8 Mai 1945 à Sétif, c'est un jour de marché. Les gens qui vendent et achètent sont nombreux, ainsi que les manifestants. 8h30, parmi ceux qui célébraient leur victoire sur l'Allemagne hitlérienne, des Algériens sont présents. Des drapeaux des alliés s'élevaient et le drapeau national a été brandi par Saâl Bouzid, un jeune âgé de 22 ans à l'époque, premier martyr de ce génocide. Pour la France coloniale, massacrer 45 000 civils, qui manifestent pacifiquement, a été une logique d'extermination. Les manifestants du 8 Mai 45 à Sétif, Kherrata et Guelma et dans d'autres régions, par lesquelles le peuple algérien voulait rendre hommage aux Algériens tombés pendant la guerre, ne provoquèrent que haine, violence et répression coloniale. Autant de formes d'expression répressive du colonialisme et instruments de protection des lois du profit et de l'exploitation.Les Algériens ont manifesté leur espoir à la liberté et à la libération, du fait que la lutte antinazie, à laquelle des milliers d'Algériens ont participé, était une lutte pour la libération nationale. En réponse, l'armée française a tiré à bout portant sur les manifestants. Toute la communauté internationale était plongée dans la consternation devant ces massacres perpétrés en Algérie, particulièrement à l'Est du pays. Les balles assassines ont choisi les milliers d'Algériens qui avaient osé croire aux promesses de liberté du monde libre. L'armée coloniale avait mis en branle tous les moyens répressifs et criminels pour étouffer la colère du peuple algérien. Si la date du 8 Mai 45, comme l'apprécient les historiens, tournait à jamais une page des plus sanglantes de l'histoire de l'humanité, écrite par le nazisme que les nations éprises de liberté ont pu vaincre, au prix de millions de vies humaines, elle en ouvrait une autre, en Algérie, non moins terrifiante, à la faveur des manifestations de joie et de liesse populaire qu'un tel événement était à même de provoquer une répression sauvage par les irréductibles tenants de l'ordre colonial. Malgré cette extermination à ciel ouvert, le peuple algérien ne s'est pas découragé. Il a exprimé sa forte résistance à l'encontre de l'occupant. Les chouhada du 8 Mai 45 ont écrit l'une des plus belles pages de l'histoire. Une étincelle qui provoqua le sursaut dans la conscience nationale et qui fermenta jusqu'au premier Novembre 54.La présence française en Algérie qui a duré 132 ans, a astreint tout un peuple à une situation des plus dramatiques. Parce qu'ils avaient payé le prix du sang, plusieurs centaines de milliers de morts et des dizaines de milliers de blessés sur les champs de bataille de l'Europe, lors des deux Grandes Guerres, en combattant dans les rangs des armées de l'empire, aux côtés des forces alliées, les Algériens pensaient qu'ils avaient arraché à la puissance coloniale française cette reconnaissance tant espérée de leur droit à l'émancipation, au prix du sang. Depuis des années, le peuple algérien, ses dirigeants, assistaient malgré les interpellations, y compris de la classe française, à un silence assourdissant de l'Etat français concernant les massacres du 8 Mai 45 et tout ce qui touche à la Guerre d'Algérie.La nation algérienne est, aujourd'hui, dans tous ses droits d'exiger de la France coloniale l'examen des faits constitutifs de ses crimes avérés, sur lesquels la vérité n'a jamais été dite et à propos desquels la justice ne s'est jamais prononcée. Ahmed Saber