Les programmes de dépenses publiques n'auront pas, jusqu'à présent, permis à l'Algérie de mettre sur pied une économie solide et indépendante des hydrocarbures. La raison réside dans le fait que les entreprises nationales n'auront pas en finalité profité de cette opportunité. En fait, la hausse des prix du pétrole, et par ricochet des recettes de l'Algérie, ne s'est soldée que par une hausse des dépenses et une augmentation incomparable des importations. Or, la conjoncture actuelle, marquée par une crise économique mondiale sans précédent, impose à l'Algérie, dont l'économie reste inexorablement vulnérable, de faire face aux nouvelles menaces. C'est dans ce sens que les pouvoirs publics ont procédé, dernièrement à certaines mises au point pour ce qui est des procédures de passation des marchés publics et des règles devant régir l'investissement étranger. C'est suite au Conseil des ministres tenu le 7 décembre dernier, que le Premier ministre, M. Ahmed Ouyahia, a adressé deux directives les 21 et 22 décembre dernier, aux membres du gouvernement, walis, présidents de SGP et responsables des EPE non affiliées afin de rappeler les objectifs du gouvernement en matière de relance économique. Il en ressort, ainsi, qu'il s'agit d'imposer le strict respect de la loi, de freiner les importations qui se chiffrent actuellement à 35 milliards de dollars, de lutter contre le gaspillage et la fuite des capitaux et de renforcer les entreprises nationales. Ainsi, et pour ce qui est de la passation des marchés publics, le Premier ministre a demandé, dans une instruction datée du 22 décembre, d'appliquer à la lettre les "dispositions pertinentes du décret présidentiel n°02-250 du 24 juillet 2002, amendé et complété, portant règlementation des marchés publics". Il s'agit particulièrement de l'article 11 et de l'article 19 lequel stipule qu'" une marge de préférence de 15 % est accordée au produit d'origine algérienne pour tous les types de marchés visés par l'article 11 ", à savoir l'acquisition de fournitures, la réalisation de travaux, la prestation de services et la réalisation d'études. L'instruction précise que les deux articles en question n'ont nullement été abrogés ou amendés. Le Premier ministre précise dans sa correspondance que d'après les données recueillies auprès des entreprises "la production d'origine algérienne est souvent récusée lors de la passation de marchés publics, y compris lorsque sa qualité est comparable à celle des biens et services proposés par des entreprises étrangères. L'argument souvent avancé dans ce cas est le prix compétitif offert par les soumissionnaires étrangers". Aussi, pour M. Ouyahia la décision du Conseil des ministres de contenir les importations est une opportunité pour rappeler la nécessité de respecter la loi dans ce sens. Et de préciser que la règle de la prévalence de la production locale est appliquée même dans les pays de vieille tradition libérale. La crise menace Ainsi, dans sa correspondance le Premier ministre a clairement ordonné aux administrations, ministères, entreprises publiques et à la Commission nationale des marchés de respecter la règle de la préférence nationale. Il a été également étendu son application aux grands travaux, les services et les fournitures. "Les entreprises publiques sont la propriété de l'Etat, leurs plans de charge sont souvent le fruit de programmes de dépenses publiques et lorsqu'elles font face à des difficultés, elles se tournent vers l'Etat pour leur assainissement financier ou pour leur accorder des subventions", a-t-il précisé. Pour ce qui est du cadre règlementaire devant régir l'investissement direct étranger et les transferts de devises, et dans une instruction datée du 21 décembre 2008, le Premier ministre estime que l'aisance financière dont jouit actuellement l'Algérie du fait de ses recettes des hydrocarbures ne devraient pas occulter la réalité des menaces auxquelles est confrontée l'économie nationale. M. Ouyahia indique que l'évaluation de l'impact que pourrait avoir la crise économique mondiale sur l'Algérie fait ressortir le fait que même si l'Algérie bénéficie d'une position financière extérieure positive pour encore 5 ans, les équilibres budgétaires sont soumis à tension du "fait de la structure de l'économie nationale et de la forte dépendance des recettes du Trésor envers la fiscalité pétrolière". Il résumera les menaces qui planent sur l'économie algérienne dans la progression de la facture des importations (300% en six ans) et de l'excès de la dépense encouragé par le crédit à la consommation, ainsi que l'excès des avantages consentis dans le cadre de la législation régissant l'investissement étranger en matière de transfert de capitaux et la marginalisation de fait de la production nationale sur son marché induite par le démantèlement tarifaire, les règles de crédit et la fraude douanière, fiscale et sociale. Ainsi, plusieurs mesures conservatoires ont été prises par les pouvoirs publics algériens. Dans ce sens, il est institué l'obligation pour tout investissement étranger découlant d'une offre d'un opérateur étranger de réaliser seul un investissement ou en partenariat, d'aboutir à une répartition du capital constitutif dans laquelle l'actionnariat national sera majoritaire. Aussi, toute négociation liée à un investissement étranger devra inclure une clause par laquelle le projet devra dégager une balance de devises excédentaire au profit de l'Algérie. Par ailleurs, tout octroi d'avantages que ce soit dans le cadre du régime général ou du régime des conventions devra spécifier que les montants équivalents à ces avantages douaniers, fiscaux ou autres seront déduits des bénéfices éligibles au transfert. Enfin, l'instruction du Premier ministre précise que tout investissement étranger "devra, hormis le capital constitutif, mobiliser exclusivement sur le marché financier local les crédits requis pour sa réalisation". Selon la note en question, cette dernière mesure devra encourager les investisseurs en cette période de raréfaction du crédit et permettre de rentabiliser les liquidités accumulées au niveau des banques publiques. M. Ahmed Ouyahia a précisé néanmoins , que cette démarche "ne constitue nullement une intention de l'Algérie de remettre en cause les engagements internationaux qu'elle a déjà contractés, ni de remettre en cause la construction d'une économie de marché", mais, estime-t-il ces objectifs ne doivent en aucun cas justifier d'ouvrir la voie à un libéralisme sauvage, dans lequel l'intérêt général est perdu de vue. Samira G.