Le verbe candide, mais empreint de sincérité, le milieu offensif du club hollandais Ado Den Haaq, Karim Soltani, Nous raconte ici le match Egypte – Algérie tel qu'il l'avait vécu. Il nous dit aussi toute sa disponibilité à honorer sa première sélection. Il ne force pas sur le verbiage pour faire du racolage ! Non, loin s'en faut, sans esbroufe ni fla-fla, il se livre au Buteur avec une sincérité à fleur de peau. Entretien. Ayant certainement suivi avec beaucoup d'intérêt la dernière journée des éliminatoires pour le Mondial 2010, comment avez-vous vécu la double confrontation face à l'Egypte ? Pour dire la vérité, j'étais très choqué par le traitement réservé à l'EN au Caire. C'était quand même scandaleux ce qui était arrivé à notre équipe là-bas. C'est la première fois que je voyais ça et en toute sincérité, j'avais la rage. C'est dire qu'il y avait comme un sentiment de revanche dans l'air après cet épisode. Il est difficile de se mettre à la place des joueurs à ce moment-là, mais vous l'auriez vécu comment de l'intérieur, vous ? C'était inattendu. Je ne pense pas que nos joueurs s'y étaient préparés. Je n'ai jamais vu ça. J'aurais certainement eu la rage. Dans ces moments-là, on ne peut qu'être doublement motivé. Je pense que c'était le cas des nôtres. Vous y attendiez-vous à ce que l'équipe nationale prenne deux buts lors de ce match-là ? En toute franchise non, même si j'avais émis une certaine réserve par rapport à tout ce qui s'était passé l'avant-veille. Pourtant, hormis le premier but encaissé très tôt et les six minutes de temps additionnel qui n'avaient pas lieu d'être, les joueurs s'étaient bien défendus. Il y avait de la place pour au moins un but. Dommage, c'est ce que je me suis dit sur le coup. Le deuxième but égyptien a sonné trente-cinq millions d'Algériens, vous l'avez digéré, vous ? C'était dur ! J'étais en train de regarder le match avec ma femme et je n'ai pas trouvé autre chose à faire que de balancer mon tee-shirt contre le mur. Ceci à défaut de le cogner ! (rire). J'étais frustré. On y était presque là, je m'étais dit. Le match d'appui qui s'est déroulé quatre jours plus tard au Soudan nous a finalement souri, vous avez vibré ? Grave ! J'étais dans un délire indescriptible. Avec des amis, on est sortis fêter ça jusqu'à une heure tardive de la nuit. Que du bonheur, sincèrement. Avec le mental de nos joueurs et la grosse motivation dont ils ont fait montre, je n'avais aucun doute quant à nos chances de passer. Ils ont sorti un gros match. Quand je revois encore ces moments-là…tout le monde qui criait de joie, le gardien qui fait son show sur les bois, (Chaouchi, ndlr), ça faisait chaud au cœur, quoi ! Que du bonheur. J'étais super content, sincèrement. Tout à l'heure, vous utilisiez le pronom nous pour parler de la sélection, est-ce à dire que vous vous assimilez déjà à cette équipe, à ce groupe, si vous voulez ? Non, pas spécialement. Si vous voulez, je parle en tant qu'Algérien. J'ai partagé les émotions de 36 millions d'Algériens à travers ces deux matches. Voilà… Connaissez-vous des joueurs de l'actuelle sélection ? Oui, Mansouri, que j'avais eu comme coéquipier au Havre. Il y avait aussi Brahimi, mais il n'est plus avec le groupe aujourd'hui. Avez-vous parlé de ça avec Mansouri ? Non ! En fait, cela fait un moment qu'on ne s'est pas captés lui et moi. D'après ce que vous avez vu, pensez-vous sincèrement avoir votre place dans ce groupe ? Bah, c'est le travail du sélectionneur. C'est lui qui connaît les postes à pourvoir. Je ne vais pas me mettre à me la raconter, du genre, je vais casser la baraque ! Non, je préfère laisser le soin au sélectionneur de choisir les hommes qu'il lui faut. Après, personnellement, je me sens tout à fait en mesure d'aider l'équipe. Dans ma tête, je suis prêt. Je pense avoir les qualités requises. Je joue plus ou moins à un niveau très appréciable. Après, il est naturel que je sois heureux d'être appelé en sélection de mon pays. En tant qu'Algérien, je ne peux qu'en être fier. Que pensez-vous pouvoir apporter de plus à ce groupe ? Je ne sais pas trop…peut être mes qualités de percussion et de centres. Je suis un attaquant de couloir polyvalent. Tactiquement, je peux apporter de la rigueur. Ne pensez-vous pas que le fait de jouer dans un championnat moins médiatisé (Hollande, ndlr) comparé à la France, l'Angleterre ou l'Allemagne, vous a pénalisé ? C'est possible. Déjà, pendant longtemps, on m'avait cru d'origine marocaine, du fait que la plupart des joueurs «arabes» évoluant en Hollande sont originaires du Maroc. Puis, c'est vrai que comparé à la France ou l'Angleterre, on parle très rarement du championnat hollandais. Pourtant, le niveau est très élevé ; croyez-moi. On joue aussi bien qu'en France ou en Italie. Vous sentez-vous une légitimité à revendiquer une sélection maintenant que la « guerre » est finie et que les qualifications pour la CAN et le Mondial soient arrachées ? Oui ! Cette légitimité dont vous me parlez, je la puise déjà dans mon algérianité. Je serai fier de jouer pour mon pays. Après, si on m'avait appelé plus tôt j'aurais dit OK ! La question pouvait se poser, si on m'avait appelé avant et que j'aie dit non ! Là, j'aurais endossé le rôle de celui qui vient se servir maintenant que le repas est prêt ! Or, je n'ai jamais tourné le dos à mon pays. Voilà la raison qui fait que je n'éprouverai que de la fierté si on me fait appel. Est-ce que vous avez eu des signes de la part du sélectionneur ou la fédération algérienne ? Non, je n'ai pas eu de signes. Aucun contact jusqu'ici. Mais je ne m'impatiente pas. Je reste en alerte. Cela se passe comment pour vous en club ? Très bien. Je joue régulièrement chaque week-end. Là, je suis sur une note complète. 13 matches sur 13. J'ai même inscrit deux buts lors des deux dernières rencontres. Donc, là tout va bien. J'espère que ça durera ! Un dernier mot ? Oui. Je voudrais présenter mes félicitations à tout le peuple algérien pour la qualification. Aux joueurs et aux dirigeants, je dis bravo ! J'espère que cette sélection grandira encore pour procurer d'autres joies au peuple. Je ne terminerai pas sans dire à tous les Algériens Saha Aidkoum ! Entretien réalisé par Achour Ait Ali