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Les incitations microéconomiques au développement de la production et des exportations hors hydrocarbures sont faibles : L'économie algérienne minée par la rente pétrolière
«L'économie algérienne est spécialisée dans la production (entre 30 % et 50 % du PIB depuis 1990) et l'exportation (entre 75 % et 95 % des exportations) de pétrole. Une de ses caractéristiques est la petite taille de son secteur industriel hors hydrocarbures (moins de 10 % du PIB), dominé à 80 % par le secteur privé. Celui-ci est également très faiblement tourné vers l'exportation (moins de 5 % des exportations)» souligne Hélène Djoufelkit, économiste à l'Agence Française de Développement dans un document, intitulé «Rente, développement du secteur productif et croissance en Algérie». C'est donc une économie rentière et la croissance économique est très dépendante du prix du pétrole (et du gaz). «La question que l'on peut se poser est la suivante: l'Algérie va-t-elle tirer les leçons des précédents chocs pétroliers et utiliser cette nouvelle manne afin de diversifier son économie en promouvant le développement du secteur manufacturier ?» s'interroge Hélène Djoufelkit. Selon l'économiste à l'Agence Française de Développement, il existe principalement deux canaux de transmission entre un choc en ressources et la croissance économique. Le premier, direct, passe par l'impact de la manne sur la compétitivité du secteur échangeable via l'appréciation du taux de change réel. C'est ce qu'on appelle le syndrome hollandais. Ce canal de transmission ne joue pas dans le cas de l'Algérie puisque le taux de change réel suit une tendance à la baisse (il s'est déprécié de 20 % entre 1999 et 2006) alors même que les termes de l'échange n'ont cessé d'augmenter. La compétitivité-prix du secteur manufacturier n'est donc pas handicapée, au contraire. Le second canal est plus indirect et passe par l'impact qu'ont ces rentes sur les incitations des acteurs économiques à exercer l'activité d'entrepreneur. « Dans les économies rentières, le grand concurrent de l'entrepreneur est l'importateur: les incitations à produire sont moins importantes que les incitations à importer dans un pays qui en a les moyens. Les incitations pour le développement d'un secteur productif se trouvent à trois niveaux : macroéconomique, microéconomique et institutionnel» explique Hélène Djoufelkit. Les incitations macroéconomiques sont les plus développées en Algérie. Elles concernent principalement la politique d'investissement dans les biens publics qui augmentent la rentabilité de l'industrie, telles que les infrastructures, le capital humain et la politique d'innovation. Ces incitations sont développées notamment à travers le Programme complémentaire de soutien à la croissance (PCSC) et sont renforcées par la Nouvelle politique industrielle (NPI). «Le volet formation professionnelle, dont l'Algérie a un immense besoin, mériterait cependant d'être encore étoffé» estime l'économiste de l'AFD. Les incitations microéconomiques au développement de la production et des exportations du secteur productif hors hydrocarbures sont faibles en Algérie. Celles qui existent, notamment au niveau du régime d'investissement et des avantages fiscaux, sont contrecarrées principalement par le difficile accès au crédit bancaire et par des coûts de transactions importants. L'accès au financement des entreprises algériennes pourrait être facilité en renforçant les incitations des banques à leur prêter, à travers trois types d'actions : le financement des garanties demandées par les banques, le renforcement des programmes de mise à niveau des entreprises algériennes en général et du volet des normes comptables en particulier, et enfin l'augmentation de la productivité des banques algériennes via leur modernisation. Finalement, les incitations institutionnelles sont celles qui posent le plus de problèmes. Dans le cas de l'Algérie, on peut parler de désincitations institutionnelles envers l'essor des activités productives qui se traduisent par un coût d'entrée sur le marché prohibitif pour les nouveaux acteurs économiques. Outre les coûts de transactions élevés déjà mentionnés, ces désincitations concernent le flou du cadre légal et l'importance du réseau personnel pour réussir dans les affaires, posant ainsi le problème de la collusion entre le secteur public et le secteur privé. Ces désincitations sont liées par ailleurs au manque de culture du secteur privé dans une économie où l'Etat a longtemps attiré (voire attire toujours) les élites. Enfin et surtout, elles concernent le problème du foncier industriel lié à la mauvaise gestion des terrains industriels et à la forte spéculation dont ils font l'objet, rendant leur coût prohibitif pour les nouveaux investisseurs. « La présence de la rente risque de renforcer encore les désincitations institutionnelles, En effet, la rente permet d'éviter les réformes en profondeur et favorise le maintien des intérêts en place. Les désincitations microéconomiques et institutionnelles risquent donc fort de compromettre l'effort de diversification de l'économie affiché par le gouvernement à travers notamment la Nouvelle politique industrielle » conclut.