A l'occasion du Salon International du Tourisme (SIAHA 2014) qui s'ouvre aujourd'hui au Centre de Conventions d'Oran, jusqu'au 5 avril 2014, le Financier s'est rapproché de Monsieur Karim CHERIF, Président de la Fédération Nationale des Hôteliers (FNH) mais aussi l'un des acteurs les plus connus du monde de l'hôtellerie dans notre pays, à la tête de la chaîne EDEN. Le Financier : Le SIAHA est devenu un événement incontournable pour tous les professionnels du tourisme dans notre région avec, chaque année, de plus en plus d'affluence et d'audience. Pour autant, il ne nous semble pas que le tourisme progresse dans notre pays ; pourquoi selon vous ? Karim CHERIF : Je vous remercie pour une question qui, aussi simple qu'elle puisse paraître, est particulièrement pertinente. Vous me demandez en fait de répondre à une problématique qui engage toutes les politiques, les programmes et les visions qui ont impacté le secteur du tourisme depuis l'Indépendance de notre pays. Je ne voudrais pas revenir encore une fois sur l'immense potentiel et les richesses variées que recèle l'Algérie. Je pense, quant à moi, que fondamentalement, toutes ces ressources naturelles que la providence a semé dans notre pays, n'ont effectivement de valeur que si elles sont transformées en gisements productifs générant de véritables flux touristiques qui, eux-mêmes, induiront de la valeur ajoutée économique, de la richesse, du savoir-faire et surtout de l'emploi. Je tiens juste à informer nos lecteurs que les activités, liées au monde du tourisme et à sa périphérie, génèrent plus de 1.000 milliards de dollars de revenus annuels et participent aux alentours de 7% du Produit Intérieur Brut mondial. Ces indicateurs économiques sont à mettre en perspective avec le flux humain de touristes qui dépassent allègrement, ces dernières années, le milliard de voyageurs internationaux. L'Afrique, quant à elle, n'est pas en reste puisque notre continent a dépassé, à la fin de l'année dernière, la barre des 50 millions de touristes internationaux avec, il faut le noter, un rythme de progression plus rapide que toutes les autres régions du monde avec plus de 85 millions de voyageurs internationaux en 2020 et 135 millions à l'horizon 2030, selon les chiffres de l'Organisation Mondiale du Tourisme. Notre pays doit impérativement s'inscrire dans ce cycle de croissance et capter, lui aussi, et sûrement plus que d'autres – ce que j'appellerai vous m'excuserez l'expression «sa part du gâteau» - au regard, et là j'en parle, des potentialités et des richesses que nous envient des destinations bien moins loties que nous mais, autrement, plus armées elles pour préserver et augmenter leur part du marché. En effet, le tourisme est surtout une culture, un état d'esprit, des modes de fonctionnement qui doivent s'enraciner dans le vécu quotidien, avec des ramifications dans tous les pans de la société. C'est en effet, là, tout l'enjeu et toute la dimension en termes de valeur ajoutée que peut drainer le tourisme pour notre économie. En effet, le tourisme a obéit, dès l'Indépendance, à une volonté politique de e ne pas forcément accorder toute la priorité à notre seul secteur ce qui a, bien entendu, entraîné des retards et des dysfonctionnements qui ont pénalisé l'attractivité de notre pays en ralentissant la formation, l'investissement et le développement de toute la chaîne touristique. Heureusement, depuis une dizaine d'années, les choses ont radicalement changé, les pouvoirs publics intégrant dorénavant le redéploiement et la promotion de notre secteur comme une véritable priorité de développement économique nationale pouvant devenir, à terme, une alternative à notre dépendance aux hydrocarbures. Cette nouvelle approche bienveillante se bâtit sur une nouvelle vision qui intègre des axes stratégiques et des schémas de développement beaucoup plus cohérents et attractifs pour le secteur. Ces schémas de développement ont posé un certain nombre d'objectifs prioritaires en coordonnant et en orientant les programmes de développement du tourisme tout en dégageant des objectifs liés à l'augmentation des capacités et des infrastructures d'hébergement. Je pense que les effets de toutes ces politiques conjuguées à la mise en place de mesures d'accompagnement et d'incitation à l'investissement, à l'amélioration de l'environnement des affaires et à la restauration indéniable du climat et de la sécurité dans notre pays, peuvent augurer des perspectives et un avenir prometteur pour notre secteur. C'est là, et maintenant, que de nouvelles politiques résolument novatrices doivent intervenir pour créer une nouvelle dynamique et un renouveau dans la perception et dans le choix d'axes stratégiques de développement en favorisant l'émergence de la compétence et de la modernité. Pour revenir à un événement aussi important que le SIAHA, il est tout à fait clair que l'organisation d'un tel espace participe, bien évidemment, à l'amélioration de l'image de l'Algérie et à la promotion de notre destination. Je tiens à féliciter, en mon nom et au nom de tous les membres de la fédération, les organisateurs et l'ensemble des exposants qui ont marqué de leur présence cette importante rencontre. Le Financier : Je vous remercie M. Karim CHERIF de cet aperçu sur l'importance du secteur du tourisme. Qu'en est-il réellement pour notre pays et qu'apporte votre secteur à l'économie nationale. Karim CHERIF : Encore une bien vaste question, mais je m'efforcerai d'y répondre en vous donnant d'abord, quelques chiffres révélateurs. Il faut savoir que nos capacités hôtelières installées à l'heure d'aujourd'hui, avoisinent les 100.000 lits pour plus de 1.400 établissements hôteliers auxquels il faudra ajouter plus de 750 projets hôteliers qui représenteront aux alentours de 80.000 lits à l'horizon 2015. L'ensemble de ces projets en réalisation, représentent une valeur approximative de 220 milliards de dinars et vont concourir à la création de plus de 45.000 emplois. Evidemment, certains diront qu'une destination ne se mesure pas seulement en nombre de lits, mais aussi en la capacité pour ces infrastructures de répondre aux attentes des standards de qualité internationale, ce qui est indéniable. Toutefois, ces réalisations ont le mérite d'exister en participant à l'offre touristique et en créant de l'emploi. Il faut noter aussi que le nombre des étrangers est, lui aussi, en constante augmentation et a atteint 2,7 millions en 2013. Je voudrais, toutefois, garder en perspective une donnée que l'on a tendance à trop vite oublier. Au lendemain de l'Indépendance, seul 5.000 lits existaient en Algérie. Je ne suis pas là pour verser dans l'autosatisfaction. Il reste, en effet, beaucoup à faire mais des avancées et des améliorations substantielles sont en train de voir le jour.