Le "spectre", c'est le cas, puisque la nouvelle intervient au lendemain de l'augmentation du prix du lait. Une éventuelle flambée du prix du sucre jette le circuit commercial national, (importateurs, distributeurs et consommateurs), dans une effervescence larvée. Dans une inextricable situation de prévision, du "wait and see", l'augmentation est presque certaine. L'annonce par l'UE, de la baisse de 13.5% du quota de la production de ses états membres, fait déjà ravage dans les esprits des consommateurs aux bourses moyennes qui, sans ces imprévus échappent aux calculs des opérateurs locaux et aux politiques nationales et appréhendaient ce genre de hausses, comme retombées inévitables des récentes revalorisations des revenus des fins de mois. D'abord, le fait illustre une fois de plus, la désagréable dépendance de notre économie des marchés extérieurs et le grave degré de la déliquescence et de l'immoralité de certains opérateurs nationaux. Pourtant, de façon générale, le niveau de l'offre de la demande et par conséquent celui des stocks, est souvent un élément déterminant dans le secteur des produits de base. En Algérie, ce n'est pas toujours le cas, lorsqu'on connaît la tendance facile, de ces derniers, à la spéculation. L'équation semble être plus compliquée dans le cas du sucre, dont la production a connu des étapes différentes qui ont fini par lui donner une importance stratégique prépondérante, surtout dans les pays de l'UE. Celle-ci décide de baisser le quota de la production, après tout le soutien institutionnel qui a été accordé à l'industrie sucrière depuis plusieurs décennies. En effet, depuis 1995, les stocks ont gonflé de manière importante, voire impressionnantes et les Européens, après avoir piégé les pays associés, reviennent donc pour remettre en cause leur rythme de production. Effectivement, de 60,5 millions de tonnes en 1997, la production a augmenté de plus de 25% en l'espace de quatre années, atteignant ainsi 74 millions de tonnes en 2001, ce qui explique la tendance à la baisse des prix pendant cette période. Aujourd'hui, la situation est inversée : les responsables de l'UE redoutent une grave surproduction, d'où la décision de réduire la production de 13.5% lors de la saison 2007/2008 ! Ce taux correspond à deux millions de tonnes de moins, sur le marché international. Le sucre affirme alors sa valeur. Il nourrit actuellement bien de polémiques à l'échelle mondiale. Son importance est perçue sous des angles différents. Si pour l'Organisation internationale du sucre, la question est de savoir, comment réagir face à l'excédent estimé à plus de 7.2 millions de tonnes de sucre enregistré pour la saison 2006-2007. Pour les pays consommateurs et dépendants totalement des cours internationaux, comme le notre, l'opprobre sera jeté sur les conséquences du système first in first out (FIFO). Ce dernier, qui signifie, premier arrivé premier servi, est pour rappel appliqué dans le cadre de l'accord d'association signé avec l'UE. Il faut noter aussi, qu'en vertu de cet accord, l'UE bénéficie d'un contingent de 150 000 tonnes de sucre blanc à l'exportation vers l'Algérie à 0% de droits de douanes. En fin d'année, le rush des importateurs algériens sur ce produit, surtout en périodes de fortes consommations comme pendant le Ramadhan, se traduit par une hausse du prix du sucre blanc et roux au niveau des marchés boursiers. L'intervention des deux producteurs nationaux, Cevital et l'Enasucre a permis de stabiliser le marché local, mettant à nue les malsaines manœuvres des spéculateurs. Mais, dans les conditions présentes, cette solution ne peut pas être envisagée puisque le contingent est déjà consommé. Une rétention des stocks de sucre blanc par les importateurs pour les besoins de la spéculation est à craindre. Cela leur faciliterait l'écoulement des quantités acquises hors contingent. Quoiqu'il en sera, les responsables du commerce devraient tirer les leçons afin de rectifier la démarche. On ne peut plus clair, le réseau de distribution est des plus déréglé et vulnérable. Cet état de faits est d'autant plus favorisé par le système FIFO foncièrement d'essence spéculative, en ce sens qu'il ouvre les voies devant le monopole du premier venu ! Et le consommateur algérien risque d'être plus déplumé que jamais, s'il continue à payer cher un produit censé être de large consommation, et non dépendant de la spéculation effrénée de certains importateurs peu regardants.