C'est l'accalmie sur les marchés des produits de base. Les craintes se dissipent et la fièvre des prix s'estompe. Ainsi sur le marché des céréales de Chicago, les prix du blé, du maïs et du soja ont reculé la semaine dernière. Les prix du soja ont fortement chuté, alors que la production de l'Argentine, un important exportateur, pourrait être moins affectée que prévu par la sécheresse qui a frappé le pays. Le blé et le maïs ont suivi la tendance, également pénalisés par le regain d'inquiétude sur la situation financière et la gravité de la récession mondiale, qui a fait chuter la Bourse de New York à des niveaux qui n'avaient plus été vus depuis six ans. "Les cours du soja ont été très faibles ces derniers jours, les opérateurs se rendent compte que la production en Argentine ne va pas être trop affectée par la sécheresse", a expliqué Bill Nelson, de Doane Advisory Services. Alors que le pays a subi une longue période de sécheresse, de nouvelles pluies sont intervenues cette semaine, permettant au soja semé en janvier de se développer. Certains analystes estiment désormais que la production dépassera les 40 millions de tonnes, alors que les prévisions s'établissaient entre 35 et 40 millions ces dernières semaines. Les autorités argentines ont aussi annoncé une augmentation de la surface cultivée en soja, ce qui a pesé sur les cours. Le cours du maïs, également cultivé en abondance en Argentine, a été moins sensible à l'évolution du climat, car il est désormais trop tard pour espérer une amélioration de la production. La semaine prochaine, le marché devrait garder les yeux tournés vers ce pays, où les principales fédérations agricoles, qui considèrent que leurs produits sont trop lourdement taxés, ont lancé vendredi une grève des ventes de cinq jours. Le marché craint un nouveau mouvement durable, comme l'an dernier de mars à juillet. Une longue grève serait bénéfique aux exportations des Etats-Unis, autre important producteur, et pourrait donc soutenir les cours sur les marchés américains. De leur côté, les prix des métaux industriels ont fini cette semaine en baisse sur le London Metal Exchange (LME), où la morosité était de mise comme sur les autres marchés, métaux précieux exceptés, en raison de l'aggravation des inquiétudes sur l'économie mondiale. "Après avoir rebondi grâce à des achats de couverture pendant les dernières semaines, les métaux de base semblent à présent se diriger vers de nouveaux plus bas", a observé Kevin Norrish, de Barclays Capital. "Avec de sérieux déclins de la demande et des augmentations massives des stocks, la question est de savoir à quelle vitesse le marché pourra retourner à l'équilibre", a noté l'analyste, ajoutant qu'il fallait désormais observer le volume de "matière secondaire", rebut ou matériau de substitution, pour anticiper les cours. En Chine, par exemple, la demande de cette "matière secondaire" se serait effondrée au dernier trimestre, les importations étant diminuées d'un quart par rapport à l'an dernier. "Le sentiment des investisseurs reste très fragile et il faudra un sacré rebond des marchés d'actions pour réduire la vulnérabilité des positions", a résumé William Adams, du cabinet Base Metals. "Même si les Etats-Unis parviennent à restaurer un peu de confiance, l'attention s'est détournée vers l'Europe de l'Est" a-t-il précisé, alors que d'autres analystes comme Michael Widmer, de BNP Paribas, insistaient davantage sur la demande chinoise, qui représente un tiers de la demande mondiale. L'aluminium est descendu jusqu'à 1.300 dollars la tonne vendredi, un plus bas depuis sept ans, plombé par la montée des stocks au LME. "L'aluminium ne s'en sort pas trop mal si l'on considère que ses stocks ne montrent pas de signe de diminution", a cependant commenté Edward Meir, de MF Global. John Reade, d'UBS Metals, a souligné que l'Inde allait imposer des taxes sur les importations chinoises, pour protéger sa propre industrie. "La Chine, de son côté, achète des matières premières en large quantité, du soja à l'aluminium en passant par le sucre, afin de soutenir les cours alors que ses exportations sont tombées à des plus bas depuis treize ans, en raison du recul de la demande européenne et américaine", a ajouté l'analyste. Il a également rapporté les propos du patron de Norsk Hydro, John Ottestad, pour qui, sur l'ensemble du monde occidental, l'offre devrait encore s'ajuster, et baisser de près de 20% pour retrouver un équilibre de marché. Le cuivre a fini en nette baisse, malgré des achats du même type que l'aluminium par la Chine. Ses stocks au LME ont grimpé à un plus haut depuis cinq ans. Le plomb s'est aussi tassé, comme l'étain et le zinc. Les prix du nickel ont encore cédé du terrain et touché jeudi un plus bas depuis le 18 décembre dernier, en tombant à 9.630 dollars la tonne. Synthèse R.T.M.