Le directeur général du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn, a estimé, mardi sur France Inter, qu'il fallait intensifier les plans de soutien aux banques et la coordination internationale sous peine de voir la crise durer. Il a, néanmoins, appelé à arrêter toute distribution de dividendes des banques aidées par les Etats et à sanctionner les dirigeants des établissements financiers à l'origine de la crise. Le système financier dans le monde entier n'est pas encore sain et, du coup, les effets de la relance ne sont pas suffisamment importants, a-t-il affirmé, ajoutant que l'organisation, la régulation mais aussi la sortie de crise doivent avancer du même pas à la réunion de chefs d'Etat du G20 du 2 avril. L'année 2009 va être difficile et la sortie de crise n'est pas à attendre avant début 2010 si on fait tout comme il faut, alors que dans le cas contraire, elle va durer, a-t-il prévenu. Les Etats ont suivi les recommandations du FMI sur la question des plans de relance de l'économie réelle même si l'ampleur manque un peu au Japon, en Europe, dans certains autres pays, mais c'est surtout du côté des banques que le bât blesse, juge le patron du FMI. Il faut aller jusqu'au bout du nettoyage du bilan des banques, qui ne se met pas en place assez vite, a-t-il ajouté. Il a admis qu'il était paradoxal de dépenser des centaines de milliards de dollars pour sauver des banques qui sont à l'origine de la crise, insistant sur le fait que ces dernières étaient indispensables au fonctionnement de l'économie mondiale. On ne va pas se priver de sauver nos banques sous prétexte qu'il y a des dirigeants qui ont mal fait leur travail, a-t-il remarqué, appelant à arrêter toute distribution de dividendes des banques aidées par les Etats et à limoger les dirigeants s'ils ont mal fait leur travail. Il a aussi jugé scandaleux le niveau atteint par la rémunération de certains dirigeants de banques. Il est normal que les gens plus qualifiés, qui prennent plus de risques, soient mieux rémunérés. Mais il y a des limites aux inégalités et il faut les corriger, notamment par la fiscalité, a-t-il prôné. Il a aussi appelé à intensifier la concertation mondiale, en particulier en Europe, où il voit des divergences de mise en oeuvre dans les plans de relance entre les différents pays. En outre, le plan que lance le président américain, Barack Obama, est quand même d'une autre ampleur que ce que font les Européens, a-t-il fait valoir. On s'est contenté d'armes trop légères contre les paradis fiscaux Sur la question de la réforme de la réglementation financière, il s'est dit en faveur d'une action à la dynamite sur les paradis fiscaux, même si un certain nombre d'Etats considèrent que ce n'est pas le plus urgent. Strauss-Kahn souhaite et espère des progrès dans ce domaine lors du sommet européen de mars et du G20 à Londres, début avril. La future réglementation devrait aussi limiter les capacités d'endettement qui ont précipité la crise. Pour l'instant, on s'est contenté d'armes trop légères contre les paradis fiscaux, a-t-il déploré. Au niveau européen, Paris et Berlin, qui mènent la lutte de concert, ont demandé la révision, d'ici à l'été, de la liste noire des pays non coopératifs établie par l'Organisation pour la coopération et le développement économique en Europe (OCDE). N'y figurent pour l'instant que trois pays, Monaco, l'Andorre et le Liechtenstein. De son côté, le ministre français du Budget, Eric Woerth, a estimé que les paradis fiscaux étaient une honte et annoncé des mesures de rétorsion contre les banques faisant transiter de l'argent par ces territoires. Dans le même contexte, Nicolas Sarkozy a également émis l'idée qu'aucune banque bénéficiant d'aides publiques dans le cadre des plans de relance ne puisse travailler dans ces territoires. Selon les estimations d'un collectif d'ONG, dont Transparency International (TI), plus de 400 banques, deux tiers des 2.000 hedge funds et deux millions environ de sociétés financières sont hébergés dans la soixantaine de paradis fiscaux et judiciaires recensés dans le monde, dont la moitié en Europe. La France et l'Allemagne organiseront, en juin 2009, une réunion sur les paradis fiscaux dans la capitale allemande pour faire le point sur les mesures envisagées. Enfin, le directeur général du FMI a appelé à non seulement à doubler les ressources du FMI mais aussi les ressources qu'on peut utiliser pour les pays pauvres. Ouzna Mesroua