sérieuse option pour l'avenir. Dans un premier temps, compte tenu de votre expérience et votre vécu en Allemagne, quels sont les tuyaux que vous pouvez donner à la JSK pour mieux démarrer le projet ? Vous savez, ce n'est pas très compliqué, ce qui se fait ici, toutefois ça demande de la patience et l'amour de ce qu'on fait. Par rapport à l'Allemagne, la JSK doit dans un premier temps signer des partenariats avec des clubs locaux de chez nous, même ceux évoluant dans les paliers inférieurs. Pour ces clubs, elle communiquera un programme de travail à mettre en place pour les jeunes leur fixant les objectifs qu'il faut atteindre en fin de saison. Car à la fin de saison, au lieu de perdre leur temps dans la prospection de jeunes talents, ce sont ces clubs partenaires, qui ont été chargés de ce programme de formation, qui choisiront parmi leurs meilleurs éléments ceux qui viendront poursuivre leur formation à la JSK. C'est le modèle allemand qui donne ses fruits et qui est le plus suivi. Je suis plus que certain qu'en sillonnant notre Kabylie profonde ou même ailleurs dans les autres régions du pays, la JSK découvrira des talents qui sont malheureusement marginalisés et inexploités. Vous avez tenté une expérience à l'USMH puis à l'USMA, mais de courte durée. Pourquoi votre mission d'engager une véritable opération de formation n'a-t-elle pas abouti ? Avant de prendre en main l'USMH et l'USMA, permettez-moi d'abord de vous dire que j'ai commencé par présenter un programme de travail à la JSK. Charité bien ordonnée commence par soi-même. On dit bien que celui qui veut faire du bien commence par sa maison, malheureusement l'idée est restée sans suite...J'ignore si ma proposition a été débattue ou pour d'autres raisons elle a été reléguée au second plan, néanmoins, je suis allé à l'USMH puis à l'USMA, mais ma mission n'est pas allée à son terme pour plusieurs raisons. Je crois qu'il est temps que nos clubs reviennent à la raison, on ne peut bâtir de grandes équipes sans formation, arrêtons de dépenser des milliards pour des joueurs seniors dont la plupart n'ont pas fait de formation. En Allemagne, ce discours n'existe même pas. Aucun joueur n'est tombé du ciel. C'est même la raison qui a fait que notre sélection nationale est composée dans sa majorité de joueurs évoluant à l'étranger, quelle est votre opinion ? Cet état de fait ne peut surprendre quelqu'un qui connaît la situation. Oui, le fait de ne pas avoir la majorité des joueurs de la sélection nationale composée de joueurs locaux renseigne qu'il y a vraiment un problème. Je ne suis pas contre ces joueurs qui viennent des clubs européens, au contraire, je sais qu'ils sont algériens et qu'ils aiment leur pays et veulent apporter un plus à notre sélection. Toutefois, en tant que technicien, je dois dire qu'il ne faut pas négliger le produit local, il faut bien le préparer et le prendre en charge dans l'intérêt de notre sélection et de notre football. Les dirigeants de la JSK vont peut-être se rendre en Allemagne, pour entreprendre les démarches du protocole d'accord, seriez vous disposé à les assister si on vous fait appel ? Matoub Lounès, que Dieu ait son âme, disait dans une de ses plus belles chansons : « Un Kabyle, là où il est, on ira pour le rencontrer et le solliciter ». Donc je vous annonce aujourd'hui que pour tout ce qui concerne la JSK et son bien-être je suis constamment disponible, je suis en Allemagne et lorsqu'ils viendront, qu'ils sachent qu'ils me trouveront à leurs côtés en permanence. Moi je suis très fier de voir mon club de cœur concrétiser un projet ambitieux avec le grand Bayern de Munich. On vous laisse le soin de conclure... Permettez-moi, à travers le Buteur, de passer un grand bonjour à toute la famille, à toute la Kabylie et à l'Algérie entière. Mon rêve le plus cher est de voir les compétences locales considérées dans leur pays d'origine et qu'on leur donne les moyens et qu'on les laisse travailler. Aujourd'hui, on assiste, la mort dans l'âme, à la marginalisation de notre matière grise. Certains résistent, d'autres ont fini par remettre le tablier, c'est malheureux ! L'argent existe, la matière grise aussi, il reste à faire appel aux gens compétents, ceux qui ont des idées à concrétiser, et tout ira bien. J'espère que la situation va changer. En tout cas, c'est impératif sinon on ne fera que figurer. Enfin, je tiens à souhaiter bonne chance à la JSK, c'est notre club le plus cher, celui qui a bercé notre enfance et qui nous a procuré de la joie dans les moments les plus difficiles qu'a vécus notre région et le pays en général. Je n'oublierai pas de souhaiter, au passage, un prompt rétablissement au président Hannachi. Nom : Ait Abdelmalek Prénom : Ahcène Fonction : Entraîneur et formateur de football (UEFA) Diplôme universitaire préparation physique Dijon (France) Diplôme d'entraîneur gardien de but Performances : participation à la Champions League africaine avec le Djoliba de Bamako (Mali) Entraineur et formateur au centre de formation de l'Eintracht Frankfurt / Allemagne.
