L'agriculture intensive détruit l'habitat de nombreuses espèces animales menacées de disparition dans l'UE, a déploré lundi la Commission européenne en invitant les gouvernements à "redoubler d'efforts" pour protéger les zones les plus vulnérables. L'exécutif européen s'appuie sur les données d' un rapport sur l'état de conservation de plus de 1 150 espèces et 200 types d'habitats protégés par la législation communautaire. Seul un nombre réduit de ces habitats et espèces vulnérables présentent un bon état de conservation. L'alerte est donnée pour "les formations herbeuses et les zones humides et côtières", dont l'état est jugé "particulièrement mauvais" en raison de "la disparition progressive des modèles d'agriculture traditionnels". "L'état de conservation de tous les habitats associés à l'agriculture est bien pire que celui des autres types d'habitats", dénonce le rapport. "Cette situation est due à l'évolution vers une agriculture plus intensive, à l'abandon des terres et à une mauvaise gestion des sols", souligne la Commission. M. Stavros Dimas, membre de la Commission chargé de l'environnement, a déclaré à ce propos que l'UE est "déterminée à mettre un terme à l'appauvrissement de la biodiversité en Europe, et le rapport publié aujourd'hui montre qu'il ne faut pas baisser la garde. Si l'on veut que les habitats et les espèces vulnérables retrouvent un bon état de conservation, il nous faudra y consacrer du temps et beaucoup d'efforts. La législation communautaire en matière de protection de la nature et le réseau Natura 2000 sont des instruments essentiels pour atteindre les objectifs liés à la préservation de la biodiversité dans l'Union européenne. La partie terrestre du réseau étant quasiment achevée, la situation devrait s'améliorer sensiblement au cours des dix à vingt prochaines années." "En Europe, la biodiversité, toujours soumise à une forte pression, est gravement menacée. S'il est certain que nous n'atteindrons pas l'objectif que nous nous étions fixé, à savoir mettre un terme au déclin de la biodiversité en Europe d'ici à 2010, certains progrès ont néanmoins été constatés. Ainsi que le commissaire l'a affirmé récemment à Athènes, pour la période postérieure à 2010, il conviendra de fixer des objectifs clairs, ambitieux et mesurables. Tout en gardant l'accent sur la valeur intrinsèque de la biodiversité, il s'agira également de mettre en avant le rôle fondamental qu'exercent les écosystèmes lorsqu'ils sont résilients et dans un bon état de conservation, ainsi que les services y sont associés", a déclaré le professeur Jacqueline McGlade, directeur exécutif de l'Agence européenne pour l'environnement. Récemment, les fédérations d'apiculteurs ont aussi dénoncé cette situation, cause selon eux de la disparition de milliers de colonies d'abeilles. "Certaines régions sont devenues des déserts verts, sans aucune fleur", ont-ils déploré lors de la présentation à la presse du congrès Apimondia organisé du 15 au 20 septembre à Montpellier, dans le sud de la France. "Plus de la moitié des reptiles --59%-- et près de la moitié --42%-- des amphibiens d'Europe sont en déclin et sont plus menacés que les oiseaux et les mammifères", note la Commission. L'Europe abrite 151 espèces de reptiles (serpents, lézards notamment) et 85 espèces d'amphibiens, dont beaucoup ne vivent en nul autre endroit de la planète, souligne la Commission. Et les pays européens sont obligés à maintenir un certain nombre de types d'habitats et d'espèces, sous peine d'amendes. L'organisation écologiste BirdLife a salué ce rapport et réclamé une réforme radicale de la politique agricole commune (PAC), premier poste de dépenses du budget de l'UE. "C'est notre dernière chance pour stabiliser notre environnement rural", a affirmé l'un des responsables de l'Organisation pour l'UE, Konstantin Kreiser. Stavros Dimas a invité les gouvernements européens à "redoubler d'efforts pour améliorer la situation". Quatre pays --Espagne, Portugal, Chypre et la Grèce-- ont en outre été invités à compléter d'urgence les données manquantes sur l'état de conservation de plus de 50% des espèces déclarées sur leur territoire et considéré pour l'instant comme "inconnu". "Mais le tableau n'est pas entièrement sombre", souligne la Commission en citant pour exemple le retour de certaines espèces comme le lynx d'Eurasie, l'ours brun, le loup et le castor dans plusieurs régions de l'UE. Dalila T.