Y a-t-il meilleur moyen d'exprimer sa joie qu'en chants, musiques et danses pour fêter une équipe qui gagne ? Nos artistes ont répondu à la question de la meilleure manière : en produisant œuvre sur œuvre. En un temps record, ils ont écrit, mis en musique et aligné dans les bacs des CD à la gloire des Verts et de l'Algérie qu'ils représentent dignement, et avec quelques piques à l'adresse de tous les détracteurs, principalement les Egyptiens qui ont fait montre d'un esprit antisportif, xénophobe, vindicatif comme en avait jamais vu dans toute l'histoire du sport, sauf peut-être avec Hitler quand il a refusé de serrer la main de Jesse Owens, le coureur noir et la star des jeux Olympiques de 1936 à Berlin. Les artistes algériens ont ainsi accommodé la joie à la dérision pour enflammer non seulement les jeunes supporters de l'équipe nationale, mais tout le peuple algérien. Et ils ont réussi. L'Algérie tout entière s'est rassemblée autour de l'équipe nationale et du drapeau algérien sur les rythmes des chansons. Les Algériens unis par les liens sacrés du son. En couplet ou en refrain, le «one, two, three, viva l'Algérie» est devenu le cri de ralliement qui a raffermi le lien social affaibli par les difficultés et les problèmes quotidiens. Les artistes chantant leur sélection nationale et ses victoires avec des mots catalyseurs ont ranimé l'amour de la patrie. Leurs chansons sont dans toutes les bouches, tous les autoradios. Combien de fois n'avons-nous surpris un sourire de connivence, un geste amical entre deux conducteurs de voitures d'où jaillissaient ces musiques «nationalistes» reconnaissables entre toutes. Des jeunes interrogés ont eu cette réponse ô combien significative : «On n'aime pas le foot mais on aime l'Algérie.» N'est-ce pas la meilleure manière de dire le plus simplement du monde l'amour du pays ? Dans cette déferlante de joie, certains jeunes ont brillé par leur talent, à l'image du groupe Torino avec son tube l'Algérie bladi sakna fi qalbi, de Milano ou encore de cheb Toufik qui est revenu sur le devant de la scène avec un duo explosif avec Hassiba Amrouche. Certains ont préféré l'underground qui leur permet d'exprimer librement et sans aucune retenue leur rage après la lâche agression orchestrée par les responsables politiques et sportifs égyptiens contre les joueurs et les supporters algériens au Caire. Reda Sika est l'un de ces artistes qui investissent la Toile et le marché souterrain. Avec sa chanson au vitriol, accompagnée d'une vidéo, qu'il dédie à tous ses ami(e)s du site d'échange Facebook, il a tenu à rester sur la Toile. D'autres jeunes ont préféré chanter dans des styles «jeunes», tel le rap, et ont joint leur voix aux autres avec des albums relativement bien torchés. On citera l'exemple de Biba et Nina, deux jeunes rappeuses qui ont mis en boucle les Verts. Il y a aussi cheb Tarek qui, après une longue traversée du désert, revient avec le morceau Allez l'Algérie ou encore Sadek Djemaoui avec un remake de Djibouha ya l'ouled. Mais incontestablement le prix de la meilleure chanson revient à la chanteuse Sonia et son groupe pour son titre Viva l'Algérie avec un clip qui passe en boucle sur l'ENTV.Dans cette profusion, on a également droit à des chansons qui empruntent les rythmes égyptiens, et même le parler égyptien, pour mieux flamber Shehata, ses joueurs et leurs supporters. Harami est l'un de ces morceaux qui cartonnent. Chanté dans tous les styles, exprimé de diverses manières, le soutien aux Verts a pris une dimension supranationale. Il a dépassé les frontières et porté l'image d'un peuple uni et fier de sa nation. W. S.