C'est toujours un événement de voir l'un des nôtres arborer l'étendard de leur plat pays et de monter pour la première ou la nième fois (c'est selon) les marches de la mythique salle olympique parisienne, l'Olympia. C'est un peu comme s'ils allaient toucher un bout de ciel, pendant que le public souvent issu de l'émigration fait ses vœux. Après Lounis Ait Menguellet le mois passé, c'était au tour du King du rai, le Khaled international, de donner un concert vendredi dernier dans cet espace symbolique et populaire. Khaled avait proposé à ses fans quelques titres de son nouvel album "Liberté ", pas encore distribué chez nous sauf chez les professionnels du piratage. Il avait l'opportunité de présenter ses nouvelles chansons, dont le tube Même pas fatigués en duo avec le groupe Magic System. Dans " Liberté ", le king va encore plus loin chercher dans le socle de l'authentique rai comme un retour à la source pour nous donner un vintage des origines. Sorti chez Universal Az, " Liberté " rappelle déjà ses succès des années 70 et 80 d'autant plus que la star du rai a fait dans ce produit un retour triomphant vers l'istikhbar, (prélude). A la faveur de cette nouvelle production, Khaled a déjà effectué une tournée dans l'hexagone qui l'a conduit dès le 22 mars dernier au festival banlieue bleue, le 07 mai au Luxembourg et le 15 mai à la prestigieuse salle parisienne de l'Olympia, un espace où il s'est déjà produit. " Liberté " est signé ainsi deux ans après son pathétique " Ya Moul Kar " paraphé en 2007. A sa naissance à Oran un 29 février 1960, c'était Hadj Brahim Khaled, puis une fois hissé sur la scène artistique c'est devenu, Cheb Khaled, puis une fois consacré mondialement, c'est devenu, Khaled tout court, un king qu'on appelle par son prénom comme un intime. Hadj Brahim Khaled est né à Sidi-El-Houari, un faubourg d'Oran, qu'il chante à longueur de tube. C'est Elvis et Johnny et le charme voire l'hystérie qu'ils engendrent autour, qui titillera le cœur du jeune Khaled qui voudra plus tard devenir comme eux, chanteur. Il fera alors l'école buissonnière, préférant l'animation des mariages aux bancs scolaires. Mais il lui faudra attendre ses seize ans révolus pour balancer, son premier 45 tours Trig Lycée, apologie provoc de la drague et de l'école buissonnière. Khaled bravera tous les tabous pour devenir le porte-parole de cette musique- là. C'est lui qui inaugurera la liste des chebs, en se branchant raï sur une prise de 10 000 volts. Lorsqu'il débarque en France en 86, pour un festival de raï à Bobigny, Cheb Khaled met le feu à l'Hexagone. Ses cassettes l'avaient déjà précédé dans la communauté, mais Khaled agite son raï comme jadis Elvis son pelvis. Il décide de quitter l'Algérie pour s'installer dans la région parisienne. Son premier album " européen ", Kutché au tournant des années 90, est un métissage vers le jazz et la pop. Mais c'est en 1992 qu'explose la bombe Didi, premier hit d'un genre inédit: le raï-groove. A trente et un ans, Khaled échange son titre de Cheb pour ceindre la couronne du King de la sono mondiale. L'album Didi produit à Los Angeles par le funky Don Was se satellise tout autour de la planète. Deux ans plus tard, en 1993, Khaled publie N'ssi N'ssi, produit par Don Was et Philipe Eidel. Et, au crépuscule de l'année 96, Khaled entreprend son " troisième voyage de Sinbad avec Sahra. D'abord entouré de Philipe Eidel et du fidèle Kada, Khaled jette les bases de l'album dans le petit studio qu'il s'est installé à la maison. Puis, il retrouve Jean-Jacques Goldman au Studio Davout, pour y enregistrer l'invincible Aïcha, son premier succès dans la langue de Molière. Un second titre imparable, Le Jour viendra, bâti sur une trame multicolorée de violons et de oûd (luth) naîtra de ces cessions dorées par Goldman. Destination Jamaïque avec Eidel. Ils retrouvent Clive Hunt qui a réuni pour l'occasion les cuivres des Wailers et quelques vétérans du reggae sound comme Mickey Chung. Hunt et Eidel unissent leurs talents sur El Harba, un funky léger. Puis, à Kingston, au Tuff Gong Studio du clan Marley, il enregistre trois titres avec Hunt, où ses racines africaines percutent leur cousine jamaïcaine en un métissage inédit de raïggae : Mektoubi et ses cuivres incendiaires, Raikoum en high-life afro-oriental désorientant et surtout Ouelli El Darek, imparable chanson d'amour couleur reggae-slow roots où les chœurs des I-Threes battent la chamade. Rebouh H.