Pour les gouvernements et les consommateurs africains durement touchés par la récente flambée du prix du riz, le moment est venu d'entendre de bonnes nouvelles. En effet, des variétés du nouveau riz pour l'Afrique (NERICA®), un riz à haut rendement et résistant aux agressions extérieures, mis au point dans les années 90 par le Centre du riz pour l'Afrique, ont permis d'enregistrer une hausse de production de 6 % sur tout le continent en 2007, d'après un rapport récemment publié par l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Bien que la production rizicole en Afrique n'arrive toujours pas à satisfaire la demande, cette augmentation représente une avancée importante puisqu'elle démontre le potentiel d'amélioration du riz dans cette région. Ces bonnes nouvelles doivent être appréciées avec modération vu l'expansion rapide de la consommation de riz en Afrique. La région importe 40 % de ses besoins, soit un tiers du riz vendu sur les marchés mondiaux. En 2006, alors que les prix étaient bien plus bas, les importations de riz ont coûté 2 milliards de dollars à l'Afrique. Étant donné la dépendance extrême à l'égard du riz, la flambée des prix, qui pose de grandes difficultés aux habitants de régions en développement, frappe encore plus durement les consommateurs africains, allant jusqu'à provoquer des émeutes alimentaires dans plusieurs des principaux pays importateurs de riz.«Une telle dépendance aux importations de riz est un désastre en puissance», a déclaré Papa Abdoulaye Seck, directeur général du Centre du riz pour l'Afrique (Warda) implanté au Bénin, un des 15 centres financés par le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CGIAR), un partenariat stratégique soutenu par 64 membres, dont la Banque mondiale.Les nouvelles variétés de riz allient le haut rendement du riz asiatique (Oryza sativa) à la résistance aux agressions extérieures du riz africain (Oryza glaberrima). Le résultat de ce croisement est un riz robuste, adapté aux conditions locales et convenant le mieux aux plateaux secs qui constituent près de 70 % des rizicultures africaines. Les variétés NERICA® sont déjà plantées sur plus de 200 000 ha de terre dans plusieurs pays africains. Ces trois dernières années, elles ont été diffusées grâce à une approche axée sur la participation des agriculteurs dans le cadre du projet quinquennal NERICA® doté d'un budget de 35 millions de dollars, administré par Warda et financé par la Banque africaine de développement (AfDB), le gouvernement japonais et le Programme de développement des Nations unies (UNDP). Applaudissements et sourires aux lèvres : l'impact du NERICA n'est pas une simple affaire de statistiques. Une famille d'agriculteurs au Bénin applaudit les travaux de recherche qui ont permis le développement des variétés NERICA. Ce projet a permis d'introduire des variétés de riz améliorées dans une trentaine de pays africains, et tout particulièrement sept d'entre eux – le Bénin, la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Mali, le Nigeria et le Sierra Leone. En outre, il a assuré la formation de 1 225 techniciens et a appris à 6 500 agriculteurs – dont plus de la moitié sont des femmes – comment produire des graines de haute qualité. En 2007, la Guinée a réalisé une récolte record avec 1,4 million de tonnes – soit 5 % de plus que l'année précédente et la plus grande récolte de riz jamais obtenue – principalement due au soutien massif du gouvernement pour la diffusion du NERICA®. La production rizicole intérieure couvre désormais 70 % de la consommation nationale. Le gouvernement du Nigeria a annoncé que ses importations de riz avaient baissé de deux millions de tonnes en 2003-2004 à moins de un million en 2005-2006. Des dirigeants ougandais ont signalé que le pays avait réduit ses importations de riz de 60 000 tonnes en 2005 à 35 000 en 2007, soit une économie d'environ 30 millions de dollars. Les résultats obtenus par le projet NERICA® ont été présentés et discutés lors de la quatrième Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l'Afrique (Ticad) qui a eu lieu à Yokohama, au Japon, fin mai. C'est dans ce cadre que les dirigeants mondiaux et des experts en développement se sont rencontrés pour examiner les problèmes de développement les plus pressants du continent, notamment la crise des prix alimentaires actuelle. Cette rencontre a permis la mise sur pied de la Coalition pour le développement du riz en Afrique, qui ambitionne de doubler la production rizicole en Afrique subsaharienne au cours des dix prochaines années. Une autre initiative pour assurer l'essor rapide de la production rizicole africaine a été lancée par Warda, conjointement avec quatre grandes agences de développement après le Sommet mondial de l'alimentation organisé par la FAO début juin. Son objectif principal est d'accroître fortement l'offre de graines améliorées destinées à l'ensemencement 2009. A cette fin, le projet améliorera le processus de diffusion des semences et des engrais, ainsi que des pratiques de gestion des récoltes, dans le cadre de l'initiative de la FAO contre la flambée des prix alimentaires, à partir de plans d'action développés pour 11 pays.