Le Programme alimentaire mondial (PAM) connaît un déficit de financement sans précédent ; seulement 3,7 milliards de dollars sur 6,7 milliards du budget seront financés par les programmes. Une catastrophe humanitaire, a annoncé jeudi sa directrice, Josette Sheeran. Elle a annoncé en conséquence des coupes à hauteur de 3 milliards de dollars, autant de rations et de programmes en moins pour près de 108 millions de personnes souffrant de la faim dans 74 pays. L'urgence est financée uniquement par des contributions, pour la plupart venant des gouvernements.Le PAM fait face à " des pénuries de financement dangereuses et sans précédent ", a-t-elle déclaré lors d'une conférence de presse qu'elle a donné avant des réunions prévues à la Maison-Blanche, à Washington. Josette Sheeran doit y appeler l'administration du Président Obama et les autres leaders à ne pas oublier les urgences.Les Nations-unies expliquent dans un communiqué qu'au Bangladesh " un programme du PAM destiné à nourrir 300 000 enfants à l'école ne pourra bénéficier qu'à 70 000 enfants ". Le PAM espérait nourrir 5 millions de personnes mais devra réduire ses ambitions à 1,4 million seulement." Au Guatemala, 100 000 enfants de moins de 5 ans et 50 000 femmes enceintes ou allaitantes risquent de perdre leur dose de Vitacereal, un mélange très nutritif de mais, de soja et d'oligoéléments (riboflavine, vitamine B6, niacine, iode, et fer) " ajoute le PAM. 3,2 millions de kenyans vont également voir leur ration alimentaire décroître. " La crise alimentaire n'est pas terminée dans le monde en développement. En fait la situation est plus alarmante qu'il y a un an parce que la crise des prix alimentaires est multipliée par la crise financière ", explique le PAM.Josette Sheeran a salué l'annonce du dernier Sommet du G8 d'octroyer 20 milliards de dollars pour accroître la sécurité alimentaire et relancer l'agriculture dans les pays en voie de développement. Mais elle a rappelé qu'il fallait également permettre l'accès des populations les plus pauvres à l'alimentation."Le prochain G20, qui aura lieu aux Etats-Unis et sera présidé par Barack Obama, devra prendre des mesures " non seulement contre la crise financière mais aussi contre la faim ", a rappelé la directrice du PAM.La faim dans le monde, la malnutrition, l'accès à l'eau potable, demeurent des problèmes majeurs non résolus à ce jour. D'après les chiffres de la FAO (Organisation des Nations-unies pour l'alimentation et l'agriculture) en 2008, il n'y pas eu de progrès de réduction de la faim ces dernières années. Plus de 9 millions de personnes meurent chaque année des suites directes ou indirects de la faim, 6 millions d'enfants de moins de cinq ans. Plus de 2 milliards d'être humains souffrent de " faim cachée ", c'est-à-dire de carences en vitamines et en minéraux, qui ont des conséquences en terme de développement et de santé graves voire mortels.En 2006, 777 millions de personnes sont sous-alimentés dans les pays en voie de développement. En 2007, elles sont 799 millions. Les conflits armés ont des répercussions mortelles sur l'alimentation de la population locale : les ressources sont détournées par l'armée, les populations sont encerclées, affamées, ou obligées de fuir et dépendent de l'aide humanitaire pour se nourrir. La crise alimentaire mondiale connue aujourd'hui, à cause de la hausse du prix des denrées alimentaires de base ne fait qu'aggraver la situation. Les conséquences de la malnutrition, des carences, de la faim, de l'insécurité alimentaire sur la santé humaine sont très graves ; perte de potentiel humain, problème de croissance et de développement, systèmes immunitaire affaibli, capacités physiques et mentales restreintes, jusqu'à la cécité et au décès. La FAO avait prédit au mois de juin dernier : " la faim dans le monde devrait s'accroître davantage ". Précisant ses estimations, elle annonce que 2009 sera l'année de tous les records : environ 11 % de personnes en plus, par rapport à 2008. 100 millions de personnes supplémentaires, soit 1,02 milliards d'êtres humains, en tout. Un triste chiffre se rapportant aux futures victimes de la famine, selon la FAO. Ce calcul se base sur l'étude du Service de recherches économiques du Département de l'agriculture des Etats-Unis." La récente aggravation de la faim dans le monde n'est pas le résultat de mauvaises récoltes au niveau mondial. Elle est une conséquence de la crise économique mondiale qui a entraîné une baisse des revenus et pertes d'emplois, réduisant ainsi l'accès des pauvres à la nourriture ", indique Jacques Diouf, directeur général de la FAO.La faim dans le monde, en chiffres, c'est 642 millions de personnes en Asie, 265 millions en Afrique subsaharienne, 53 millions en Amérique latine et Caraïbes, 42 millions au Proche-Orient et Asie du Nord et 15 millions au total dans les pays développés. Ahmed Saber