Le bilan présenté par le ministre de l'Habitat, à l'occasion de son audition par le président de la République, en août dernier, fait ressortir un taux d'occupation (TOL) de 4,84 personnes par logement. Il y a deux ans, lors du 2ème Salon international du logement et de l'immobilier, le ministre de l'Habitat avait alors annoncé un TOL de 5 personnes par logement. Il y a juste 10 ans, les algériens vivaient alors dans une promiscuité malsaine, avec un TOL de 7. Ainsi donc, le pari semble gagné Les algériens ne vivent désormais plus les uns sur les autres. Du moins ceux qui ont accès au logement. Car, c'est là un fait notable, malgré une politique de l'habitat très ambitieuse, c'est le moins que l'on puisse dire, tous les algériens n'ont pas accès au logement. Les réalisations chiffrées du plan quinquennal 2004/2009 font état de la livraison de 217.795 logements, de la mise en chantier de 269.247 autres, alors que 557.000 sont en cours de construction. C'est là un bilan très positif qui met à la disposition des algériens, 1.045.000 logements dont 616.550 en milieu urbain et le reste soit 428.450 unités en milieu rural. Les prévisions pour le prochain plan 2010/2014 ne sont pas moins considérables, il est prévu de construire 2 millions de logements dont 1,2 million seront livrés durant le plan. Le programme prévoit la construction de 800.000 Logements Publics Locatifs, un demi-million de logements de types promotionnels avec l'aide de l'Etat et 700.000. L'enveloppe financière que compte injecter le gouvernement pour la concrétisation de cet important programme est estimée à 3. 700 milliards de dinars. Alors qu'il était d'à peine 5,2 millions d'unités en 2000. Le parc national de logements a connu une progression vertigineuse en dix ans avec une progression de 37%. Les réalisations du dernier plan quinquennal font qu'aujourd'hui son volume est de 7.090.000 unités permettant de loger quelques 34,5 millions de personnes. Du moins en théorie, en réalité finalement apparaît bien plus complexe. La crise de l'habitat persiste toujours. André Prenant, géographe qui connait très bien l'Algérie, relevait il y a quelques années que la crise est plus un fait sociétal que matériel : «Je pense que la crise du logement est plus un fait sociétal que matériel. Il y a incontestablement de meilleures conditions de logements, qu'il y a 40 ans, notamment du point de vue dimension moyenne des logements et de leur nombre», soulignait-il. Ce diagnostic semble aujourd'hui encore d'actualité. Le logement est difficilement accessible aux couches moyennes et à faibles revenus. La forte demande de logements opposés à la faiblesse de l'offre met ce segment dans une situation de crise complexe. Selon un sociologue «il y a une très inégale distribution du logement, qui fait qu'il y a toujours des familles qui vivent dans une seule pièce, et d'un autre côté des logements spacieux pour des familles plutôt réduites». Les moyens mis à la disposition de ces revenus afin d'accéder à un logement abordable, par les pouvoirs publics, tels que les fameux crédits à taux bonifié qui devaient, en principe, alléger un temps soit peu l'intensité de la crise semble donner son effet, du fait de la spéculation organisée. Le marché immobilier algérien dicte quotidiennement ses propres règles. «Certaines catégories sociales se voient accorder la possibilité d'acquérir des logements à des taux d'intérêt officiels fixés par l'Etat. C'est une mesure importante à encourager et à soutenir. Par contre, le système de tarification appliqué par les promoteurs devra être contrôlé et plafonné par les autorités». Soulignait-il, il y a quelques temps le président de l'AGEA. «Il existe une anarchie totale dans les prix pratiqués par certains promoteurs, pour ne pas dire une véritable spéculation qui s'abat sur un marché potentiel», a souligné M. Khelloufi, qui en appelle aux autorités à réguler les prix du mètre carré chez le privé algérien. Dans le cadre du dispositif de logements éligibles à la bonification d'intérêt, les autorités exigent des postulants d'opter pour des logements collectifs réalisés par un promoteur public ou privé, ou des logements collectifs qui doivent être construits au minimum en R+3, tandis que le prix maximum du mètre carré ne doit pas dépasser les 100.000 DA. Ce système devra être généralisé à tout le secteur de la promotion immobilière, souhaite le président de l'AGEA, afin de permettre au citoyen de payer au juste prix le bien acquis sans subir les effets de la spéculation. Interrogé sur les prix des Logements Socio participatifs (LSP), que certains promoteurs appliquent et qui dépassent les 2,5 millions de dinars, fixés par l'Etat, pour ce qui est des grandes villes et à 2 millions de DA pour les autres régions, le ministre de l'Habitat dira que son département a eu l'écho de cela et qu'il sanctionnera quiconque, prendra l'initiative d'augmenter les prix. «Je mets en garde ceux qui se hasarderont à appliquer des prix exorbitants», menace le ministre qui dira, au cours de la réunion, «nous sommes là, pour veiller aux intérêts des citoyens», et d'ajouter, «le climat entre l'administration et le citoyen doit être sain et empreint de confiance» Aussi, des orientations ont été données pour alléger les procédures et remettre au citoyen son permis de construire et le certificat de l'urbanisme dans les délais requis. Chez les candidats, les récentes mesures sur la bonification des taux d'intérêt restent insuffisantes étant donné le cout de la vie, «comment je pourrais seul acquérir un logement, si la facture alimentaire consomme la moitié de mon salaire», se plaint un cadre dans une grande entreprise dont le salaire dépasse les 70.000 DA par mois. «Avec mon épouse, nous avons un revenu d'un peu plus de 100.000 DA, nous devrons contracter un crédit de 6 millions de dinars pour l'achat d'un F4 de type promotionnel en duplex, estimé par le promoteur à 9,5 millions de dinars. Le plus dur c'est l'apport personnel préalable estimé à 2 millions de dinars, auquel s'ajoute la caution de garantie, l'assurance vie et les frais d'étude du dossier, une facture de 150.000 DA. «Selon mes calculs les mensualités vont se situer autour de 25.000 DA, sans compter les charges et les intérêts bancaires». Pour ce cadre la partie est jouable, «il va falloir restreindre les dépenses», dira t'il Pour amasser l'apport préalable de 2 millions de dinars, il nous confiera qu'il devra se séparer de sa voiture de moins de 2 ans et contracter un prêt sans intérêts auprès de son employeur et bien sûre, ajouter les économies de toute une vie, «heureusement que l'entreprise ou je travaille offre le transport», ajoutera t'il en riant. Mais pour d'autres catégories plus fragiles «c'est le désespoir», nous dira une préposée à la banque, postulante de surcroit à l'achat d'un logement, qui estime que le dispositif soutenu par l'Etat va profiter plutôt à «certaines catégories de revenus». Mon seul espoir dira t'elle «C'est le programme présidentiel de 2010-2014, il parait que le Logement Public Promotionnel sera proposé à 4 millions de dinars, c'est un prix raisonnable», nous dira t'elle. La problématique des logements vides «Quoique cela apparaisse que très rarement dans les statistiques, le nombre de logements vides est très important», nous dira un spécialiste de l'habitat. C'est nous, dira t'il «un phénomène qui a toujours existé. En fait les gens qui ont les moyens, investissent dans l'avenir, sachant pertinemment que l'Etat n'accordera pas indéfiniment des aides à l'acquisition du logement». Il est difficile aujourd'hui d'établir une estimation du nombre de logements vides dans une ville comme Oran. Ces logements sont ceux des émigrés qui veulent un pied à terre dans leur pays, des personnes en déplacement pour des nécessités de service et qui pensent un jour revenir habiter dans leur contrée d'origine Il y a bien sur, les spéculateurs qui seraient dit on, légions. Enfin, le blanchissement d'argent notamment dans le haut de gamme et sont donc peut intéressants pour le marché locatif. Un agent immobilier de la ville d'Oran est formel «ces logements qui restent vides durant de longues périodes, sont pour une part infime dans le marché locatif, se sont surtout les spéculateurs qui louent», d'après lui. Ils peuvent par le biais de la location alléger la pression, mais à la condition que l'Etat intervienne pour définir des barèmes».