La parole des muets est parfois plus puissante A vingt jours du duel de l'année entre l'Egypte et l'Algérie, les cœurs sont déjà serrés. Dans toutes les villes du pays, tous les quartiers, tous les foyers et les cafés, les discussions tournent autour de Saâdane et ses joueurs. Malgré la force de notre équipe nationale, l'espoir cède parfois naturellement la place à l'inquiétude, tellement aucun des 35 millions d'Algériens que nous sommes ne veut voir cette qualification nous échapper si près du but. L'on se surprend dès lors à se poser mille questions sur la santé de nos joueurs. Dans quel état de forme vont-ils arriver au Caire le 14 novembre ? Y aura-t-il des blessés avant le match ? Qui manquera à l'appel ? Et surtout, si Anthar Yahia et ses coéquipiers ne vont pas se laisser atteindre par les attaques médiatiques de Zidan et ses acolytes. On surveille nos joueurs comme le ferait une maman avec ses enfants On guette la moindre nouvelle émanant du genou de Bougherra, de la cuisse de Meghni ou du pied de Ziani pour nous rassurer. On les surveille comme le ferait une maman avec ses enfants. On les défend de toutes nos forces contre le mauvais œil et les attaques répétées d'une certaine presse égyptienne qui, dans l'agonie infligée par les trois points qui manquent à son équipe, verse dans la méchanceté gratuite et tente de déstabiliser Saâdane et son groupe. Tel un geste de condamné exécuté qui veut s'accrocher, par instinct de survie, à ses ultimes soubresauts. Rappelez-vous de la chute de ces hautains d'Allemands avant le 2 à 1 de Gijon Les pratiques des Egyptiens sont connues de longues dates. Elles ne sont amplifiées aujourd'hui que par l'abondance des médias et la rapidité de transmission de l'information, grâce aux nouvelles technologies. Les anciens joueurs des Verts sont encore là pour témoigner de l'agressivité de certains Egyptiens dès lors qu'il s'agissait d'affronter l'Algérie. Que ce soit à l'aéroport ou à l'entrée du stade, les Egyptiens ont toujours été présents pour intimider leurs adversaires algériens. Mais nos joueurs ont de tout temps su comment se surpasser et ne pas se laisser abattre par les insultes et les bassesses, d'où qu'elles viennent. Madjer et ses camarades en ont vu de toutes les couleurs. Que ce soit contre l'Egypte ou d'autres pays. Les moins âgés d'entre nous gardent toujours en mémoire le souvenir des déclarations outrageuses et offensantes lancées à l'endroit des Verts par ces chers Allemands avant le fameux match du Mundial espagnol de 1982. «Le huitième but sera pour mon fils» avait lancé Breitner aux Algériens Karl-Heinz Rummenigge et ses camarades avaient alors pris de haut l'équipe algérienne qui allait faire son entrée dans l'histoire de la Coupe du monde. Ce dernier avait plaisanté en disant vouloir «offrir une large victoire pour ma chère épouse qui adore nous voir marquer beaucoup de buts». Paul Breitner, le capitaine de l'ex-RFA, a été un peu plus hautain encore : «Le huitième but, je voudrais le dédier à mon fils», avait-il éructé, espérant trouver une défense algérienne trouée comme une passoire. Mais Cerbah, Merzekane, Mansouri, Guendouz, Kourichi et le capitaine Fergani étaient trop fiers pour ne pas lui infliger un cinglant démenti sur le terrain. Dahleb, Zidane, Assad, Belloumi et Rabah Madjer se chargeaient des affaires offensives pour réduire les géants allemands à des gnomes, en réponse à ce titre du journal ouest allemand Sonntag Aktuel, qui avait traité les joueurs algériens de «nains de jardin» les Chiliens de «vieux durs» et les Autrichiens de «méchants cousins». Jupp Derwall : «Si on perd contre l'Algérie, je prendrai le premier train pour rentrer chez moi» Leur entraîneur, Jupp Derwall, assurait pour sa part «qu'en cas d'échec contre les Algériens, je fais ma valise et je prendrai le premier train pour l'Allemagne». Du haut de son perchoir, le perroquet allemand ajoutait, sans se soucier du trop-plein d'assurance qui dégoulinait de sa bouche : «Franchement, je ne peux pas imaginer que nous allons perdre contre cette équipe d'Algérie, car il y a quand même un écart trop important entre le football algérien qui va jouer sa toute première Coupe du monde et le nôtre qui en a gagné déjà deux.» Derwall avait alors souligné cela avec la fierté qui caractérisait une certaine partie de la population orgueilleuse d'Allemagne, fière de son «arien». Tout comme les Egyptiens évoquent aujourd'hui leurs Pharaons. La parole des muets est parfois plus puissante Mais Madjer, Zidane, Assad, Belloumi et leurs camarades ont démontré par la suite au monde entier que le football n'était pas une science exacte et que les Allemands avaient tort de l'ouvrir devant la presse pour se taire sur le terrain. La parole des muets est parfois plus puissante, plus cinglante que les bla-bla des grandes gueules. Cela a été prouvé après ce score inoubliable de 2-1 qui a fait connaître, l'espace de 90 minutes, le football algérien au monde entier. Depuis cette défaite surprise (pour les Allemands), les barrières, qui pouvaient subsister entre les grandes nations et celles dites «petites», tombaient de manière définitive. Khalef et ses joueurs ont appris aux footballeurs des quatre continents qu'un match se jouait sur le terrain et uniquement sur le terrain. Jamais dans les journaux ! Ziani nous vengera comme l'a fait Merzekane contre les Allemands Oui, jamais à travers les médias comme tentent de le faire les Egyptiens en s'appuyant sur des émissions poubelles qui se font un immense plaisir de répercuter la haine où qu'elle soit. Cela, bien sûr, à des fins évidentes de racolage médiatique, histoire de se faire un nom et de booster leurs audiences. Des pratiques peu honorables que le sage public des deux pays a vite fait de dénoncer. A tel point que les émissions de ces guignols de l'info à l'égyptienne ne trouvent plus de matière pour véhiculer la haine qui les anime. A vrai dire, les Algériens ont tout à gagner face à ce genre de mesquineries. Car Ziani et ses camarades, qui sont déjà gonflés à bloc, comme l'étaient Merzekane et ses coéquipiers avant d'affronter les Allemands, se feront un devoir supplémentaire de venger leurs compatriotes qui se sentent blessés par les attaques incessantes, non pas de nos vrais frères d'Egypte qu'on respecte et admire, mais plutôt par les aboiements de ces minables Egyp…chiens qui nous cassent les bonbons ! Nacym Djender