L'assurance takaful devrait contribuer de façon décisive au développement du secteur des assurances marocain, en droite ligne avec la volonté du gouvernement de diversifier le marché et d'augmenter le nombre de primes. Le lancement de takaful, initialement prévu cette année, reste cependant tributaire de l'adoption d'une nouvelle loi relative aux services financiers islamiques. Avec un taux de pénétration des assurances comparativement élevé (2.8 %), une croissance économique stable et une population musulmane importante, le Maroc constitue un marché attractif pour les prestataires de services d'assurance conformes à la charia. À l'heure actuelle, les produits takaful sont relativement peu développés en Afrique du Nord, malgré un potentiel de croissance considérable ; en effet, le segment a plus que doublé à l'échelle mondiale, passant de 3.1 milliards de dollars en 2006 à 8.3 milliards de dollars en 2010, d'après le Rapport Takaful mondial 2012 de Ernst & Young. Lors d'une conférence du secteur, organisée en juin 2013 au Maroc par l'Union générale arabe d'assurances et la Société centrale de réassurance du Maroc, les possibilités offertes par takaful pour stimuler le marché boursier, où certains des principaux investisseurs institutionnels sont des compagnies d'assurance, mais aussi favoriser l'épargne nationale ont été mises en avant. Cet objectif semble tout à fait justifié compte tenu du repli du taux d'épargne nationale brute, passé de 29 % à 24.3 % au cours de la période 2010-2011. Aujourd'hui pourtant, le Maroc ne dispose d'aucun cadre global pour réguler les activités takaful, et seules des formes limitées de services financiers conformes à la charia sont autorisées. L'adoption d'un code réglementaire régissant les services financiers islamiques, prioritaire pour le gouvernement actuel, devrait être opérée cette année. Initialement, le projet de règlement devait être approuvé avant fin 2012, mais les discussions ont été prolongées Aucun produit takaful n'a encore été homologué au Maroc, même si certains services bancaires islamiques ont été introduits à titre expérimental. Les établissements de crédit sont autorisés à proposer une gamme spécifique de produits financiers islamiques, outre les produits conventionnels, mais ceux-ci connaissent un succès limité. Les acteurs du marché s'accordent de plus en plus à dire que des canaux de distribution distincts, associés à des réglementations, des structures contractuelles et des frais spécifiques, doivent impérativement être mis en place pour favoriser le développement des services financiers islamiques. D'après les premiers communiqués de presse des responsables de l'organisme de régulation des assurances, la Direction des assurances et de la prévoyance sociale, la nouvelle législation encouragera les assureurs d'ores et déjà en activité à créer des filiales takaful respectant les politiques administratives et les politiques de gestion des fonds applicables. L'an dernier, le gouvernement a également déclaré qu'un plafond de participation étrangère de 49 % serait imposé aux nouvelles institutions financières islamiques. L'adoption prochaine du projet de loi a suscité l'intérêt des investisseurs étrangers, et en particulier des institutions du Golfe, telles que la Qatar International Islamic Bank, qui ont d'ores et déjà exprimé publiquement leur souhait de s'implanter dans le royaume. Cet intérêt des investisseurs pour les promesses de développement des services financiers islamiques marocains, et takaful en particulier, s'explique en partie par les solides performances des produits d'assurance conventionnels ces quelques dernières années. Le montant total des primes, y compris de réassurance, a progressé de 8.9 %, pour s'établir à 26 milliards de dirhams (2.3 milliards d'euros) en 2012, un taux similaire à celui de la croissance enregistrée en 2011 (9.2 %), d'après les données de la Fédération marocaine des sociétés d'assurance et de réassurance. Le segment des assurances vie a affiché des résultats particulièrement satisfaisants, comme en témoigne la hausse de 14.5 % des primes, qui génèrent 8.78 milliards de dirhams (763 millions d'euros). Les assurances vie et épargne offrent un potentiel considérable aux prestataires, étant donné qu'une vaste frange de la population marocaine, y compris les travailleurs indépendants et les groupes à faible revenu, n'a pas de couverture adéquate, voire aucune couverture. Dans la majorité des cas, les primes d'assurance vie sont associées à des contrats d'assurance individuels. Elles ont généré 5.6 milliards de dirhams (486 millions d'euros) en 2012, contre 2 milliards de dirhams (173.7 millions d'euros) pour les contrats d'assurance collectifs. La bancassurance, à l'instar d'autres circuits de distribution, devrait contribuer à propulser le marché. Si le segment des assurances vie se développe rapidement, celui de l'assurance non-vie représente toujours la majorité du marché, et totalisait environ deux tiers des primes l'an dernier. Le plus vaste segment, celui de l'assurance automobile, génère 8 milliards de dirhams (695 millions d'euros) de primes, soit environ la moitié du marché de l'assurance non-vie. Si ce segment est de taille comparable à celle du segment de l'assurance vie, il progresse néanmoins plus lentement (6.4 % en 2011 et 6.5 % en 2012). Certains segments de marché plus limités, telles que l'assurance contre l'incendie et l'assurance crédit, ont cependant affiché de solides performances en 2012, avec une croissance de 15 % et 10 %, respectivement, même si chacun représente moins de 5 % des primes. Le secteur marocain des assurances reste particulièrement fort à l'échelle régionale, puisqu'il se positionne au second rang sur le continent, après l'Afrique du Sud. Le lancement très attendu des produits takaful devrait ainsi ouvrir une nouvelle phase de diversification, et élargir le marché en incluant des clients aujourd'hui non couverts par le système conventionnel.