A grand trait, de nouvelles révélations sont livrées par l'affaire des transactions «louches» de la Société d'exploitation et de gestion et des terminaux marins à hydrocarbures (STH), filiale de la compagnie nationale des hydrocarbures Sonatrach. Parallèlement, l'affaire des huit cadres mis en cause a enclenché, par ricochet, un chaud débat dans la sphère professionnelle avec comme sujet à controverse: le mode de passation des marchés appliqué par le groupe Sonatrach et les entités qui gravitent autour. Commençons par le premier point, les révélations de l'enquête. Notre source révèle que les transactions dont il est question dans cette affaire concernent deux grosses commandes passées par la STH - port d'Arzew (il faut savoir que STH, créée en 2003 et opérationnelle en 2004, est une filiale dont la Sonatrach détient 60% des parts du capital social contre 20% pour l'Entreprise portuaire (EP) d'Arzew, 15% pour l'EP Skikda et 5% pour l'EP Bejaïa), auprès d'opérateurs étrangers. L'une concerne la fourniture de flexibles qu'on utilise pour le chargement du pétrole et du gaz dans les navires, aussi bien à partir du port qu'en haute mer. Cette acquisition avait un triple objectif, selon l'engineering interne : gagner du temps dans l'opération de chargement, économiser les dépenses inhérentes à la surestarie (grâce à ce système, les navires peuvent être servies en haute mer et ne sont pas obligées d'attendre l'évacuation des quais, donc il n'y a aucune raison à ce qu'ils restent en rade des jours durant) et enfin fluidifier le trafic portuaire et la chaine de déchargement. L'autre marché concernait l'achat d'équipement de sécurité industrielle et technologique pour la mise en conformité du port d'Arzew, pour répondre aux exigences internationales en la matière. Une autre révélation concerne, le «pot-au-rose» pour ainsi dire au cœur de ces transactions controversées. Il s'agit, à en croire nos sources, de «la surfacturation, ou le dopage, des prix unitaires du matériel acquis», ce qui aurait généré un «dividende» appréciable ou un lourd «fardeau» sur la trésorerie publique. C'est selon la position d'observation ! Venons-en à présent au deuxième point, la problématique amorcée par l'affaire. Dans la gestion de Sonatrach, faut-il appliquer la circulaire du ministère de l'Energie, connue dans le jargon du secteur des hydrocarbures sous l'abréviation «la R 15», ou le code des marchés publics? Telle est la question centrale posée par un cadre de la STH. Et notre interlocuteur de rappeler que «le ministère de tutelle, dans un esprit d'efficacité économique des entreprises d'exploitation, a mis en place, à travers Sonatrach, des outils de gestion régis par la directive A408 R15 du 12 octobre 2004, qui définit le recours au gré à gré sous certaines conditions». «Cette directive, poursuit-il, prend en charge l'urgence de gestion des installations à hydrocarbures et donne, sous certaines conditions bien définies, des pouvoirs de passer outre les dispositions du code du marché public aux premiers responsables des structures, ce qui amène ces derniers à user de ce pouvoir dans l'exercice de leurs responsabilités». Et d'ajouter: «Cette disposition pourrait être, au regard de la loi, en porte-à-faux avec la législation qui régit les marchés publics 03-301 qui reste, à juste titre, la seule base d'appréciation de notre justice, tant que l'ambigüité sur le secteur économique étatique persiste.» «Privilégier quoi? Efficacité opérationnelle et rentabilité économique ou respect formel des règles administratives et conformité stricte et aveugle à la loi? ». Telle est la «vraie » question, dans l'esprit du cadre gestionnaire de la Sonatrach. Pour rappel, cinq cadres de la STH, dont le président-directeur général de la STH et le directeur régional Ouest, avaient été incarcérés, le 25 novembre dernier, sur ordonnance du juge d'instruction près le tribunal d'Arzew, relevant de la cour d'Oran, pour les griefs de passation de marché non-conforme aux dispositions du code des marchés publics, la dilapidation de deniers publics et le trafic d'influence. Le DG adjoint, le directeur technique et le chargé des affaires juridiques ont été également écroués, alors que trois autres responsables, le directeur des finances, le DRH et le chargé de la sécurité interne, avaient bénéficié de la liberté provisoire. Par ailleurs, l'on apprend de source sûre que l'activité de la société STH se déroule normalement et n'a pas été perturbée par cet épisode judiciaire, et que son conseil d'administration a procédé à la désignation d'un P-DG pour cette phase transitoire, le DG de STH-port de Bejaïa en l'occurrence.