"Mais nous voici devant le palais d'Hadj-Ahmed, un des plus complets échantillons de l'architecture arabe, dit-on. Tous les voyageurs l'ont célébré, l'ont comparé aux habitations des Mille et Une Nuits. Il n'aurait rien de remarquable si les jardins intérieurs ne lui donnaient un caractère oriental fort joli. Il faudrait un volume pour raconter les férocités, les dilapidations, toutes les infamies de celui qui l'a construit avec les matériaux précieux enlevés, arrachés aux riches demeures de la ville et des environs. " disait Guy de Maupassant, le disciple de Flaubert lors de son passage au début du XIXème siècle dans la ville des Ponts, Constantine. Le palais du Dey, véritable joyau architectural, mosaïque d'un savoir faire musulman qui s'était manifesté entre le IXème et le XVème siècle, rouvrira ses portes après plusieurs années d'une restauration qui a nécessité tant de savoir et de moyens. L'initiative du ministère de la Culture de redonner vie à notre patrimoine matériel qui se meurt, tout croule tous les jours un peu plus sous les intempéries et le poids des hommes, s'est faite dans une conjoncture spéciale, "Alger capitale de la culture arabe 2007", un événement qui a nécessité un budget spécial de plusieurs milliards. Ce n'est pas seulement le palais du Dey qui a été touché par cette vaste entreprise de réhabilitation, mais aussi certains monuments comme le musée des Arts populaires de la basse Casbah, le musée des Beaux arts, la mosquée Katchaoua etc…. Entamée, depuis quelques temps, la rénovation du chef d'œuvre architectural du Palais du Dey à Constantine rouvrira ses portes selon une source chargée de sa restauration, " dans moins de trois mois ". Sans fixer une date précise, la même source a néanmoins assuré que cet édifice " pourrait être rendu à la ville au courant du mois d'avril prochain car la dernière phase de restauration touche à sa fin." Selon la même source, cette phase " assez délicate " a mis à contribution, pour les finitions, " tout un ensemble de petits artisans de différentes spécialités, parmi lesquels des dinandiers pour la lustrerie artisanale, des céramistes pour les revêtements délicats et des ébénistes pour la reproduction ou la restauration des menuiseries anciennes ". Cela explique, a-t-on soutenu, la "relative lenteur des travaux et l'impossibilité d'avancer une date fixe pour la réception du palais ". Néanmoins, le palais sera livré " sans son magnifique marbre et sa polychromie superposée et riche en couleur, deux pièces maîtresses qui nécessitent une attention toute particulière et une expérience exceptionnelle pour leur réhabilitation ", a précisé le représentant de la cellule chargée du projet de restauration. L'inestimable polychromie qui orne les murs du palais sur 1.600 mètres carrés et qui permet la datation et la lecture des différents événements historiques comme les batailles auxquelles a pris part le Bey aux côtés du Dey d'Alger, ainsi que ses différents voyages au Moyen-Orient et à la Mecque, a été abîmée par des " rajouts ", œuvre de la présence coloniale française, qui ont "altéré l'originalité de l'œuvre " et rendu " encore plus complexe sa restauration ", a affirmé la même source. Cette problématique a décidé le maître de l'ouvrage à opter pour une nouvelle étude qui sera effectuée ultérieurement par des spécialistes étrangers en vue " d'établir la partie qui devra être gardée et de reconstituer le délicat et précieux marbre ", a-t-on également noté. Le Palais Ahmed Bey est la trace vivante de la civilisation Ottomane. Inauguré en 1835 et ne tarda pas à être occupé par l'armée française et visité par Napoléon III. Appelé aussi la palais de ma Division, ce monument occupe tout un côté de la place Foch (ancienne place du Palais, aujourd'hui place Si Haouès). Ce vaste édifice (5609 m2) fut construit sur l'ordre du dernier Bey à l'emplacement de vieilles maisons accolées les une aux autres. Il fut terminé peu de temps avant la prise de Constantine par les Français. Pour sa construction, Ahmed Bey eut recours à deux artistes réputés, El Hadj El-Djabri, originaire de la ville et le Kabyle El-Khettabi. Les bâtiments d'ordonnance assez irrégulière s'organisent autour de deux jardins spacieux et de deux cours plus petites. Au milieu se trouve le kiosque du bey qui, éclairé de tous côtés par des fenêtres, permettait une active surveillance. C'est dans ce palais que le harem était logé. Pour construire son palais, Ahmed Bey n'hésita pas à utiliser des matériaux de toutes provenances. Les colonnes et autres pièces de marbre furent achetées en Italie et transportées, par l'entremise du Génois Schiaffino, de Livourne à Bône, où les attendaient des caravanes de muletiers et de chameliers. Le bois de cèdre fut demandé aux tribus de l'Aurès et de la Kabylie. Les pierres de taille furent prélevées sur les ruines de l'antique Cirta. Cela ne suffit pas, et le bey réquisitionna tout ce que les principales habitations de Constantine possédaient de remarquable comme marbres, colonnes, faïences, portes et fenêtres. Le palais devint ainsi comme un musée des pièces les plus curieuses et les plus riches de la menuiserie et de la sculpture. Une fois restauré, ce futur musée ethnographique verra l'aménagement de plusieurs dépendances, dont notamment une salle de conférences, une bibliothèque, un club de rencontres, des ateliers et une salle d'exposition permanente pour les besoins culturels de la ville et de sa région. Rebouh H