Les travaux de la rencontre organisée, dernièrement, à Tunis, sur la crise mondiale et ses impacts sur le secteur bancaire et financier maghrébin a recommandé de développer une stratégie commune devant favoriser la coordination des pays maghrébins. Cette stratégie a pour objectif de mettre en place des systèmes communs de maîtrise des risques bancaires dans les pays du Maghreb arabe et de faire converger les banques vers un même référentiel de politique monétaire. Cette stratégie sera axée pour l'essentiel sur l'harmonisation des règles de contrôle bancaire, d'autant que les banques centrales maghrébines s'emploient à l'heure actuelle à adopter les règles de Bâle II(dispositif prudentiel de gestion des risques bancaires). Taoufik Baccar, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie a estimé que les pays maghrébins doivent coordonner leur politique monétaire, renforcer l'indépendance des structures de surveillance et promouvoir une stratégie commune à même de se prémunir, insiste-t-il, contre la noirceur d'un environnement économique mondial où viennent se conjuguer, pour la première fois dans l'histoire de l'ordre marchand, un choc pétrolier, une crise du crédit après cinq années de croissance généralisée et une déflation brutale des actifs boursiers ou immobiliers. "La crise des subprimes aux Etats-Unis d'Amérique est une parfaite illustration des relations d'interdépendance entre acteurs au sein de sphères financières de plus en plus complexes, de l'endettement excessif des ménages américains et du déficit des mécanismes d'appréciation des risques de crédit", répète à l'envi M. Baccar, qui appelle ses homologues maghrébins à s'adapter désormais à un monde où la croissance crée autant d'instabilité que de richesses mettant ainsi en question beaucoup de modèles économiques. M. Hubert Reynier, secrétaire général adjoint de l'Autorité des marchés financiers en France, estime, pour sa part, que tout n'est pas noir partout car, précise-t-il, il s'agit pour les pays développés de faire preuve d'agilité pour s'adapter, par la réforme permanente, aux problématiques touchant au fonctionnement du marché des financements structurés, aux mécanismes juridiques de garantie des véhicules de titrisation et à l'augmentation du risque interbancaire du fait des fonds d'investissement mis en difficulté au bout d'un enchaînement mécanique où le risque "réputationnel" le dispute aux variations d'appréciation des agences de notation. Pour sa part, M. Jean François Pons, directeur de la Fédération des banques françaises, a indiqué que "dans son rapport de stabilité financière d'avril 2008, le FMI estime à 945 milliards de dollars l'impact sur l'économie mondiale soumise déjà aux chocs énergétiques et alimentaires dont les retombées néfastes se font sentir dans certaines grandes agglomérations d'Amérique latine et du monde arabe". Celui-ci appellera les banquiers du Maghreb à tirer les leçons adéquates de la crise, à assujettir tous les organismes pourvoyeurs de crédit à la réglementation de type bancaire et à adopter, dans les plus brefs délais, les recommandations de Bâle II en matière de prise en compte prudentielle des engagements directs ou indirects. D'une façon générale, conclut Madame Estelle Brack, responsable des Affaires internationales à la Fédération bancaire française, les turbulences récentes ont montré qu'un système fondé sur des financements de marché est plus vulnérable aux assèchements brutaux de liquidités qu'un système basé sur l'intermédiation bancaire ne l'est aux traditionnelles ruées sur les dépôts, même si ces dernières, insiste-t-elle, peuvent toujours se produire en l'absence d'une structure de garantie adéquate.