La réforme portant création d'une Caisse des règlements pécuniaires des avocats (CARPA) poursuit son petit bonhomme de chemin. Selon des sources judiciaires au fait de ce dossier, l'avant-projet est actuellement sous la loupe des hauts conseillers du ministère de la Justice, garde des Sceaux. Ainsi, ce dispositif visant la sécurisation de l'ar-gent et, en général, tout effet de commerce, inhérents aux transactions avocats-justiciables, au profit duquel le barreau des avocats d'Oran avait lancé, depuis trois ans, une campagne de promotion et d'influence, prend forme. Le bâtonnier d'Oran, Maître Ouahrani El-Houari, considéré comme le promoteur pionnier de ce nouvel instrument, ne se voile pas la face pour le dire: «Nous voulons mettre en place ce système de CARPA pour protéger le client contre l'abus et l'arnaque de certains avocats véreux. Nous voulons par la-même mettre la robe noire à l'abri de toute tentation. Cet instrument va aussi nous permettre d'éviter toute confusion des sommes de l'avocat et de l'argent du client, en ce sens que les divers opérations et dépôts seront centralisés dans la CARPA». Un autre avantage de taille de cet instrument: le Barreau pourra renflouer ses propres caisses et alimenter son budget de fonctionnement par les agios résultant des dépôts de la CARPA, explique-t-on. Il est vrai que le nombre des clients qui ont été escroqués par leur avocat ne cesse d'augmenter au point où il est aujourd'hui, pour le moins aberrant, de confiner le phénomène dans «des cas isolés». En effet, les conseils de discipline des Ordres dépendants des différents Barreaux que compte l'Algérie traitent, quasiment annuellement, un cas d'un avocat membre du Tableau accusé par son client d'avoir mis main basse sur son propre argent ou autres valeurs de commerce (chèque, lettre de change, bon de commerce…) liés à une telle ou telle transaction dans le cadre de l'affaire judiciaire confiée à ce juriste, sans compter les dizaines de plaintes de justiciables qui parviennent chaque année au département ministériel de Tayeb Belaïz ainsi que les nombreuses «victimes silencieuses». Poursuivant sa campagne de sensibilisation sur les bienfaits de la CARPA, le Barreau d'Oran compte organiser, décembre prochain, un séminaire international sur cette thématique. Dans cette respective, l'organisateur est dores et déjà assuré de la participation des membres de Barreaux de France (Aix-en-Provence, Marseille et Seine-Saint-Denis), d'Espagne (Barcelone), d'Italie (Rome), du Maroc (Rabat et Tanger), Tunisie (Tunis et Sousse), ainsi que d'autres organisations professionnelles d'Afrique et du monde arabe. Pour cela, d'après nos sources toujours, le Barreau d'Oran a eu toutes les faveurs du département de Tayeb Belaïz, y compris celles sonnantes et trébuchantes ! Mais qu'est-ce qu'une CARPA? Les fonds, valeurs ou effets perçus par les avocats pour le compte de leurs clients sont déposés sur un compte ouvert au nom de cette Caisse dans les écritures d'une banque ou d'une caisse de dépôts et consignations où sont centralisés les dépôts et les opérations. Chaque Barreau est libre de placer cette Caisse dans la banque où il est domicilié. De la sorte, toutes les écritures liées à l'activité de chaque avocat sont retracées dans un sous-compte individuel au nom de l'avocat. Les mouvements comptables sont gérés affaire par affaire à l'intérieur de chaque sous-compte cabinet. Les avocats ne peuvent procéder à des règlements pécuniaires à leurs clients que par l'intermédiaire de la CARPA, la CARPA étant un acteur obligatoire des règlements pécuniaires. L'avocat titulaire d'un compte à la CARPA de son barreau, compte alimenté par les fonds, effets ou valeurs reçus par l'avocat à l'occasion de l'exercice de sa profession, doit être en mesure de présenter à tout moment les fonds au versement desquels ses clients peuvent prétendre. L'avocat ne peut prélever sur ce compte que les honoraires qui lui sont dus et avec l'accord de ses clients, et en outre, uniquement par un transfert sur son compte professionnel, soit par chèque, soit par virement. Par ailleurs, il ne peut y avoir de transfert de fonds entre le sous-compte individuel ouvert dans une caisse et les sous-comptes ouverts dans d'autres caisses au nom de l'avocat lorsque celui-ci dispose de plusieurs cabinets, non plus que des transferts d'un sous-compte affaire à un autre. Les règlements des sommes revenant aux clients ne sont pas réalisés par des chèques établis par l'avocat lui-même, mais, à sa demande, par la CARPA. La CARPA a ainsi la possibilité de vérifier, opération par opération, que la provision est constituée, ce qui permet d'éviter tout incident de paiement et offre aux justiciables la garantie que les fonds leur revenant leur seront effectivement versés. Aucun retrait d'espèces ne peut être effectué sauf autorisation expresse du président de la CARPA. Bref, il s'agit d'un moyen de sécurité pour la relation avocat-client dans son volet pécuniaire et une gestion professionnelle des transactions s'y afférentes.