Selon le dernier rapport du Programme des Nations unies pour l'environnement (Pnue) publié à l'occasion de la Journée mondiale de l'environnement, protéger forêts et tourbières qui "piègent" le CO2 et améliorer les méthodes agricoles limiterait efficacement et à moindre coût le réchauffement climatique. Achim Steiner, directeur exécutif du Pnue, souligne que "Selon certaines estimations, les écosystèmes de la planète pourraient permettre de capturer plus de 50 gigatonnes (Gt) de carbone au cours des prochaines décennies". Réduire la déforestation de 50 % d'ici 2050 et la maintenir à ce niveau jusqu'en 2100, permettrait d'éviter des émissions de 50 Gt de carbone au cours du siècle, estime le Pnue. Les forêts tropicales constituent le plus important "puits" de carbone, absorbant actuellement environ 1,5 Gt de C02 par an, soit 15 % des émissions dues aux activités humaines. Au rythme actuel (14 millions d'hectares par an, soit la superficie du Bangladesh), la déforestation est responsable de près d'un cinquième des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, soit plus que le secteur du transport. Améliorer l'abattage des arbres permettrait de réduire de 30 % les pertes de CO2 que ces opérations génèrent en détruisant la végétation. Le secteur agricole, qui génère environ 2 Gt de carbone par an, pourrait de son côté devenir neutre en carbone d'ici 2030 si des méthodes de culture plus favorables à l'environnement comme l'utilisation d'engrais naturels, compost ou fumier, étaient adoptées. L'agroforesterie, associant cultures ou pâturages et plantations d'arbres, permettrait également d'éviter des émissions de carbone dans les régions tropicales - entre 10 et 50 tonnes par hectare, selon le rapport. Le climatologue réputé Philippe Ciais souligne pour sa part qu'un ha de forêt tropicale plantée sur un sol nu permet en moyenne de stocker 350 tonnes de carbone en incluant le carbone dans le sol. Cette étude vient confirmer les conclusions d'une autre étude de référence : l'étude Mac Kinsey, publiée en janvier 2009. Celle-ci montre que les mesures de lutte contre le réchauffement basées sur la sauvegarde de forêts tropicales, le reboisement et l'évolution des pratiques agricoles peuvent permettre de réduire d'au moins 30 % les émissions mondiales de gaz à effet de serre, pour un coût bien inférieur, à quantité de carbone égale, à celui des technologies propres et des énergies renouvelables mises en œuvre par les pays développés pour limiter leurs émissions de CO2. Mais, pour cela, il faut changer les pratiques des paysans des pays en développement, ce qui suppose de mettre en place de nouvelles politiques de rémunération de leur travail. Alors que le G8 d'Aquila, en Italie, vient de reconnaître pour la première fois le seuil maximal des 2°C de réchauffement, déjà approuvé par plus d'une centaine de pays dont l'Union européenne, ces études récentes confirment que la communauté internationale doit modifier sa hiérarchie des priorités et des moyens à mettre en œuvre pour lutter efficacement contre le dérèglement climatique. Elle doit mettre au premier rang du futur traité qui remplacera le Protocole de Kyoto à partir de 2012 la préservation des forêts tropicales, le reboisement et la réorientation de l'agriculture mondiale vers des productions et des pratiques sobres en émissions de gaz à effet de serre.