“La sécurité de l'approvisionnement doit se payer". C'est en ces termes que le ministre de l'Energie et des Mines, M. Chakib Khelil, a expliqué, lundi lors du forum d'El moudjahid, la décision prise par l'Algérie d'opter, dans ses ventes de gaz, pour des contrats à court terme. "Nous voulons des contrats à court terme pour pouvoir négocier les prix de ce produit aux pays acheteurs, suivant les fluctuations du marché pétrolier", a-t-il ajouté. M. Khelil estime qu'actuellement, le gaz vendu dans le cadre des contrats à long terme l'est à des prix trop réduits. Par ailleurs, les contrats à long terme poussent souvent vers l'arbitrage. L'exemple le plus édifiant reste le conflit sur les prix du gaz entre Sonatrach et Gas Natural. Cette question des prix du gaz est d'autant plus importante que l'écart entre le gaz et le pétrole, sur lequel il est indexé, s'agrandit. En effet, au début du conflit avec Gas Natural, le pétrole était à 50 dollars. Aujourd'hui, il est à plus de 120 dollars. Pour M. Khelil, les prix du gaz doivent changer et la meilleure solution reste les contrats à court terme. Cette option reflète le souci de l'Algérie de titrer le maximum des exportations du gaz, dans un marché perturbé par l'instabilité des prix du pétrole. Comme les contrats gaziers sont habituellement établis à long terme, le gaz n'a pu suivre l'évolution des prix du pétrole à des niveaux record. Le raccourcissement de la durée des contrats serait une réponse logique à l'instabilité d'aujourd'hui. Les contrats à long terme comportent des clauses permettant un ajustement périodique des prix, mais un désaccord conduirait à un arbitrage interminable et coûteux. Dans un contrat à court terme, l'acheteur serait libre de chercher un meilleur prix ailleurs. L'Algérie n'est donc pas satisfaite des contrats d'exportation de gaz à long terme. Pour William Hardy, expert à l'agence Reuters, "l'Algérie, qui exporte du gaz par pipeline et du GNL par méthaniers, n'est pas partisane d'un arrêt des fournitures à ses clients mais elle cherche à indexer plus étroitement les prix du gaz sur ceux du pétrole". Il a, par ailleurs, précisé que " certains contrats à long terme conclus par Sonatrach pour le transport du gaz par canalisations semblent vraiment peu attrayants par rapport aux contrats signés récemment". Commentant les propos de M. Khelil, l'agence Reuters estime, à tord d'ailleurs, que cette vision est à l'opposé de "la conception conventionnelle" qui prévaut en Europe où l'on insiste sur l'importance des contrats à long terme pour la sécurité des approvisionnements du vieux continent. Il convient de rappeler à ce titre, que les réformes du marché européen induites par la Directive sur le gaz datant de 1998 cherchaient à établir une grande concurrence dans le cadre d'un marché fortement maillé et basé sur des contrats à court terme (spot) afin de mieux réguler l'offre et les prix. Cependant, Reuters, se référent à des déclarations de Jonathan Stern, de l'Oxford Institute For Energy Studies, considère que cette démarche constitue "une publicité tactique destinée aux européens" à qui l'Algérie adresserait le message suivant : " Si vous voulez mettre le prix à vos achats, nous vendrons le gaz sous contrats à court terme et quand ceux-là expireront, nous nous tournerons vers le plus offrant".