Une mission dans laquelle doivent être impliqués tous les intervenants du secteur de la justice. Les transformations qualitatives que requiert la justice sont à la fois «néces-saires et primordiales(...) elles représentent le plus important vecteur de la bonne gouvernance, cette exigence constante vers laquelle tendent tous nos efforts» affirme le premier magistrat du pays, dans son allocution d'ouverture de l'année judiciaire 2004-2005. Devant un impressionnant parterre de magistrats, de membres de l'Exécutif et autres cadres de la nation, Abdelaziz Bouteflika est revenu sur le rôle des magistrats dans la promotion de l'Etat de droit. «Une justice bien organisée, correctement rendue par des magistrats intègres et compétents», dira le chef de l'Etat. En somme, «la justice dans l'esprit des réformes doit disposer de bons magistrats, de bons textes et d'une bonne organisation de l'activité judiciaire» ajoute l'orateur qui a mis l'accent sur la spécialisation des magistrats dans les différents domaines, l'échange d'expérience avec les juridictions étrangères afin de permettre aux magistrats d'«intégrer les ordres juridiques internationaux qui s'imposent à nous, dans le cadre d'un monde de plus en plus globalisé». Le président de la République, n'a pas manqué de relever la lenteur qui caractérise le fonctionnement de la justice; un état de fait imputé au déficit en magistrats. Auparavant, le premier président de la Cour suprême avait reconnu que le nombre de pourvois en cassation enregistré au cours de l'année dernière était de l'ordre de 71.943. Une situation engendrée par un déficit en magistrats spécialisés, ce qui occasionne des retards dans le traitement des affaires. Pour pallier cette lacune, le chef de l'Etat annoncera que, dès l'année 2009, nous parviendrons à accroître de moitié le nombre de magistrats actuellement en fonction, ce qui permettra un meilleur déploiement de l'appareil judiciaire sur le territoire national. Par ailleurs, la valorisation du statut du magistrat est l'une des priorités des réformes. L'adoption du statut de la magistrature «afin de prémunir le magistrat contre toute forme de pression et d'assurer le déroulement normal de sa carrière» et la promulgation de la loi portant composition, fonctionnement et attribution du Conseil supérieur de la magistrature constituent le socle de la réforme engagée. Une réforme dans laquelle doivent être impliqués tous les intervenants du secteur de la justice. «La conscience professionnelle, l'intégrité, la loyauté et l'éthique constituent, en vertu du statut de la magistrature, des principes fondamentaux pour l'exercice de la profession de magistrat» Ce dernier, souligne le président de la République, n'est pas à l'abri de poursuites judiciaires si jamais il agit à contre-courant des règles éthiques que recommande la profession. Pour le chef de l'Etat, qui fait du magistrat le centre de sa démarche réformatrice, l'amélioration des conditions socioprofessionnelles de ce personnel s'impose pour mettre les professionnels à l'abri des tentations. L'inauguration, hier de l'Hôtel des magistrats, un imposant édifice érigé en face de la Cour suprême, vise en premier lieu à stabiliser les magistrats et leur permettre de préparer leurs dossiers dans la pleine quiétude. Dans le cadre de la lutte contre le crime organisé, le blanchiment d'argent et le trafic de stupéfiants, le chef de l'Etat préconise la création de «pôles judiciaires spécialisés dotés de vastes compétences territoriales, encadrés et dirigés par des magistrats». Cependant les réformes annoncées n'auront d'impact que si les lois sont appliquées. «Car si l'on ne réfléchit pas correctement à l'application des textes, la réforme sera vide de sens», poursuit le chef de L'Etat. Il ne fait aucun doute que la réforme de la justice est l'affaire de tous. «Le barreau, le notariat et les autres auxiliaires de justice ne doivent pas être seulement des fonctions lucratives, mais doivent participer activement à la réforme de la justice», fera remarquer Abdelaziz Bouteflika. Dans le cadre de la lutte contre la corruption, le président Bouteflika a instruit le gouvernement de mettre en place un groupe de travail interministériel pour faire face «à la corruption, au trafic d'influence et à l''atteinte aux deniers publics». Il convient de noter que le ministre de la Justice et garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, rappellera que depuis la mise en oeuvre du projet de réforme de la justice, 17 lois ont été révisées. Il citera, entre autres, le code de la famille, le code du commerce, les codes pénal et civil, le code de procédure pénale, la loi contre le blanchiment d'argent. Le ministre annoncera, enfin, qu'un projet de loi sur l'organisation judiciaire va bientôt être soumis au Parlement. Pour ce qui est du secteur pénitentiaire, le ministre de la Justice fera état de la construction, à partir de l'année prochaine, de 42 nouveaux établissements pour résorber le problème de surpopulation carcérale. Un projet d'une capacité d'accueil estimée à 36.000 places. Or M. Belaïz a omis de signaler que la détention préventive prolongée est en grande partie responsable de cette surpopulation. Une mesure qui, pourtant, doit être l'exception mais pas la règle. Le ministre informera, enfin, de la tenue, au dernier trimestre de l'année en cours, d'une conférence nationale sur la réforme de la justice, à laquelle prendront part tous les secteurs concernés.