Le président français François Hollande a affirmé mercredi que la «République reconnaît avec lucidité» les massacres d'Algériens le 17 octobre 1961, rendant hommage à la mémoire des victimes de la sanglante répression policière. «Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l'indépendance ont été tués lors d'une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits», a déclaré le président français dans un communiqué diffusé par l'Elysée. Le président français, qui est attendu en décembre prochain pour une visite officielle en Algérie, a, par ailleurs, rendu hommage aux victimes de cette répression. «Cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes», a-t-il dit. C'est donc un communiqué de l'Elysée qui était attendu depuis des décennies des deux côtés de la Méditerranée qui vient d'ouvrir une nouvelle page dans les relations entre els deux pays. A cinq mois de la fin de la guerre d'Algérie, le 17 octobre 1961, des dizaines de milliers d'Algériens manifestent pacifiquement à l'encontre du couvre-feu qui les vise. Organisée par le Front de libération nationale (FLN), cette manifestation vise aussi à dénoncer la répression du préfet de police de la Seine, Maurice Papon. La police ouvre le feu. Des centaines d'Algériens sont exécutés froidement. Des corps sont retrouvés dans la Seine. Un massacre à Paris. Lundi, le Parti socialiste français avait réclamé «une reconnaissance officielle» de la répression de cette manifestation. Un an plus tôt jour pour jour, le 17 octobre 2011, François Hollande, qui venait de remporter la primaire PS pour être candidat à l'Elysée, s'était rendu à Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine), commune de proche banlieue parisienne, pour témoigner «de sa solidarité» avec les familles endeuillées par ces événements. Il avait relevé que «trop longtemps cet événement (avait) été occulté des récits historiques» et qu'il était «important de rappeler ces faits». Le Sénat français va étudier mardi, en séance publique, une proposition de résolution du groupe communiste «tendant à la reconnaissance de la répression de la manifestation du 17 octobre 1961». Cette proposition avait été déposée par Nicole Borvo Cohen-Seat, ancienne sénatrice de Paris, et plusieurs de ses collègues communistes. A l'Assemblée nationale française, François Asensi (Front de gauche), a annoncé hier, lors d'un débat sur les questions européennes, que son groupe déposait une proposition analogue à celles des sénateurs communistes. «Son adoption serait un geste de concorde à l'adresse du peuple algérien, ce peuple ami», a-t-il souligné dans un communiqué. La mémoire ou plutôt la guerre de la mémoire entrave la normalisation des relations entre Paris et Alger. Notamment suite à l'adoption à l'Assemblée nationale de la loi du 23 février 2005 dont l'article 4 reconnaît les «bienfaits de la colonisation». Un article finalement abrogé par le président Chirac en janvier 2006. Un mois plus tard est proposée à l'Assemblée nationale la date du 19 mars 1962, en souvenir du cessez-le-feu suivant les accords d'Evian. Proposition rejetée par les députés, au motif que les affrontements se sont poursuivis (fusillade de la rue d'Isly le 26 mars 1962, enlèvements et assassinats d'Européens à Oran le 5 juillet…). L'inauguration, en novembre 2007, du «mur des victimes du FLN», à Perpignan (Pyrénées-Orientales), a finalement lieu. Elle se déroule en présence du secrétaire d'Etat à la Défense chargé des Anciens Combattants, Alain Marleix, qui a souhaité «une politique de mémoire assumée». En toile de fonds, la signature de gros contrats portant sur le gaz et le pétrole avec l'Algérie. Mais la question de la mémoire a longtemps empoisonné et donné le ton des relations entre la France et l'Algérie.