Détention et commercialisation de drogue par une organisation criminelle, importation et tentative d'exportation de stupéfiants. Tels sont les chefs d'inculpation sous lesquels ont comparu hier quatre personnes devant le tribunal criminel d'Oran. Il s'agit en fait de quatre membres d'un réseau international de trafic de drogue basé à Orléans (115 kms au Sud de Paris), qui « importaient » du kif du Maroc -via le port de Ghazaouet- à bord de véhicules banalisés. Ils étaient hier devant le tribunal criminel d'Oran. Parmi eux, trois Algériens émigrés en France, résidents à Orléans. Le quatrième est un Maghnaoui, B.A, passeur de profession. Deux autres narcotrafiquants, Orléanais eux aussi, dont le cerveau du réseau B.M., sont cités comme accusés en cavale et demeurent activement recherchés. Le démantèlement de cette organisation criminelle a été le fruit d'un fait plutôt fortuit. Le 28 juin 2008, au port de Ghazaouet, une voiture de marque Peugeot 406 immatriculée à Oum El-Bouagui était en bonne voie d'embarquement à bord d'un car-ferry en partance pour Marseille. Ne fut-ce l'attitude douteuse du propriétaire, dont le visage laissait transparaître des signes de peur, la P-406 allait passer sans encombre au travers du portillon douanier. Par son comportement très agité, N.M a fini par se trahir. Le véhicule fut passé au peigne fin par la brigade mixte douane-PAF. Une quantité de 118 kilos de kif, soigneusement cachée dans les parois de la bagnole, fut découverte. Le voyageur B.M fut arrêté sur place, entrainant par ses aveux l'effondrement presque total de la bande. D'après les faits consignés dans le dossier d'accusation, ce plan d'acheminement d'un quintal et 18 kilos de kif vers Marseille fut échafaudé en 2007, et si la mise à exécution tarda jusqu'à 2008, c'est parce que l'organisation était en train de peaufiner jusqu'au moindre détail ce plan et procéder aux derniers réglages. A ce titre, le représentant du droit public, à travers son réquisitoire introduit par un préambule sur le crime organisé de points de vue législation et structuration, a remarqué que de telles organisations criminelles ne passent à l'action qu'après une longue et profonde étude du plan et que chaque membre est investi d'une mission précise. Le représentant du ministère public fera par la suite la projection de cette règle sur le groupe jugé, en expliquant le rôle de chacun dans l'opération des 118 kilos, et par extrapolation, toutes les éventuelles opérations à l'actif de ce réseau. De l'enquête de moralité menée par la présidente d'audience, il s'est avéré que N.M., un émigré en France, est un licencié en bibliothéconomie. Or, la P-406 qu'il tentait d'acheminer à bon port ne contenait pas en tout cas des bouquins, mais près de deux cents plaquettes de résine de cannabis. Lui, il affirmait toujours n'avoir su que sa voiture était bourrée de kif qu'une fois au port de Ghazaouet, après la fouille. Selon lui, il devait conduire ce véhicule usager en France pour lui greffer un moteur neuf pour le compte de B.M (le trafiquant en fuite) contre commission, comme il avait l'habitude de le faire auparavant. A l'issue des délibérations, les quatre accusés présents à l'audience ont été condamnés à 20 ans de réclusion criminelle, assortie de la privation des droits civils et civiques ainsi que la confiscation des objets saisis. Les deux barons en fuite ont été condamnés à la prison à vie par contumace.