Imaginons-nous déjà le 20 janvier 2009 : ce jour-là sera historique pour les Etats-Unis car soit le premier président de couleur prêtera serment à la Maison blanche, soit la première femme vice-présidente prendra ses fonctions. Le candidat républicain John McCain a surpris le pays, vendredi, en annonçant que son colistier serait une colistière en la personne de Sarah Palin, gouverneur de l'Alaska, âgée de 44 ans. McCain a annoncé sa décision seulement une douzaine d'heures après l'acceptation par le sénateur métis Barack Obama de sa désignation à la candidature démocrate. Il est le premier président métis à représenter à la présidentielle un grand parti américain. "Je pense que cela signifie que les Etats-Unis du XXIe siècle sont bien différents des Etats-Unis du XXe siècle", estime Candice Nelson, qui dirige le département politique à l'université de Washington. Les conquêtes réalisées par les minorités "se concrétisent désormais(...) dans tous les domaines de la vie américaine, même aux plus hauts échelons des fonctions électives - la présidence et la vice-présidence". Depuis une vingtaine d'années, le nombre de femmes et de membres de minorités diverses se lançant dans la carrière politique, au niveau local ou d'un Etat, a progressé; désormais, les membres de minorités, aux Etats-Unis, représentent 100 millions d'habitants, soit un tiers de la population totale. Cela signifie qu'un plus grand nombre de femmes ou de membres de minorités se présentent comme candidats, tandis que le pays se diversifie, déclare Paul Light, professeur à l'université de New York. "Le flux de candidats potentiels au niveau national est là(...)", dit-il. Depuis l'investiture du premier président des Etats-Unis, George Washington, en 1789, seuls des hommes de race blanche ont occupé les deux plus hautes fonctions à la tête de l'Etat à Washington. Jusqu'en 1920, les femmes américaines n'avaient pas le droit de vote. Si la Constitution des Etats-Unis a été amendée en 1870 de manière à autoriser le vote des Noirs, ce n'est guère que dans les années 1960, avec l'adoption de lois sur les libertés civiques, qu'ils obtiendront véritablement l'accès aux urnes. En 2004 encore, on a signalé quelques cas isolés d'intimidation visant à dissuader les Noirs de voter. Le cru 2008 de la présidentielle marque le point d'orgue d'une campagne présidentielle qui, dès les primaires, a connu son lot de premières historiques, dans la foulée de l'élection, en janvier 2007, de la démocrate Nancy Pelosi à la présidence de la Chambre des représentants. Hillary Clinton, qui au début de l'année faisait encore figure de favorite dans la course à l'investiture démocrate, est la femme qui, dans l'histoire des Etats-Unis, a de toute façon mené la meilleure campagne au niveau national. Au point qu'elle a pu dire que le total des voix qui s'étaient portées sur son nom durant les primaires équivalait à "18 millions de fêlures" dans le "plafond de verre" qui a empêché les femmes d'accéder à la Maison blanche. Palin n'est, elle, pas la toute première femme à être candidate à la vice-présidence. En 1984, la démocrate Geraldine Ferraro avait été la colistière de Walter Mondale, battu in fine à l'élection par le sortant républicain Ronald Reagan. Au Congrès, 78 femmes ont été élues à la Chambre des représentants fin 2007. Seize femmes siègent au Sénat. Au total, 42 Noirs sont élus au Congrès. Les derniers présidents en date ont nommé des femmes et des Noirs à de hautes fonctions dans leur administration: Madeleine Albright fut la première femme secrétaire d'Etat. Colin Powell fut le premier Noir à devenir secrétaire d'Etat. Au niveau des gouverneurs, on ne compte que deux Noirs actuellement, et seulement huit femmes, dans les 50 Etats.