General Motors (GM), qui fut durant trois-quarts de siècle "la plus grande entreprise du monde", doit être déclarée en faillite par un juge new-yorkais, lundi 1er juin à 8 heures du matin (14 heures à l'heure française). Celui-ci désignera comme administrateur judiciaire Al Koch, du cabinet AlixPartners. Le PDG de GM, Fritz Henderson, a annoncé une conférence de presse qui devait avoir lieu lundi en milieu de journée. La Maison Blanche a fait savoir que le président Barack Obama s'exprimerait également. L'heure est venue pour le géant américain de l'automobile , qui a accumulé presque 100 milliards de dollars (70,8 milliards d'euros) de pertes en quatre ans, de se restructurer sous la férule de l'Etat américain, une fois son plan de restructuration avalisé par le tribunal. Pourquoi la faillite. L'ex-PDG, Rick Wagoner, a lutté pour éviter cette issue. Il estimait que son impact serait terriblement néfaste pour la confiance des acquéreurs et pour la préservation de la valeur de l'action en Bourse. Il craignait aussi que fournisseurs et concessionnaires soient affectés par une faillite, au point de mettre en danger toute restructuration en bon ordre de GM. Pour une entreprise qui manque cruellement de liquidités, cette perspective n'avait de sens que si les ventes repartaient à la hausse, ou du moins se stabilisaient. Or elles ont continué de dégringoler à un rythme ahurissant : - 45 % sur un an. General Motors a perdu plus de 10 milliards de dollars sur le seul premier trimestre 2009. De même que les ventes, l'action de General Motors, qui valait encore 17 dollars (12 euros) en avril 2008, s'effilochait sans fin (elle était tombée à 75 cents la semaine du 25 mai). L'obstination de M. Wagoner à éviter le dépôt de bilan est apparue de plus en plus incongrue. En mars, la Maison Blanche lui a indiqué la porte de sortie, avant de débloquer une nouvelle aide financière de 4 milliards de dollars. Dès lors, les experts ont jugé la faillite de GM quasi inéluctable. Les conditions de la mise en faillite. GM est placée sous le chapitre 11 de la loi américaine sur les faillites. Dans le cadre d'un redressement judiciaire, le tribunal doit avaliser le plan de restructuration qui l'accompagne. Celui-ci prévoit que l'Etat américain détiendra initialement 72 % des actions du groupe restructuré, le fonds d'assurance-santé du syndicat des salariés de l'automobile (UAW), 17 % et les détenteurs d'obligations, 10 % (les autres actionnaires ne détenant pas plus de 1% depuis l'effondrement du cours). Les créanciers obligataires se jugeaient lésés par ce montage. Il leur a été offert de monter, à terme, jusqu'à 25 % du capital du nouveau GM. Ils ont accepté à 54 % la proposition du Trésor, ouvrant la voie à la présentation devant le juge d'un plan bénéficiant du soutien de tous les grands actionnaires. Le contenu du plan de restructuration GM sera scindée en deux entités, l'une aux finances assainies, l'autre regroupant les dettes et les unités devant être vendues ou fermées. Le "nouveau GM" ne gardera, d'ici à trois ans, que 31 sites de production sur ses 47 actuels. Il n'emploiera plus qu'une moitié des salariés recensés à la fin 2008 et ne préservera que quatre marques : Cadillac, Chevrolet et GMC, plus Buick pour le marché chinois. Ses neuf autres (Pontiac, Saab, Vauxhall, Saturn, etc) seront vendues, comme Opel, ou démantelées. GM réduira d'un tiers le nombre de ses concessionnaires. L'avenir de GM En 1962, le géant employait 605 000 salariés et détenait 51 % du marché américain. En 2008, lorsque le constructeur, supplanté par Toyota, avait perdu le titre de numéro un mondial de l'automobile qu'il détenait depuis 1931, beaucoup d'analystes jugeaient qu'avec une recapitalisation rapide et une fois trouvée une solution au handicap structurel que fait peser sur ses finances le versement des retraites et la couverture maladie de ses retraités, il pourrait de nouveau soutenir la concurrence. Aujourd'hui, il apparaît qu'une fois restructuré, GM sera devenu un acteur moyen-fort du marché automobile, mais loin de détenir sa puissance d'antan. Sur la chaîne Fox Business, Peter Morici, économiste de l'université du Maryland, rappelait que, le 8 décembre 2008, Barack Obama avait évoqué un plan où "les constructeurs ne reviendraient pas six mois plus tard pour redemander de l'argent". Or le Trésor devra investir plus qu'il ne prévoyait pour relancer GM (on évoque 50 milliards de dollars). L'expert rappelait le "cas Leyland", ce constructeur britannique nationalisé en 1975 sous un gouvernement travailliste avant d'être démembré sous Margaret Thatcher.