K. Issam La croissance en Algérie passe indubitablement par l'industrie. Tel est le mot d'ordre du président de la République et de son ministre de l'industrie, Hamid Temmar, pour le prochain quinquennat. D'après Oxford business group (OBG), comptes tenus des ressources naturelles abondantes et le fort taux de chômage chez les jeunes, «la croissance industrielle en Algérie fait figure à la fois de possibilité économique et de nécessité». Selon Hamid Temmar, le secteur de l'industrie «se portait beaucoup mieux que ce qu'on pouvait entendre», sans toutefois «avoir encore atteint un niveau pour être compétitif». Il soulignera aussi le rôle de l'Etat qui consiste «précisément à aider (l'industrie) à atteindre ce niveau». Alors que l'industrie contribue actuellement à environ 25% du PIB, jusqu'à 75% du secteur, elle continue d'être entre les mains du service public. En outre, il a indiqué que 75% des biens de consommation étaient importés et que, par conséquent, «il y avait un marché pour les entreprises nationales pouvant produire ou remplacer les produits importés, à condition qu'elles subissent des améliorations afin d'être compétitives». Hamid Temmar reconnaît aussi que des domaines comme la mécanique avancée, la fabrication d'équipement et la production d'acier étaient presque exclusivement du ressort d'entreprises publiques et qu'en conséquence, l'Etat cherchait à «revitaliser et à mettre à jour» ces industries - une référence aux investissements réalisés actuellement par le gouvernement dans le cadre d'un programme de travaux d'infrastructure d'un montant de 107 milliards d'euros. Facture alimentaire La facture des importations a battu tous les records. En 2008, l'Algérie a enregistré une nette hausse de ses exportations (+ 30 %), soit 318,23 milliards de dollars en 2008. Les dernières directives, prises par le gouvernement portant sur des restrictions de cette facture, peuvent s'avérer cruciales pour la relance industrielle. En effet, le remplacement des importations pourrait bien se révéler la solution pour booster le produit «made in Algeria». Actuellement, les biens manufacturés ou semi-transformés représentent moins de 1,5% des exportations algériennes. En revanche, les hydrocarbures représentent 97,5% des exportations et contribuent à 30% du PIB. Compte tenu de l'expérience limitée des initiatives privées dans le secteur et du rôle de chef de file de l'Etat dans la provision des finances, le gouvernement vient en aide dans un premier temps et ce, à juste titre, au secteur privé pour les questions de remplacement des importations. «Les hydrocarbures sont toujours l'avenir» Toutefois, dans le secteur des hydrocarbures, l'Algérie continue d'occuper une forte position d'investissement grâce à son fonds de stabilisation et à sa relative solide position de dette extérieure. De plus, Sonatrach, la compagnie pétrolière publique algérienne, a annoncé qu'elle projetait d'investir 45 milliards d'euros dans de nouveaux projets d'exploitation des hydrocarbures au cours des cinq prochaines années. De nouveaux programmes d'investissement, d'une valeur de plusieurs milliards d'euros, ont également été annoncés au cours des dernières semaines seulement. La plupart de ces projets se concentrent sur l'exportation, le transport et le traitement. Ainsi, un projet de gazoduc de 1 milliard d'euros est en cours afin de renforcer la capacité du champ gazier de Hassi R'mel et atteindre une production de 9 milliards de mètres cubes par an, alimenter un nouveau terminal de gaz naturel liquéfié, ainsi que construire le gazoduc Galsi qui reliera l'Algérie à l'Italie. Ce contrat a été remporté par un consortium composé de Saipem et Petrojet. Un autre projet, d'une valeur de 1,1 milliard d'euros, a été accordé à JGC Corporation et à un consortium mené par ABB/Sarpi pour développer le champ de Gassi Touil, alors qu'un autre contrat de 770 millions d'euros pour la construction d'une nouvelle usine de traitement de gaz sur le champ de Hamra a été remporté par le groupe canadien SNC Lavalin. Certains analystes ont soutenu que les investissements étrangers s'étaient détériorés au cours des dernières années en Algérie, suite au retrait de la réforme de la législation sur les hydrocarbures en 2006 et l'augmentation des impôts sur les capitaux étrangers. Programmes d'investissement Toutefois, les investissements étrangers sous la forme de propriété conjointe demeurent un sujet politiquement sensible aussi bien en Algérie que dans la plupart des marchés émergents riches en ressources naturelles. Il serait plus juste de parler de tournant vers un transfert des connaissances pour qualifier la politique d'investissement en Algérie. En effet, compte tenu des prix de l'énergie relativement élevés ces dernières années et des signes de reprise enregistrés les dernières semaines, les entreprises publiques comme Sonatrach n'ont pas tant besoin d'investissements étrangers, mais plutôt d'expertise afin de consolider leurs ressources - d'où les récents contrats visant à développer les champs gaziers et les gazoducs. Cette tendance a été illustrée, par exemple, lors de la récente visite en Algérie du vice-ministre sud-coréen de l'Economie et de la Connaissance, Kim Young Hak, à l'occasion de la 6e session de la Task Force algéro-sud-coréenne réunie en mai. M. Temmar a annoncé qu'il était prêt à «aller vers un partenariat technologique avec la Corée du Sud notamment dans les secteurs de l'électronique, la mécanique et la pétrochimie». Un tel partenariat entraînera la création d'une «véritable industrie automobile», selon M. Temmar. Compte tenu des importants programmes d'investissement prévus dans le secteur des hydrocarbures et de la vaste réserve de clients dans le sud de l'Europe désireux de détourner leur approvisionnement en énergie d'une Russie de plus en plus chimérique, l'Algérie et sa politique industrielle à double volets semblent prêtes à approvisionner leurs partenaires de manière constante si une croissance ordinaire s'installe au cours des dix prochaines années. Toutefois, certains obstacles demeurent, et en premier lieu, celui relatif à la transition vers une économie post-hydrocarbures où le secteur privé aura à jouer un rôle beaucoup plus important.