Prenant acte de l'échec de la politique d'investissements précédente, lancée dans l'urgence lorsque l'Algérie avait besoin d'attirer le maximum d'opérateurs en leur accordant le maximum d'encouragements, le président Bouteflika n'a pas hésité à se livrer à une véritable autocritique, lors de sa dernière rencontre avec les maires. Ce qui a donné lieu à l'élaboration d'une nouvelle feuille de route pour l'économie nationale en vue de mettre plus d'ordre et de cohérence dans les investissements étrangers. A l'origine de ce changement de vision, on trouve d'abord la revente par le groupe égyptien Orascom de deux cimenteries construites dans des conditions très avantageuses, au groupe français Lafarge. Alors qu'elle concerne un secteur stratégique, la transaction a été effectuée sans aucune concertation avec les autorités. À sa décharge, Orascom a plaidé la bonne foi, soulignant que la vente des deux cimenteries algériennes résultait d'une décision stratégique de cession de la totalité de la filière ciment du conglomérat dans le monde. De fait, c'est un package de 10 milliards de dollars en tout qui a été convenu entre le conglomérat égyptien et Lafarge, englobant toutes les cimenteries d'Orascom. Néanmoins, l'État s'est senti dépouillé de son droit de préemption, dont l'exercice est revendiqué par toutes les autorités nationales à travers le monde, même les plus libérales. Outre cette bourde, on relève également la participation minoritaire de Sonatrach et de Sonelgaz dans un méga-projet d'usine d'aluminium, d'une capacité de 700 000 tonnes par an, à Béni Saf (ouest), dont l'investissement de 7,5 milliards de dollars doit être assuré à 70 % par le consortium émirati composé de Moubadala et Dubal. La participation publique avait été limitée à 30 %, alors que l'Algérie, avec des réserves de change de l'ordre de 150 milliards de dollars, pouvait facilement prendre la majorité du capital. Depuis cette affaire l'Algérie était revenue sur un amendement de sa loi sur les hydrocarbures afin d'obliger Sonatrach à prendre au moins 51% des partenariats dans l'exploration, la production et le transport. Si cette décision avait été prise de même pour les autres secteurs, cela aurait été bénéfique pour l'essor de l'économie nationale. Mais malheureusement ce n'était pas le cas jusqu'à ce que le Président se soit prononcé sur ce point précis, ce qui a poussé le gouvernement à notifier aux différentes administrations concernées qu'à l'avenir, l'Algérie entend détenir la majorité du capital dans les projets d'investissement impliquant des capitaux étrangers. Autre anomalie corrigée à la demande du chef de l'État, on remarque que la loi de finances complémentaire pour l'année 2008 exige désormais des sociétés ayant bénéficié d'avantages fiscaux de réinvestir en Algérie la part de leurs bénéfices exonérés d'impôts car le dernier bilan de la Banque d'Algérie concernant les transferts des bénéfices des entreprises étrangères installées dans le pays a laissé un goût amer dans la bouche des Algériens. Les sommes ont atteint un "pic" de 17 milliards de dollars en 2007. Le dernier élément de la nouvelle feuille de route présidentielle se rapporte à la décision des autorités de ne plus vendre de terrains industriels publics aux investisseurs, mais de leur accorder seulement des concessions à durées variables et renouvelables selon la consistance de leurs projets. La nouvelle législation, qui doit être promulguée prochainement, doit donc instaurer un régime de "concession permanente" des terrains publics industriels en faveur des investisseurs nationaux et étrangers. Son but est de mettre un terme au détournement du foncier acquis pour l'investissement et qui se retrouve détourné à des fins purement spéculatives, selon le gouvernement. Par l'élaboration de la nouvelle feuille de route pour l'économie nationale, le chef de l'État ne veut rien de plus que rétablir l'équilibre rompu en faveur des étrangers, au détriment des entreprises et de l'industrie nationales.