Une fille du voyage ! «L'Algérie, bladi sakna fi kalbi » retentit à El Kettani L'amour des Verts n'a pas de frontières ! Alger-Le Caire, par les airs, mieux c'est, mais quand les moyens viennent à manquer, la route reste toute tracée pour la caravane algérienne décidée à taper aux portes de l'Egypte ce samedi. Et il ne s'agit nullement pour les dizaines d'inconditionnels de voir Le Caire et mourir ! Que nenni ! C'est avec le cœur gros comme ça, plein d'espoir que le premier contingent comptant quelque soixante supporters des Verts, tout âge confondu à la mixité souhaitée, a pris la route lundi soir pour Le Caire. Les conditions météorologiques dantesques, l'incertitude de la route et la longue distance à parcourir n'ont nullement altéré l'égo de ces amoureux de l'EN ; cette équipe nationale qui gagne, tous chauffés à bloc. «C'est le match le plus important. Celui de la vie ! Il faut qu'on y aille. L'EN a besoin de nous !», nous lançait Youcef, un jeune pubère gringalet que l'enfance refuse de quitter. Il a 18 ans ! L'amour des Verts n'a pas d'âge, aussi. Nous y reviendrons. Rendez-vous était donc pris pour ce lundi au soir. L'horaire prête à équivoque, mais reste tout de même réfléchi, lorsqu'on sait que l'agence qui s'était occupée de l'organisation de ce voyage a pris le soin de retarder le plus possible l'heure du départ à fin de permettre à tout le monde d'embarquer. Nous y reviendrons aussi. A quatre jours du très attendu Egypte-Algérie, ces supporters, pas comme les autres, avouons-le, se sont lancé le défi de retentir leur voix au Cairo Stadium ce samedi. Un défi à hauteur de celui que les coéquipiers de Saïfi s'apprêtent à relever. Celui d'arracher leur billet pour l'AF Sud. L'espoir y est. La patience aussi. Allez Ammi Ali, cap droit devant ! «L'Algérie, bladi sakna fi kalbi » retentit à El Kettani 22h30 : El Kettani, Bab El Oued. C'est ici, dans ce vieux quartier d'Alger, qu'Altour, l'agence qui s'était chargée de l'organisation du voyage, en collaboration avec la société Menani et Contact-Algérie, a fixé le point de départ. Le ciel nuageux laissait encore subodorer quelques gouttelettes de pluie. L'orage est passé. «Il va faire beau demain, normalement», rassure Ammi Ali, le chauffeur attitré de cette «expédition». Enfin, espère-t-il sans doute. Il sera assisté de Ahmed Lagrari. Un vieux briscard qui connaît, dit-on, la route d'Egypte comme sa poche. Voilà qui rassure ! Il ne fait pas vraiment frisquet ce soir-là, mais les quelques bourrasques de vent marin qui soufflaient par arythmie faisaient entrer le cou dans les épaules aux plus frileux. Les organisateurs de ce déplacement ont été contraints de retarder le départ à plus tard par souci de faire embarquer les retardataires. El Kettani, cette cohue grouillante ne désemplissait pas même à une heure aussi tardive. Il faut dire que l'ambiance un peu fofolle créée par les supporters a attiré de nombreuses personnes qui sont venues se mêler à la foule, provoquant tout un brouhaha, rythmé par la fameuse chansonnette «L'Algérie ! L'Algérie, bladi sakna fi kalbi» du duo Milano-Torino, exclusivement dédiée à l'EN. Non loin de là, les organisateurs s'affairent encore à régler les derniers détails avant le largage des amarres. Une fille du voyage ! La foule était grandissante. Youcef, le jeunot de la bande se lâche. Danse endiablée, entonnant à tue-tête les slogans dédiés aux Verts. Le garçonnet avouait s'être joint à «l'expédition» sans l'accord de ses parents. «On peut dire que j'ai fugué ! (rires). Ça me tient à cœur de y aller. Tant pis, je suis parti de chez moi sans autorisation. De toute façon, dans ma tête, la décision était prise depuis un moment. Je me suis débrouillé les frais du déplacement et me voilà !», nous avouait-il, un peu candide. Il n'était pas le seul. Au beau milieu de cette foule masculine, une jeune fille originaire de Tiaret féminisait les lieux ! Qui, où et comment s'est-elle retrouvée là ? Peu importe, du moment qu'elle y est. De toute façon, elle n'a rien voulu dire, quand bien même aurions-nous insisté. Elle est restée un peu à l'écart, seule dans sa bulle. «J'y vais, parce que j'aime mon pays !», s'est-elle contentée de dire. Parmi la foule, on trouvait de tout. Des jeunes et des moins jeunes. Des ouvriers, des étudiants. Des chômeurs aussi ! Comme quoi, toutes les couches sociales sont représentées dans cette «expédition». Première halte à Tébessa Le Blidéen que tout le monde attendait se l'est enfin ramené ! C'était pas trop tôt. Ammi Ali fait gronder le moteur du bus, une, deux, voire trois fois peut-être. Une invitation à embarquement immédiat ! La route s'annonce longue. La première halte est prévue dans quelque 700 km. En effet, les organisateurs du voyage ont prévu un arrêt à Tébessa, d'où deux autres bus venant de Biskra se joindront à celui d'Alger pour constituer un cortège haut en couleurs. 22h48 : Le bus quitte donc le petite placette d'El Kettani tout en branle, avec comme tableau de route, arriver au Caire samedi, au plus tard. Ce qui reste réalisable, puisque hier, à 15h30, les trois buts avaient franchi les frontières algéro-tunisiennes. Une seule crainte : la douane égyptienne ! La caravane quitte donc Alger La Blanche avec l'incertitude de la route et le souci de passer la frontière égyptienne sans encombre. Ahmed Lagrari, le vieux routier, n'a pas caché d'appréhender l'accueil des services des douanes égyptiens à la frontière. «Figurez-vous qu'un groupe de pèlerins ont dû poiroter plus de 20 heures à la frontière. Quand j'y pense… », s'est inquiété Ammi Ahmed. Mais ses appréhensions sont soigneusement dissimulées sous une connaissance certaine du trajet. Rassurant ! «Un drapeau pour chaque Algérien» La délégation de supporters n'est pas partie les mains vides. Une association a pris le soin de remettre aux organisateurs près de 900 drapeaux algériens, conformément à son slogan «Un drapeau pour chaque Algérien». L'ambiance y est. L'espoir aussi. Un espoir que le béret basque de Rabah Saâdane a, semble-t-il, bonifié. «Le cheikh a mis son béret, on va gagner, c'est certain !», rassurait un jeune de Dergana. Un béret porte-bonheur comme réconfort. Son baluchon comme unique confort, pour certains. Mais tous s'en remettent aux Khodor ! F. A.