Le laboratoire européen d'anticipation politique (LEAP) E2020 estime que la crise systématique globale connaîtra en Mars 2009 un nouveau point d'inflexion, d'une importance analogue à celui de Septembre 2008. Il est considéré en effet, que cette période de l'année 2009 va être caractérisée par une prise de conscience générale de l'existence de trois déstabilisateurs majeurs de l'économie mondiale, à savoir : 1)- La prise de conscience de la longue durée de la crise. 2)-L'explosion du chômage dans le monde entier. 3)- Le risque d'effondrement brutal de l'ensemble des systèmes de pensions par capitalisation. Ce point d'inflexion sera ainsi caractérisé par un ensemble de facteurs psychologiques, à savoir la perception générale par les opinions publiques en Europe, en Amérique et en Asie que la crise en cours a échappé au contrôle de toute autorité publique, nationale ou internationale, qu'elle affecte sévèrement toutes les régions du monde même si certaines sont plus affectées que d'autres, qu'elle touche directement des centaines de millions de personnes dans le monde "développé" et qu'elle ne fait qu'empirer au fur et à mesure que les conséquences se font sentir dans l'économie réelle. Les gouvernements nationaux et les institutions internationales, n'ont plus qu'un trimestre pour se préparer à cette situation qui est potentiellement porteuse d'un risque majeur de chaos social. Les pays les moins bien équipés pour gérer socialement la montée rapide du chômage et le risque croissant sur les retraites, seront les plus déstabilisés par cette prise de conscience des opinions publiques. La crise affectera de manière diversifiée les différentes régions du monde. Cependant, et LEAP/2020 souhaite être clair sur ce point, contrairement aux discours actuels des mêmes experts qui niaient l'existence d'une crise en gestation il y a trois ans, qui niaient il y a seulement six mois qu'elle soit systématique, LEAP/2020 anticipe une durée minimale de trois ans pour cette phase de décantation de la crise. Elle ne sera ni terminée au printemps 2009, ni l'été 2009, ni début 2010. C'est seulement vers la fin 2010 que la situation commencera à se stabiliser et s'améliorer un peu dans certaines régions du monde, à savoir l'Asie et la zone Euro, ainsi que pour les pays producteurs de matières premières énergétiques, minérales ou alimentaires, (d'ailleurs ce sont les matières premières qui commencent à déjà relancer le marché du transport maritime international). Ailleurs, elle continuera. En particulier aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, et dans les pays les plus liés à ces économies, où elle s'inscrit dans une logique décennale. C'est seulement vers 2018 que ces pays peuvent envisager un retour réel de la croissance. Par ailleurs, il ne faut pas imaginer que l'amélioration de la fin de 2010 marquera un retour à une croissance forte. La convalescence sera longue ; par exemple, les bourses mettront également une décennie à revenir aux niveaux de l'année 2007, si elles y reviennent un jour. Il faut se souvenir que Wall Street mit 20 ans à revenir à ses niveaux de la fin des années 1920. Or, selon LEAP/2020 cette crise est plus profonde et durable que celle des années 1930. Cette prise de conscience de la longue durée de la crise, va progressivement se faire jour dans les opinions publiques au cours du trimestre à venir. Et elle déclenchera immédiatement deux phénomènes porteurs d'instabilité socio-économique : la peur panique du lendemain et la critique renforcée des dirigeants du pays. Le risque d'effondrement brutal de l'ensemble des systèmes de pension par capitalisation Enfin, dans le cadre des conséquences de la crise qui affecteront directement des dizaines de millions de personnes aux Etats-Unis, au Canada, au Royaume-Uni, au Japon, aux Pays-Bas et au Danemark en particulier, il faut intégrer le fait qu'à partir de cette fin d'année 2008, vont se multiplier les nouvelles concernant les pertes massives des organismes gérant les actifs censés financer ces retraites. L'OCDE estime à 4 000 milliards de dollars les pertes des fonds de pension pour la seule année 2008. Aux Pays-Bas comme au Royaume-Uni, les organes de surveillance des fonds de pension viennent de lancer des cris d'alarme demandant en urgence un accroissement des cotisations obligataires et une intervention de l'Etat. Aux Etats-Unis, ce sont des annonces multiples d'augmentation des contributions et de diminution des versements qui sont émises à un rythme croissant. Et c'est seulement dans les semaines à venir, que nombre de fonds vont pouvoir faire réellement le décompte de ce qu'ils ont perdu. Beaucoup s'illusionnent encore de leur capacité à reconstituer leur capital à l'occasion d'une prochaine sortie de crise. En Mars 2009, quand gestionnaires de fonds de pensions, retraités et gouvernements vont simultanément prendre conscience que la crise va durer, qu'elle va coïncider avec l'arrivée massive des " babyboomers " à la retraite, et que les bourses ont peu de chance de retrouver avant de longues années leurs niveaux de 2007, le chaos va s'installer dans ce secteur et les gouvernements vont se rapprocher de plus en plus de l'obligation d'intervenir pour nationaliser tous ces fonds. L'Argentine qui a pris cette décision il y a quelques mois, apparaîtra alors comme un précurseur. Ces tendances sont toutes déjà en cours. Leur conjonction et la prise de conscience par les opinions publiques des conséquences qu'elles entraînent, constituera le grand choc psychologique mondial du printemps 2009, à savoir que tout le monde est plongé dans une crise pire que celle de 1929 ; et qu'il n'y a pas de sortie de crise possible à court terme. Cette évolution aura un impact décisif sur la mentalité collective mondiale des peuples et des décideurs, et modifiera donc considérablement le processus de déroulement de la crise dans la période qui suivra. Avec plus de désillusions et moins de certitudes, l'instabilité socio-publique globale va s'accroître considérablement. B. Chellali