Plus le Ramadhan approche, plus les citoyens semblent mécontents. Non pas à cause du jeûne, mais plutôt de la situation socio-économique qui régresse au lieu de progresser. Il suffit d'un trois fois rien pour que le citoyen s'emporte, s'énerve, s'irrite. Alors, l'Algérien crie encore plus fort quand il se rend compte qu'il se fait rouler pour quelque chose de très anodin. À la boulangerie, pour peu que le pain soit encore dans le four, le client rouspète et veut savoir le pourquoi. Devant le marchand des fruits et légumes, l'Algérien abandonne son achat quand il remarque que le prix réclamé par le vendeur n'est pas juste par rapport au poids. Le prix est toujours arrondi à la hausse. Chez le boucher, l'Algérien refuse le morceau qu'on lui vend car il a demandé une coupe précise. Chez le poissonnier, même scénario. Cela ne veut pas dire que le client algérien est maniaque. Je dirais plutôt que les fournisseurs n'hésitent pas une seconde pour mettre à exécution les multiples trucs qu'ils cachent dans leurs manches. De véritables magiciens quand il faut jouer avec la balance ou la petite calculette avant d'annoncer le prix. Les prix des citrons rendent acides les acheteurs. L'ail leur rend la bouche pâteuse. Les oignons leur donnent une mauvaise haleine. Les fast foods leur retournent l'estomac. Le poisson donne la nausée. Et la chorba, des sueurs froides quand on s'amuse à calculer le prix de revient d'une entrée sans viande. Le client a des droits. Le vendeur a des obligations. Qui garantit quoi à qui ? Force est de reconnaître que face à une absence totale de la mercuriale du jour, les prix valsent et font tourner les têtes. De quoi créer l'affolement face l'anarchie organisée discrètement, secrètement par les revendeurs tant au niveau des prix que de la qualité des produits proposés. La datte, par exemple, supposée adoucir les palais au moment de la rupture du jeûne, boude les tables qui se dégarnissent de plus en plus, se limitant à l'essentiel, avec très rarement quelques petits extras. Les bouchers, ou plutôt les vendeurs de viandes, aiguisent leurs couteaux pour mieux soigner la recette du jour. Evidemment, la viande importée fait la une chez les ménagères compte tenu des manœuvres des bouchers qui veulent charcuter dans la chair du client. Faute d'obtenir des ristournes plus importantes, ils ont recours à un dénigrement ouvert, fraichement sorti des réfrigérateurs mais bien orchestré depuis longtemps déjà. Dès que l'information d'information de viande a été confirmée. Une autre grosse ficelle de Ramadhan. C'est à qui mieux-mieux face à un marché livré à lui-même qui laisse apparaître que les contrôleurs sont plus nombreux par les contrôlés. Une situation où l'impensable est réel. Où l'irréel pousse à la fatalité. Une situation que plus personne ne semble être en mesure de maîtriser et qui, dans tous les cas, abat à bout portant le consommateur qui retrouve son sourire après une journée de marathon parmi tant d'autres. En attendant la saignée à blanc de l'Aid et ensuite celle de la rentrée des classes.